RETOUR D’EXPÉRIENCE

ITAR

 

Architecte DPLG depuis 2000, Ingrid Taillandier a très rapidement porté son attention sur trois activités : la pratique de l’architecture, l’écriture et l’enseignement. Elle est diplômée de l’École d’architecture de Paris-Belleville et d’un master de l’université de Columbia à New York. Ce double parcours entre nouveau monde et vieux continent a apporté une dimension intuitive et libre à sa réflexion sans le cadre d’une rigueur assumée, de concepts maîtrisés et d’une éthique sociale forte.

Elle a collaboré en France et à l’international avec Philippe Gazeau, Richard Meier et Benish & Partners avant de fonder sa propre agence. Elle enseigne depuis 2005 en école d’architecture, à Paris-La Villette en premier lieu, et depuis 2011 à Versailles où s’exerce son plaisir de transmettre le goût d’une architecture inventive et réfléchie. Son travail et ses réflexions ont été vivement salués par le Prix spécial des Femmes architectes en 2016.

Logements à Paris, 17ème © ITAR+ FRESH

Depuis 2006, ITAR architectures imagine, conçoit et réalise des logements collectifs. Une histoire singulière est écrite à l’occasion de chaque projet afin d’apporter une réflexion contextuelle et tirer parti de toutes les qualités d’un lieu.
La matérialité est interrogée autant d’un point de vue technique que pour ses qualités esthétiques.

La lumière naturelle, les ambiances produites, les qualités spatiales, la relation à la ville sont aussi des sensibilités cultivées au sein de l’agence afin de proposer une architecture simple, sobre et efficace. Une attention est portée aux continuités urbaines par des accroches délicates aux bâtiments voisins dans un contexte urbain dense. À l’inverse, dans un tissu plus lâche, un travail fin sur la volumétrie et le retournement des façades met en valeur le bâtiment dans son contexte.
L’architecture se compose autour des usages et des usagers qui sont placés au cœur des réflexions de l’agence. Un livre de portraits d’habitants de quatre immeubles construits sort d’ailleurs en octobre, HabITARe, aux éditions Archibooks, avec comme fil conducteur l’appropriation des lieux de vie et le lien social.

Ayant consacré de nombreux articles aux problématiques liées à la densité et à la hauteur, Ingrid Taillandier a été commissaire scientifique de l’exposition « L’Invention de la Tour européenne » au Pavillon de l’Arsenal en 2009. Convaincue que la densification de certains quartiers apporte une réponse environnementale et une réponse aux besoins croissants de logements, l’agence a conçu des tours de moins de 50 m, des émergences dont deux, pour Ogic, sont en cours de chantier, une à Batignolles Paris 17e, associée à Fresh, et une à Lyon Part-Dieu, imaginées comme des lames élancées et sculptées.

Les espaces extérieurs sont essentiels dans ces deux projets car ils font appel à l’imaginaire de la maison individuelle et font rêver. Ils sont généreux, en partie en double hauteur, et permettent d’avoir un espace extérieur à soi, appropriable comme on l’entend, pour équilibrer en quelque sorte le désagrément de la vie collective. Une trame verticale béton pour l’une, et une résille aluminium pour l’autre, passent au-devant des balcons. Elles habillent et animent les façades en créant un jeu de séquences et de doubles hauteurs, tout en préservant l’intimité et en protégeant des vis-à-vis. Ces deux projets surplombent des cœurs d’îlot végétalisés offrant une respiration urbaine et desservant les différents programmes.

Logements et foyers à Lyon Part-Dieu © ITAR+ FRESH

Le béton utilisé ici en panneaux préfabriqués et pré-isolés est à la fois structure et parement pérenne. Par une matrice très légèrement marquée, il donne l’effet d’un matériau « naturel », évocateur d’une certaine vérité structurelle.

Pour le projet de résidence étudiante à La Verrière pour Linkcity et Efidis, la brique en parement est le matériau durable et marquant de la proue, annonçant les nouvelles voies de cette zone d’activités en pleine requalification. Les circulations, paliers d’étages, hall, escaliers sont éclairés naturellement et deviennent ainsi de véritables lieux de sociabilité. Le jeu de composition des façades se révèle sur toute la longueur du bâtiment par une différenciation des volumes, des retraits et des matériaux, afin de réduire la massivité du bâtiment. Le fractionnement des volumes et façades utilisé ici se retrouve sur d’autres projets, comme celui de 28 logements de la rue de Pyrénées pour Paris Habitat qui alterne enduit blanc et parement aluminium anodisé à faibles ondulations. Chaque appartement possède sa loggia et une double orientation, profitant par de généreuses baies vitrées du soleil et de la vue.

Selon ITAR architectures, la conception de lieux de vies urbains de qualité réunit ordre et désir, soit le maniement des contraintes multiples et le plaisir de l’ancrage dans le réel.

Texte : Carine Merlino
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