RÉALISATION

JEAN-PAUL VIGUIER ARCHITECTURE

 

Après son rachat de Neuf Cegetel, SFR a souhaité redéployer ses activités en les réunissant sur un seul site. Le choix s’est porté sur un campus de 4,2 ha pour imbriquer espaces extérieurs et intérieurs dans un seul bâtiment à forte identité susceptible d’accueillir d’emblée les 8 000 salariés et plus à terme.

 

Histoire du projet
En 1989, SFR se rend acquéreur du terrain. Qui a tout pour déplaire. Et plaire aussi. Plat, étiré en longueur, il borde des friches et au sud des immeubles plutôt fermés sur eux-mêmes, pour se prévenir du contexte encore de piètre qualité, alors que d’autres opérations s’annoncent, complétées par la réalisation d’un petit parc – mais sans certitude absolue. Contrainte de taille, au nord et à l’est, les deux autoroutes croisées à angle droit, l’A1 et l’A86, celle-ci en talus, à la circulation lourde et bruyante, forcent à s’en protéger. En revanche, leur connexion directe avec le Grand Paris et l’aéroport de Roissy, la proximité de deux stations de RER, d’une troisième possible pour plus tard, s’affichent en positif comme la présence de la grande figure toute proche du Stade de France. N’empêche, à l’époque il faut un certain culot pour décider de s’implanter dans ce no man’s land. Ou plutôt du flair et une vision stratégique. Car ce terrain sonne sans doute la fin prochaine des opportunités foncières d’une telle envergure au sein du Grand Paris dont l’hyper densité se profile déjà.

Le programme architectural
À l’issue d’un concours restreint, l’exacte adaptation de la proposition de Jean-Paul Viguier à ces exigences l’impose de soi. Pour la présenter, il emploie la métaphore de l’arbre. L’image en plan est effectivement parlante. Au nord, le long de l’A86 et de son talus planté, les façades s’étirent en zigzag et peuvent évoquer un tronc, symbole de force, de solidité, d’enracinement, son aspect un peu tourmenté soulignant sa capacité à s’adapter et à tenir face aux difficultés dans la durée. Vers le sud, des bâtiments en peigne perpendiculaires ou légèrement de biais se déploient telles des branches puissantes et variées à l’image des nombreux métiers de SFR.

Des mots faciles qui prêtent à sourire ? Le « ce qui se conçoit bien s’énonce clairement » de Nicolas Boileau (1636-1711) tient toujours. Et toute proposition architecturale devrait pouvoir s’expliquer en quelques mots clairs et intelligibles. Que le projet réponde aussi à la stratégie d’assemblage et/ou de découpage en unités autonomes visée par SFR n’enlève rien à la pertinence du discours. D’autant que le thème de l’arbre renvoie consciemment ou non au développement durable, à cette nature à aimer et protéger. De la rue, impossible de ne pas remarquer son omniprésence, juste là, au-delà d’une grille discrète, respiration dans la ville aux antipodes de la logique bunker des immeubles voisins. Imbriquée à l’architecture, l’une et l’autre inséparables, imaginées ensemble dès les premières heures du projet, chacune se développe sur deux hectares.

Les élévations de hauteurs changeantes (jamais plus de R+7) déclinent un même thème d’ouvrants verticaux de verre clair et de panneaux aluminium blanc et jaune pâle, décalés d’étage en étage de quelques dizaines de centimètres. De quoi signer l’identité de l’ensemble, son image générale vibrante, comme floutée, et introduire toutes sortes de déclinaisons selon les parties, comme pour les bâtiments du côté sud. Plus ou moins longs et découpés, ils sont creusés de balcons profonds, prolongés en terrasses et surplombs sur les étages inférieurs, parfois surlignés de couleurs primaires. Impressions de porosité, d’imbrication de l’espace public et semi-privé, d’accueil, avec en sourdine une forme d’aménité aux accents démocratiques. Que poursuit, sans rupture, le hall d’entrée vitré double hauteur. Un hall ? Plus que cela, car au-delà des portillons de sécurité d’usage, il se prolonge par un arsenal de rues intérieures, toutes en premier jour, juste séparées des jardins par de grandes vitres claires. Fluidité accentuée non par des artifices, mais par ces solutions qui disent mezzo voce le plaisir profond de concevoir l’architecture, de la nourrir, de la servir en l’enrichissant de détails aussi discrets qu’essentiels. Par exemple, dans des gorges ménagées dans les plafonds, des tubes fluo invisibles tracent des lignes blanches en zigzag comme celles du plan général, dynamisent les parcours, stimulés aussi par les jeux d’obliques des murs, des sols, des étrécissements suivis d’évasements, et encore le calepinage des matériaux.

 

Fiche technique :
Maître d’ouvrage
: Vinci Immobilier
Maître d’ouvrage délégué : Foncières Rimbaud
Maître d’œuvre : Jean-Paul Viguier et Associés, architectes et urbanistes
Maître d’œuvre d’exécution/ BET : SETEC Bâtiment
BET :
BET et HQE : SETEC Bâtiment
BET Façades : EPPAG
Economiste : SLETEC
Acousticien : AVLS
Éclairagiste : Seul Soleil
Fontainerie : Fontaine Développement
Coût des travaux : 300 M€ HT
Surface : 130 000 m2 HON

 

Texte : Jean-François Pousse
Visuels :  © Takuji Shimmura et Jean-Paul Viguier et Associés