Entretien | Céline Beaujolin, la solution hors pair du hors-site
Après avoir dirigé Habitat et Humanisme pendant plus de sept ans, elle a depuis quelques mois pris les rênes de la jeune association Filière Hors-Site. Mue par sa nouvelle mission, Céline Beaujolin fédère autour de la construction hors-site, documente le sujet et contribue ainsi à dessiner la ville de demain.
Comment et pourquoi créer l’Association Filière Hors-Site ?
Neuf organismes ont tout d’abord partagé le constat de la difficulté actuelle de faire émerger des projets de qualité avec une prévisibilité fiable de délais et de budget. À la fois maîtrises d’ouvrage publiques ou parapubliques, ces neuf structures se sont très rapidement rejointes sur l’idée que la construction hors-site pouvait être un moyen de travailler ces objectifs.
La Filière Hors-Site a ainsi vu le jour à la fois pour développer ce mode de construction mais également et surtout pour faire évoluer les pratiques. Nous ne visons par le 100 % de constructions en hors-site. L’enjeu est de parvenir à retrouver de la qualité par une industrialisation amenant à une plus grande prévisibilité, par une recherche sur les matériaux, l’objectif d’une réduction de notre empreinte carbone, etc.
Relever le défi signifiait rechercher une représentativité d’acteurs. L’association est ainsi composée de neuf collèges spécifiques. Il s’agit d’une plateforme d’échanges et de partages pour toutes les parties prenantes de la construction en hors-site. Nous faisons ce pari de l’intelligence collective et disposons d’un rôle de représentation auprès des pouvoirs publics. L’État peut ainsi disposer d’un interlocuteur unique, d’une force de propositions et d’actions.
La construction hors-site constitue un changement d’approche. Filière Hors-Site existe aussi pour accompagner les acteurs dans ce changement. Le procédé constructif remodèle la manière de travailler en induisant une collaboration main dans la main plus en amont entre architectes, industriels, maîtres d’ouvrage, entreprises générales. Le procédé induit une nouvelle répartition des rôles, des responsabilités et des missions.
L’objectif de Filière Hors-Site est de parvenir à ce que le sujet du hors-site soit compris, admis et maîtrisé par le plus grand nombre. Tous les donneurs d’ordre doivent connaître cette solution et s’interroger sur la pertinence de sa mobilisation lorsqu’ils lancent de nouvelles opérations de construction, rénovation ou réhabilitation.
Notre logique consiste aussi à développer des filières territorialisées. Si le modèle industriel actuel peut répondre à la commande et peut fournir davantage, nous souhaitons déployer la force de frappe de l’industrie hors-site dans une logique de maillage local, lié aux matériaux géosourcés.
Nous estimons que le hors-site représente aujourd’hui 5 % du chiffre d’affaires de la construction. Nous souhaitons qu’il atteigne 15 % d’ici quelques années. Cela nous permettra d’accélérer notre capacité à construire, de proposer des produits plus qualitatifs et de rehausser nos exigences collectives, de stimuler des approches et pratiques plus vertueuses.
Quel rôle les architectes détiennent-ils dans cette transformation ?
Je pense que les architectes ont un rôle majeur à jouer dans l’évolution des modèles constructifs. L’équation à résoudre n’est pas facile pour aboutir à des programmes socialement et environnementalement vertueux, qui se tiennent financièrement et qui aient une qualité d’usages dans le temps.
La crise du logement est systémique, il existe un véritable enjeu sociétal à répondre à cette question. Nous arriverons à répondre à ce sujet en revoyant notre manière de construire. En proposant une capacité de produire des bâtiments plus légers, plus rapidement, le hors-site s’invite dans le sujet du « refaire la ville sur la ville ». Le hors-site dispose d’avantages en termes de réversibilité, de transportabilité amenant à une pérennité renforcée. Il s’agit d’une option pertinente pour la surélévation ou encore d’une solution à mobiliser sur le grand sujet de la rénovation énergétique, notamment en milieu occupé.
Quelle figure aimeriez-vous saluer pour son travail, sa démarche architecturale ?
J’aimerais saluer toutes ces agences qui acceptent de se remettre en question pour répondre aux problématiques sociétales. À titre d’exemple, j’applaudis l’approche du programme UNIK, initié par l’Armée en 2021 pour repenser et moderniser le logement militaire en France. Ce projet ambitieux met en œuvre des solutions durables et innovantes hors-site, en s’appuyant sur une équipe d’architectes plutôt jeunes et très motivés, tels que Vincent Lavergne.
— Retrouvez l’article dans Archistorm 130 daté janvier – février 2025
Blockbuster | Architecture et végétaux
Le pressing écologique, depuis vingt ans, pèse lourd sur la conception architecturale. Comment, à la fin, entrer dans l’ère post-carbone du bâtir ? Ne rêvons pas : toutes les normes HQE (« Haute Qualité Environnementale ») et assimilées, tous les chantiers propres, toutes les bonnes intentions « vertes » clamées paume de la main sur le cœur n’y suffiront pas.
S’agissant de réduire l’empreinte carbone, le recours à une architecture faite de végétaux, « à l’archaïque » donc mais actualisée, n’est pas en revanche la pire option. S’il convient bien, en l’espèce, de prendre en compte dans ce choix les parts respectives du consensus (important), de la mode (non moins importante) et de l’efficient (moins convaincant), le fait est : l’appel au « No More Concrete », plus jamais le béton, se soldera à terme par une croissance soutenue de l’architecture végétale.
Non de manière fatale, il est vrai. La rénovation immobilière, plus systématisée aujourd’hui, le réemploi des matériaux, toujours plus usité, l’extension et l’isolation des bâtiments existants, le croît des bâtiments à énergie passive, le frein mis aussi à l’artificialisation (qui continue bon train cependant), n’impliquent pas la péremption des modes conventionnels de construire. Le fait est, cependant : recourir aux végétaux, à commencer par le bois, le bambou, le chaume ou la paille, est à présent dans l’air du temps. Non selon le modèle immémorial légué par le Paléolithique supérieur et le Néolithique, et en cours encore chez certaines populations rétives au progrès, celui de la hutte de branchages ou du palais fait de poutrelles (le tronc comme bois d’œuvre, directement et sans travail du matériau). Le modèle en cours dorénavant, en lieu et place, et âge « 3.0 » oblige, est celui, amplement rénové, de l’architecture végétale de haute technicité.
Construire « naturel », une culture bientôt assise
L’architecture recourant aux végétaux s’inscrit depuis la Préhistoire dans un cycle durable, continu et que jamais n’a périmé le quotient croissant de technologie appliqué à la construction. La modernité, si l’on en doutait, compte ainsi une multitude d’architectes du bois, d’un talent indéniable et aux réalisations crédibles. Alvar Aalto en Finlande, Junzō Sakakura au Japon ou encore Roland Schweitzer en France, parmi tant d’autres, font valoir tout l’intérêt qu’il y a à bâtir « naturel », la construction de type Timber n’étant toutefois pas exempte de récriminations en termes écologiques (traitement chimique des matériaux, recours à des colles polluantes…), aurait-elle a contrario d’indéniables avantages dans certains cas ou lieux : songeons à la résistance du bois aux typhons et aux tremblements de terre, à la facilité qu’il y a à le travailler et à le transporter (sur les fleuves, notamment) ou encore à sa capacité d’absorption de l’humidité. En 1985, Roland Schweitzer livrait à Châlons-en-Champagne le bâtiment tout de bois de la Direction Régionale de l’Agriculture et de la Forêt. Édifice classique par la forme et les proportions, de type néomoderne que celui-ci mais béton-zéro, boisé du sol au plafond et aux murs. Ce chalet géométrisé, à son heure, représenta une véritable réussite en termes matié- riste, spatiaux et de confort, étant bien entendu, grincera-t-on à toutes fins de modérer l’enthousiasme, que le bois ne saurait être le matériau parfait. Ainsi de sa durée de vie, même après traitement autoclave classe 4 (garantie de 10 ans avant pourrissement, pas plus), et de sa dynamique matérielle propre : le mécanisme d’extension-rétraction qui le caractérise, dépendant de la température et de l’hygrométrie, engendre à l’occasion pour l’oreille, le soir et la fraîcheur venus, de fort disgracieux craquements faisant écho au concert des crapauds autour de la mare voisine.
L’âge écologique de l’architecture, consacré avec la fin du XXe siècle sur fond de prise de conscience élargie de la dégradation environnementale, engendre une relation nouvelle au végétal. Cette fois, ce dernier n’est plus seulement envisagé comme gros œuvre, comme matériau de construction mais, toujours plus, comme un compagnon du bâti, comme cette matière sœur qui vient donner de l’air (voulu pur) à la construction. Rappelons l’offre à Hanovre par Thomas Herzog, dans le cadre de l’Exposition 2000, d’un magnifique pavillon de bois au toit très aérien. On se souvient aussi, parce qu’il a fait date, de l’« Immeuble aux bambous » qu’Édouard François plante aux Batignolles, à Paris, au début des années 2000. Ce bâtiment au fond très ordinaire, une tour béton à plateaux comme on en comptera bientôt des dizaines dans ce périmètre en complète restructuration, se voit affublé de pots contenant des bambous sur l’ensemble de ses terrasses et à tous ses étages, de façon périphérique. Le succès est réel, en termes médiatiques du moins : l’« Immeuble aux bambous », à son heure, fut beaucoup « publié » et photographié. Une visite sur site, cela posé, douche l’exaltation. Les bambous, notoirement, font obstacle à la visibilité et à la lumière. Se présentent-ils comme une alternative vertueuse à la mode d’alors, celle des exo-résilles (une enveloppe métallique ou de verre plaquée sur l’enveloppe même du bâtiment, percée comme un gruyère de trous à la géométrie fractale, servant prétendument de brise-soleil mais gâchant en réalité, pour l’usager, la vue sur l’extérieur), l’apport que concrétisent les végétaux reste ici plus anecdotique que sensible. Oxygénation ? Minimale. Mise en forme concrète d’un symbiotisme humain-
végétal ? Pas garanti. Un acte symbolique bienvenu, assurément, mais un décor aussi et surtout. Où retrouver une fois encore, en dépit d’intentions respectables, ce bon vieux Kosmeticos qui s’apparente à l’art du fardage, un vert-à-lèvres pour une architecture aspirant à tout crin mais sans grand moyen efficace à la qualification écologique.
Académie rénovée des Sciences de Californie
Le vrai, contre le rêvé et le factice
Orner les bâtiments de plantes jusqu’à en faire dans certains cas des analogons de la forêt jardinée ou presque ? Il faut en la matière séparer le bon grain de l’ivraie. Le bon grain, c’est Friedensreich Hundertwasser, sa Hundertwasserhaus viennoise (1985) et ses jardins intégrés à son bâtiment, dans le cadre d’une plantation de végétaux murale et de toit (253 arbres…) sinon anarchique, du moins censée devoir être laissée à sa croissance propre, sans intervention humaine (ce qui s’est avéré impossible, dans les faits : verdure invasive et racines destructrices, plus des problèmes d’écoulement des eaux…). L’ivraie, ce sont en contrepartie ces projets de végétalisation à tout crin qui font florès à compter des années 2000 et qui semblent être un passage obligé des concours qui se veulent gagnants.
Pas de toit planté d’herbe, de sauge, de frênes ou d’espèces férales dans votre projet d’hôtel des impôts ? Perdu d’avance ! Prévoyez au moins un mur végétal signé Patrick Blanc, à l’image des flancs sur Seine du Musée parisien du Quai Branly-Jacques Chirac. Si ce n’est guère efficace au titre de la rentabilité écologique, du moins est-ce particulièrement bien vu du Boboland, ce royaume d’écologistes de parole. Cela sans dire un mot des vues sur l’avenir « verdi » que proposent alors nombre d’architectes visionnaires ou expérimentaux, dans l’esprit des rêveries sur les villes végétales d’un Luc Schuiten, théoricien de l’« archiborescence » et créateur de la maison autonome Oréjona (1977), écologiquement vertueuse et en large partie faite de bois. Paris en 2050 reconfiguré par l’esprit libre de Vincent Callebaut, de la sorte, se transfigure en une immense forêt verticale où le solide de la pierre, du fer et du verre vient composer en équilibre avec le tendre des plantes, en un projet à la fois merveilleux et souhaitable, fantasque certes, mais attendu sans délai. L’imagination au pouvoir, soit
– mais le réel ?
Il convient bien, en l’affaire, de faire leur part, respectable celle-là, aux projets ou aux réalisations qui font du végétal l’allié sincère de l’architecture, plus que sa seule caution « verte ». Renzo Piano, avec son Académie rénovée des Sciences de Californie à San Francisco (2008), a droit, à ce registre, à citation, et pour le mieux. La part du végétal, concernant ce bâtiment légitimement primé, est efficiente : « La terrasse de l’immeuble, surface ondulée de 10 000 m2 en hommage aux collines de San Francisco, est couverte d’1,7 million de plantes indigènes (…). Ce « toit vivant » sert à refroidir l’intérieur du bâtiment, il collecte environ 13 millions de litres d’eau par an, en grande partie réutilisés par le musée » (source Wikiarquitectura). On dira également plus qu’un mot, à la même aune, de l’Eden Square conçu pour la ville de Rennes, en 2012, par Christian Hauvette, pour la circonstance le premier ensemble immobilier français (mondial ?) intégré à une serre végétale. Cette réalisation est ainsi sobrement présentée par l’agence de l’architecte français : « 87 logements en accession et serre bioclimatique, place des Neuf-Journaux, ZAC Rives du Blosne, Chantepie (Ille-et-Vilaine). Surface : 7 390 m² SHON ». Eden Square, entre les réalisations toujours inventives de Christian Hauvette, reste, conçue peu de temps avant que la mort ne le frappe brutalement, son authentique chef-d’œuvre. Le programme y consiste à réaliser une petite centaine de logements « bioclimatiques » à énergie positive et empreinte carbone minimale. L’heure est alors, officiellement, au HQE, exigence normative qui nécessite des architectes la plus grande vigilance écologique. Le projet de Christian Hauvette, débordant la norme (trois dérogations ministérielles vont être indispensables pour acter le permis de construire), consiste à installer, sur un plan en carré, un habitat autour d’une serre végétale centrale, grand vide intérieur planté jouant le rôle de poumon vert. « Au centre d’un bâtiment-îlot, aux lignes épurées et graphiques, se cache un doux jardin, lové dans une serre. Une œuvre architecturale à la fois audacieuse et poétique qui relève le défi de l’écoresponsabilité. Une première en France en matière d’habitat collectif ! », clame la promotion, sans exagérer (documentation du Groupe Launay, 2019). Manifeste pour le développement durable, Eden Square offre du vert mais aussi du solaire et des isolations naturelles faisant de ce programme un prototype des habitats Green qui fleurissent aujourd’hui partout.
L’idéal du « tout naturel »
Une architecture cooptant le végétal est, en perfection, une architecture vivante. Comprendre, qui permet au matériau naturel la possibilité de vivre sa vie, hors toute contrainte. C’est évidemment, regrettons-le, moins possible qu’espéré. Si l’on peut laisser les plantes d’un mur ou d’un toit végétalisés pousser à leur rythme, le peut-on du tronc d’un arbre qui servirait de poteau-poutre à une maison ? Construire végétal n’est pas laisser toute sa liberté au végétal, c’est à la fois contraindre celui-ci (gros œuvre) et lui laisser libre cours (aménagement, isolation, drainage des eaux, décoration).
Certains projets, au su de cette double occurrence, utilisent ainsi le
végétal de façon combinée et solidaire, en mode contraint pour la cons- truction même des bâtiments, et en mode libre pour leur environnement. L’un des exemples les plus signifiants est le Green Village de la designeuse Elora Hardy, conçu en Indonésie, à Bali, Mecque de la construction en bambous, avec le périmètre de maisons parfois spectaculaires et d’un haut degré de confort en cette zone tropicale au climat éprouvant. Dans la lignée de ses parents, des écologistes militants qui y ont créé une Green School, Elora Hardy met en place, au début de notre siècle, son projet Ibuku de valorisation de la construction en bambou. Il en émane bientôt le Green Village, ensemble de demeures luxueuses toutes de bambou conçues et construites pouvant se targuer, au registre qualitatif, de cocher les cases de la sobriété, du renouvelable et de l’éco-responsabilité. De façon plus que symbolique, cet habitat strictement « vert » baigne dans un environnement saturé lui aussi de verdure, où le bambou, là encore, règne en maître. Végétal contraint plus végétal libre, dans cet ensemble vertueux, jouent une partition harmonieuse, peu suspecte de prodiguer la pollution, sinon celle-ci, de plus en plus supportable, la pollution chlorophyllienne.
À suivre : Architecture et végétaux 2 – Concrétisations vertueuses
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Histoire de marque | Lodes : apprendre la lumière
Dans la ville de Venise, la marque Lodes s’inspire depuis 1950 des lumières de la cité des Doges pour créer des collections de luminaires où la tradition du verre soufflé à la bouche vient côtoyer l’innovation technologique et le design contemporain. Portrait.
L’innovation dans l’ADN
Lodes, c’est avant tout une histoire de famille. Fondée en 1950, la marque trouve dès le départ son identité dans la création de luminaires dédiés aux espaces intérieurs mais aussi à l’extérieur. Une passion pour le travail de cet élément qui transparaît dès le départ par un amour profond pour l’artisanat. « Nous avons étudié la lumière, conçu pour la lumière et avec la lumière toutes ces décennies. Nous pouvons dire que nous apprenons de la lumière, et je vous assure que la lumière a toujours beaucoup à nous apprendre. Notre héritage familial est profondément lié à notre territoire qui est Venise, les étincelantes tesselles des mosaïques, les reflets de la lagune, les places des villes vénitiennes, grouillantes de marchands et d’énergie. En 2020, nous avons célébré notre 70e anniversaire en devenant Lodes » déclare Massimiliano Tosetto, directeur général de Lodes.
Depuis 74 ans, Lodes s’ancre dans quatre valeurs principales : le travail du maître-artisan, la recherche, les relations humaines et l’italianité. Le point de départ, l’artisanat, trouve sa force dans la pluralité de la maison Lodes et celle des talents de ses artisans. Au cœur de leur savoir-faire, le travail du métal et du verre qui, unis, mais aussi indépendamment, vient donner vie aux luminaires décoratifs faisant l’objet d’un important travail de recherche. « L’histoire de notre société est un voyage en famille fait d’évolution continue et d’apprentissage rapide. C’est ce que nous appelons la Recherche, notre curiosité insatiable d’apprendre de nouvelles techniques et de nous renouveler constamment. L’atelier de Lodes est le point de rencontre du savoir-faire technique et des nouvelles perspectives conceptuelles, où les idées créatives des designers prennent forme et où les croquis élaborés se transforment en nouvelles histoires de produits » confient les équipes de Lodes.
Des collections universelles, solutions personnalisées
La versatilité, la modularité et le caractère décoratif sont les trois pierres angulaires des solutions lumineuses proposées par Lodes. Des lignes directrices qui ont permis à des collections majeures dans l’histoire de Lodes de voir le jour. Lodes permet de créer des solutions fonctionnelles et décoratives infinies pour une plus grande personnalisation grâce à l’union entre lampes et patères. La grande liberté provenant de ces combinaisons donne vie au concept de Standard Bespoke : une collection au caractère universel, pouvant répondre aux besoins spécifiques de chaque espace grâce à la possibilité de configurer des compositions uniques et significatives infinies. Parmi celles-ci, la collection Oblò qui vient s’inscrire dans l’héritage de la maison italienne et de son amour pour le travail du verre. Imaginée par Paola Navone, elle s’inspire des fonds marins et se décline dans des formes organiques reprenant une gamme chromatique bleutée. La collection
Random Stick est l’opposé diamétral de cette dernière. Si le verre métallisé est là encore matière principale, il s’associe au métal pour un objet beaucoup plus géométrique jouant entre la ligne et le trait, dessiné par Chia-Ying Lee. Métal et verre soufflé entrent également en dialogue à travers la lampe à pied Volum. La tige métallique élancée accueille à son sommet une sphère de verre reprenant sa couleur blanche. Enfin, la collection
Tidal se décline désormais dans de nouvelles dimensions, venant adapter son design à des espaces de tailles plus conséquentes. Synthèse des valeurs de Lodes, le plafonnier rassemble en un seul objet le caractère contemporain et la recherche constante menée par la marque, l’associant également à une identité résolument ancrée dans une italianité revendiquée par un design intemporel. Un apprentissage constant de la lumière, selon Lodes.
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Hospitality | Un camp de vacances pour geeks… vraiment trop fort !
Après onze ans d’inoccupation, le fort des Saumonards sur l’île d’Oléron renaît sous forme de camp(us) de vacances pour les 21 000 élèves des 54 écoles du réseau 42 formant gratuitement à la programmation numérique.
Début 2019, le milliardaire et philanthrope français Xavier Niel emporte l’appel à candidatures du ministère de la Défense en vue de la cession – sur projet – de l’ancien fort napoléonien. Il a été transformé avec frugalité en citadelle du code par l’architecte Adrien Raoul – déjà à la manœuvre de l’École 42 et de son hébergement NOC 42 à Paris – et les paysagistes de MUGO.
Points forts
En 1808, Napoléon Ier décide de cadenasser l’accès au pertuis d’Antioche, bras de mer stratégique séparant l’île d’Oléron du continent à la hauteur du chenal d’accès à l’arsenal de Rochefort. Pour ce faire, ses ingénieurs érigent à proximité de la superbe plage oléronaise des Saumonards deux forts –
Panorama, à la pointe de la Perrotine, et Napoléon (ou de la Galissonnière), dans la forêt des Saumonards – à quelques milles de leurs voisins Boyard, Liédot (île d’Aix) et Enet existants.
Précédée d’un fossé faisant douve, l’épaisse enceinte du second culminant à près de 7 m s’adosse à un monumental talus (protégeant les guérites enterrées de dépôts de munitions) côté mer et à des bâtiments sur les trois autres. Leur unique portail d’entrée est protégé par une « tour modèle », point de retrait fortifié totalement autonome. Ses travaux s’achèvent en 1818. Trois ans plus tôt, la fuite en Amérique de l’empereur déchu depuis… le pertuis d’Antioche y est stoppée par le blocus naval des Anglais l’obligeant à se livrer à eux sur l’île d’Aix avant son exil à Sainte-Hélène !
Compte tenu des progrès fulgurants en matière d’artillerie, le fort des Saumonards ne connaîtra jamais le feu. Y sont incarcérés cinq cents fédérés en 1871, puis des prisonniers allemands lors de la Grande Guerre. Alors qu’il est occupé par ces derniers lors de la suivante, les seules traces d’obus de mortier dans sa muraille datent de sa libération en 1945. Il se transforme peu après en colonie de vacances pour les enfants des personnels militaires et civils des armées. Après une vingtaine d’années d’inactivité, l’État subordonne sa vente au maintien d’une activité similaire. Ses 25 000 m2 faisant partie d’un site Natura 2000, aucun mètre carré supplémentaire ne pourra y être construit ou reconstruit. Le projet lauréat conserve donc les 2 400 m2 de planchers initiaux.
Forty2
Initié par Xavier Niel, Réseau 42 est une communauté d’écoles d’informatique gratuite implantée, à ce jour, sur les cinq continents en milieux hyper urbanisés. Pédagogiquement atypiques, l’apprentissage et la pratique du code – et autres connaissances similaires – réclament aux étudiants une intensité de concentration sur un très long terme, jusqu’à une quasi-déconnexion de leur propre corps. D’où l’idée de proposer, dans un décor idyllique et à un prix des plus compétitifs, à 210 d’entre eux, un séjour (de quatre jours à deux semaines) dans un espace de détente et de communion spécialement conçu pour des geeks.
Convaincu depuis la création de son agence que « la matière première de l’architecture, c’est l’humain – avec qui et pour qui l’on construit », Adrien Raoul se passionne pour une optimisation architecturale des usages. Rien d’étonnant alors à ce qu’il conçoive la première école 42 de Xavier Niel et oncoure à ses côtés dans le cadre de Réinventer Paris pour imaginer Noc 42 (Not Only a Campus) où former et héberger les élèves. En toute logique, il poursuit ici l’aventure avec… Forty2 !
Conscient que le monument constituait « un bout de patrimoine » dont il convenait de conserver l’intégrité, le concepteur en débuta l’audit complet (territorial, patrimonial, environnemental, culturel et social) par une première visite des lieux en compagnie de l’architecte des Bâtiments de France et de l’inspectrice des Sites. Il ne s’agissait pas de tout refaire à neuf mais de régler l’ensemble des problèmes afin de le rendre à nouveau exploitable comme camp de vacances d’un nouveau genre. Seules les pierres endommagées des façades dûment nettoyées ont ainsi été remplacées, les enduits ciment étanches déposés au profit d’un enduit chaux-chanvre tout à la fois respirant et isolant, les sols désimperméabilisés. Les toitures s’étant substituées à l’ancien chemin de ronde ont été désamiantées et recouvertes de bacs acier, leurs combles désensablés et recharpentés. Les menuiseries PVC ont cédé la place à des châssis bois peints en gris foncé. Les frontons des vastes salles voûtées juxtaposées constituant les trois ailes périmétriques habitées ont vu leur modénature redessinée quand nécessaire et un joint creux souligner leur arche tout en dissimulant la ventilation des volumes intérieurs. La partie au sud de la tour a été affectée aux espaces de travail, aux salles de jeux et guérites de lecture, à l’administration et au logement du gardien. Précédé par une scène investissant l’une des arches de la tour, le secteur nord abrite l’hébergement des étudiants (sept dortoirs de trente capsules-cabanes superposées dont deux PMR) et du staff (sept personnes), les sanitaires et la restauration en self-service avec réfectoire et agora extérieure ombragée. Mettant à profit les arbres et végétaux préexistants, tout le reste du site a été aménagé par les paysagistes de MUGO : un bac à sable géant accueille un terrain de volley-ball, des allées sillonnent les contreforts du talus où des filets suspendus offrent un solarium respectueux du fragile biotope (également protégé par des ganivelles en lattes de sapin) ; le potager implanté au sud qui alimente les cuisines est entretenu par l’entreprise gérant les espaces verts.
Au centre du site, juste à proximité de la tour, l’incongru bâtiment en béton aux allures de pavillon de banlieue construit dans les sixties pour héberger l’infirmerie s’est vu sublimé en un objet qui – à l’image de la pyramide du Louvre – contraste tout en renvoyant au passé grâce à sa peau en métal dépoli (ALUCOBOND® ). Au carrefour des autres bâtiments et entièrement ré-agencé, il s’impose dorénavant comme le lieu commun par excellence où tous les « colons » pourront se rassembler.
Avec ses 210 postes de travail en ordre de bataille, il est fort probable que Forty2 devienne une « address code » incontournable !
Fiche technique :
Maîtrise d’ouvrage : NJJ FDS Maîtrise d’œuvre : AR studio d’architectures Paysagiste : MUGO BET : CD Conseil (fluides), ECO+Construire (économiste) Surface : 25 000 m2 (parcelle), 2 400 m2 (HSP)
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Focus | Nouveau siège du groupe Figaro Croquis des bureaux, Paris — AMI conseil et Sabourin Costes
Le nouveau siège du groupe Figaro, au 23-25 rue de Provence, s’élève au cœur du quartier historique de la presse à Paris. Ce projet architectural, réalisé par l’agence Engelmann Architectes en 2022, réunit deux bâtiments construits entre 1914 et 1930, couvrant une surface de 9 998 m² sur huit étages et trois sous-sols. Leur union se matérialise autour d’un patio arboré, créant un cadre de travail à la fois lumineux et ouvert.
Les demi-paliers présents à chaque étage, vestiges de la séparation initiale des deux immeubles, ont influencé l’organisation du bâtiment. Ce détail a orienté le zoning, avec une répartition des équipes et des services par demi-niveaux, favorisant la fluidité des circulations internes. L’open space, conçu en flex office, garantit une souplesse nécessaire à l’organisation du groupe Figaro, tout en optimisant les espaces.
L’aménagement intérieur a été confié à Sabourin Costes, studio de design et d’architecture d’intérieur fondé par Zoé Costes et Paola Sabourin. Leur intervention met l’accent sur la transparence, la lumière naturelle et l’ouverture. Les cloisons vitrées des salles de réunion et des bureaux individuels favorisent la traversée de la lumière, tandis que des voilages colorés et des vitrages dépolis ajoutent une touche de douceur.
Le choix des matériaux reflète l’engagement du studio en faveur de la durabilité. Sabourin Costes a combiné des pièces de mobilier réutilisées avec des créations sur mesure et des œuvres de designers indépendants. Par exemple, la table historique du Figaro Magazine cohabite avec des chaises contemporaines dans un environnement où l’esthétique et la fonctionnalité sont en harmonie. Le studio a également conçu une collection de mobilier de rangement modulaire, en métal laqué et bois, adaptant ces pièces aux différentes typologies d’espaces.
Le bois occupe une place centrale dans l’aménagement. Dans le hall, des meubles à tiroirs, créés sur mesure pour accueillir les archives graphiques du groupe, soulignent cette matière
omniprésente. Les tables de réunion en chêne, frêne et hêtre massifs, réalisées par le studio Formel à Paris, illustrent l’attention portée à l’artisanat local et à la pérennité des matériaux.
L’approche sensible de Sabourin Costes inclut des matériaux comme le feutre acoustique moulé, des moquettes françaises lumineuses et des tissus colorés. Le studio a également réalisé l’enseigne extérieure, un logo texturé en laiton massif, conçu en collaboration avec le studio Ward Goes, qui signe la signalétique du bâtiment.
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Focus | Maison de la Fédération Française de Canoë-Kayak et Sports de Pagaie Coupe longitudinale, Vaires-sur-Marne — Le Studio Sanna Baldé
Le siège de la Fédération Française de Canoë-Kayak et des Sports de Pagaie (FFCK), implanté à Vaires-sur-Marne sur le plus grand stade d’eau vive d’Europe, incarne à la fois le rayonnement international de la fédération et son engagement envers ses membres. Conçu pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, ce bâtiment est bien plus qu’un simple siège : c’est une « maison » ouverte, pensée pour accueillir les athlètes, le public et les collaborateurs de la FFCK, avant de devenir un équipement pérenne pour la ville de Vaires-sur-Marne.
L’architecture du projet, imaginée comme un espace de rassemblement chaleureux et inclusif, repose sur des choix constructifs durables. Le bâtiment associe le bois et le béton, avec une structure et des façades en bois, choisies pour leur faible impact environnemental et leur dura-
bilité. Le bois, omniprésent, confère au siège un caractère naturel et harmonieux qui s’intègre parfaitement dans son environnement, tout en reflétant les valeurs de durabilité et de respect de la nature, essentielles aux sports de pagaie.
Le projet inclut également un toit végétalisé et un patio intérieur, créant des espaces de respiration et de verdure au cœur de l’édifice. Le toit, en plus de renforcer l’intégration paysagère, offre une terrasse avec des vues panoramiques sur le lac et le stade d’eau vive, où les activités nautiques se déroulent toute l’année. Le jardin sur le toit, ainsi que le patio végétalisé, participent à la gestion écologique du site et favorisent une meilleure isolation thermique, renforçant ainsi l’approche durable du projet.
La conception du siège vise à fluidifier la relation entre l’intérieur et l’extérieur. L’entrée principale s’effectue sous un bâtiment légèrement surélevé, avant la traversée d’un un patio central pour accéder à un rez-de-chaussée largement transparent, qui permet une continuité visuelle avec le jardin. Cette fluidité des espaces intérieurs et extérieurs reflète l’ouverture de la fédération envers ses membres et le public. Le bâtiment
est pensé pour accueillir divers événements en fonction des conditions climatiques, avec des zones abritées et d’autres en plein air.
En tant que siège institutionnel, la Maison de la FFCK symbolise la solennité et la solidité de la fédération, tout en intégrant des éléments modernes et durables. L’accent mis sur l’efficacité énergétique, notamment avec l’utilisation de la géothermie, et la valorisation des maté-
riaux biosourcés montrent la volonté de la fédération de concilier performance et respect de l’environnement.
Ainsi, cette Maison de la FFCK incarne un lieu vivant, à la fois enraciné dans son territoire et tourné vers l’avenir, promouvant le canoë-kayak aux échelles nationale et internationale. Elle répond aux enjeux actuels de développement durable tout en offrant un cadre propice aux échanges, à l’entraînement des athlètes et aux événements publics, faisant de cet édifice un symbole fort pour la fédération et ses membres.