EXPÉRIENCE HÔTELIÈRE

RETOUR VERS LE FUTUR
MAISON ALBAR HÔTELS LE VENDÔME, PARIS par ATELIER COS ARCHITECTURE ; ROQUE INTÉRIEURS

La ville durable se rebâtit sur elle-même. Paris n’échappe pas à ce phénomène, bien sûr, notamment pas son hôtellerie dont les acteurs sont toujours à la recherche de sites à fort pouvoir « émotionnel ». Les reconversions constituent l’un des meilleurs outils pour jouer cette carte. La Maison Albar Hotels Le Vendome — à proximité immédiate de l’Opéra Garnier —, conçue par l’ATELIER COS, en est une parfaite illustration.

Sis 7, rue du Helder — entre les Italiens et Haussmann —, le cinq-étoiles écrit une nouvelle page de l’histoire des Grands Boulevards parisiens.

 

Les Grands Boulevards, théâtre du changement urbain

La démolition des anciennes fortifications de Charles V et de Louis XIII, décidée par Louis XIV dès 1670, élargit l’horizon urbain de la cité-capitale. Les cours se substituent progressivement aux promenades plantées avant de se métamorphoser — une fois pavés (1778) — en boulevards où la « vie parisienne » va se forger au fil du temps. Les premiers théâtres viennent alors jalonner ces nouvelles artères où l’Opéra Comique (salle Favart) a ouvert ses portes dès 1783. Marie-Madeleine Guimard — première danseuse à l’Opéra entretenue, entre autres, par le maréchal-prince de Soubise — reçoit le Tout-Paris dans l’hôtel particulier (avec théâtre de 500 places) qu’elle se fait construire en 1772 par Nicolas Ledoux au numéro 9 de la Chaussée-d’Antin. Au numéro 7, peu après, Madame Récamier tient salon dans l’ancien hôtel Necker qu’elle rachète en 1798 avec son époux. Entre-temps, en 1791, un autre hôtel est érigé au numéro 10, sur une parcelle s’étendant jusqu’à la rue du Helder percée en 1775. Dans Le Père Goriot, Honoré de Balzac domicilie dans cette dernière Anastasie de Restaud que fréquente le jeune Rastignac. Un quart de siècle plus tard, c’est Alexandre Dumas qui y loge, à son tour, Albert de Morcerf dans Le Comte de Monte-Cristo.

 

La métamorphose urbaine du quartier va s’accélérer avec les travaux conduits par le baron Haussmann, à commencer par ceux de l’opéra où Charles Garnier va œuvrer jusqu’en 1875. La construction de l’immeuble du 7, rue du Helder démarre en même temps que celle de l’opéra, en 1861, parachevant la parcelle du 10 de la Chaussée-d’Antin, dont l’hôtel a été loué sous l’Empire à un marchand de literie et de tapis qui y a adjoint un bâtiment intermédiaire abritant entrepôt et ateliers. Neuf ans plus tard, l’hôtel du Helder mitoyen (no 9) s’agrandit en annexant les étages, tandis qu’un cabaret-restaurant, Le Lyon d’Or, s’installe à rez-de-chaussée. L’architecte Claude David conçoit alors une nouvelle et spectaculaire façade menuisée en chêne et surmontée de colombages qui est saluée par la presse de l’époque.

« Ce restaurant est unique en son genre et constitue une des merveilles de la capitale de la France. Installé et meublé dans le vrai style de la Renaissance, il jouit parmi les voyageurs de toutes nationalités d’une très grande réputation pour son confort, son luxe grandiose, son exquise cuisine et ses vins renommés. » Journal Le Matin, 1884.

En 1896, la Banque russe pour le commerce extérieur acquiert dans un premier temps le cabaret, puis les immeubles sur rue et sur cour qu’elle restructure lourdement : suppression des colombages, grande verrière qui abrite bientôt la salle des guichets, tandis qu’un bel escalier précédé de vitraux, avec mosaïque et rampe en fer forgé, descend à la salle des coffres du premier sous-sol. La Caisse des congés spectacles y siégera ensuite, jusqu’à la vente en 2016 au groupe hôtelier Paris Inn. (…)

Fiche technique
Surface : 3000 m2 dont 715 m2 créés
Travaux : juillet 2017/février 2020
Maître d’ouvrage : Maison Albar hôtels
Architecte : Didier Beautemps et Valeria Sanchez Rodriguez (ATELIER COS)
Architecte d’intérieur : Fabien Roque
B.E.T : Stebat (structure), Robert Baria (façades), Spie (CVC/PB) et Ingelec (CFO/CFA)
Entreprises : Petit (entreprise générale), Spie (CVC/PB), Wetec (CFO/CFA), Rodrigues (agencement)
Produits : Corian (façades), Wicona (menuiseries extérieures), Koné (ascenseurs), Grohe (sanitaires), Atlas Concorde, Porcelanosa, Italgraniti et Coem (carrelages)

Texte : Lionel Blaise
Photos : Schnepp Renou

Retrouvez l’intégralité de l’Expérience Hôtelière au sein d’Archistorm daté Mai-Juin 2020