DÉCRYPTAGE

AIR DU TEMPS

 

Temps des festivals et de spectacles en plein air, l’été fait vibrer les pierres plus ou moins vieilles au rythme de spectacles et d’installations. Thierry Vincent et Elodie Tampon Lajariette de la Compagnie B.A.L. Arts Légers nous emmènent à la Villa Arson et au musée Cocteau. Avec Elodie Nourrigat et Jacques Brion c’est une nouvelle édition du Festival des architectures Vives à Montpellier qui nous entraîne dans les cours secrètes de Montpellier.

 La Compagnie BAL des arts légers à la Villa Arson et au musée Cocteau

Homme de théâtre, Thierry Vincent a créé en 2003 la Compagnie B.A.L. Arts Légers à partir du Livre de l’intranquilité de Fernando Pessoa. « L’optique était d’aller à la rencontre des publics là où ils ne sont pas forcément et de jouer dans des lieux inattendus qui nous charment et offrent en eux-mêmes de véritables scénographies », dit Thierry Vincent. Depuis, lui-même et les comédiens qui l’entourent parmi lesquels Elodie Tampon Lajariette, Elise Clary et Laurent Prévot, sans oublier Alexandre Toscani, leur maître des lumières cultivent avec talent l’éclectisme éclairé d’un répertoire très ouvert. La littérature et d’autres textes choisis côtoient l’architecture et le monde des jardins dans des « comédies jardinières » ou des lectures musicales.
« C’est au monastère Franciscain de Saorge (Alpes Maritimes) qui a été l’un des lieux fondateurs de la Compagnie que sont nées les comédies jardinières », précise Thierry. « Depuis, dans le cadre d’un partenariat avec Monum, nous intervenons dans d’autres monuments historiques.» Pour valoriser le théâtre en tant qu’art vivant en évitant l’ornement, ces édifices et leurs jardins sont des complices de haut rang. « Aujourd’hui, quand la palette des distractions est énorme, nous nous attachons à créer dans ces lieux coup de cœur des formes de spectacles plus légères que les œuvres plus longues à monter sur lesquelles nous travaillons en parallèle. » Une commande de la Villa Arson leur a permis de se confronter au somptueux site de Villa Arson sur les hauteurs de Nice. Ce cadre unique et ses jardins réunissent l’ancienne demeure du banquier Pierre-Joseph Arson dont Balzac s’est inspiré pour son Balthazar Claës dans La Recherche de l’absolu et la superbe architecture brutaliste d’une école d’art créée dans les années 1970 signée par l’architecte Michel Marot. « Le galet », un texte de Francis Ponge « très savant de modestie » selon Thierry, les murs de Marot, un architecte qui rêvait justement « de lézards, de Méditerranée et de galets » et le jeu d’Elodie s’acoquinent avec grâce dans ce lieu protéiforme que l’on n’épuise jamais.

En mars dernier après restauration, la salle des mariages de Menton ornée de fresques de Jean Cocteau a été inaugurée. Belle occasion d’y produire une lecture musicale au fil d’une déambulation entre la salle et le musée Cocteau, œuvre de Rudy Ricciotti qui offre « l’horizontalité d’un espace blanc à proximité de la mer où chaque pas s’inscrit. » La Compagnie interviendra aussi pour une lecture de texte de Le Corbusier, le 12 juillet à 18h30 à Roquebrune Cap-Martin sur le site Cap moderne qui réunit la Villa E-1027 d’Eileen Gray, le restaurant L’Etoile de mer et Le Cabanon de Le Corbusier.

 

 

Le Festival des architectures vives dans les cours secrètes de Montpellier

Crée en 2006 par les architectes Elodie Nourrigat et Jacques Brion de l’agence NBJ, tous deux aussi enseignants à L’Ecole Nationale d’Architecture de Montpellier, le Festival des Architectures Vives est un joyeux rendez-vous annuel. Avec 16 000 visiteurs en 2017, il ne cesse de gagner en notoriété et se déroulera cette année du 12 au 17 juin. Au cœur du centre historique de Montpellier, il investit chaque année, les cours d’une quinzaine d’hôtels particuliers habituellement fermés au public et l’édition 2018 donne accès à de nouveaux espace tels la cour Soulages du Rectorat. « En créant ce festival qui propose des parcours architecturaux et la découverte de créations contemporaines éphémères, nous avions plusieurs objectifs », dit Elodie Nourrigat. « Il permet aux visiteurs de découvrir des sites patrimoniaux diversifiés et emblématiques tout en présentant dans chacun de ces lieux une installation spécifique qui révèle une relation intime entre une architecture contemporaine et un site patrimonial. Nous tenions, enfin, à promouvoir la jeune génération d’architectes. Avec cette année pour thème « Sencity », nous invitions les concepteurs consultés à s’emparer des challenges de la ville contemporaine pour imaginer des créations éphémères valorisant la notion de ville sensible en ouvrant les champs d’une nouvelle approche émotionnelle. En 2017, le FAV et le Festival québécois Passages insolites ont été sélectionnés par la Commission permanente de coopération franco québecoise portée par le Consulat de France à Québec pour une action de co-conception. Cette année, la grande nouveauté est la mise en place d’une action invitant  des classes de primaire à participer au FAV. Ainsi, en réponse au programme Education Artistique et Culturelle porté par le ministère de la Culture et le celui de l’Enseignement Supérieur de la Recherche et de l’Innovation, ce programme associe l’Académie de Montpellier et l’Ecole d’Architecture de Montpellier  autour du FAV. 4  classes de CM1-CM2 et 13 étudiants de l’ENSAM ont ainsi collaboré pour construire 4 installations.

Avec une délicate cascade de fleurs métalliques à l’hôtel de Mimram, l’installation « Complicity » des architectes Camille Vannier et Maylis Meyer s’apparente en quelque sorte à un jardin partagé, où le visiteur est invité à compléter la réalisation d’un champ de fleurs évolutif, interactif  et sensible. Dans un contraste amical avec les pierre rugueuses de l’hôtel Baudon de Mauny, Noël Picaper et Hugo Bertrand de l’agence Floating Fantaisy proposent un monde de miniatures où chacun est libre de projeter sa propre histoire.

 

 

Texte : Christine Desmoulins

Visuels : © Claude Valenti

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