Réalisation | ESAT des Lozaits-Seguin, Villejuif — DREAM
Au cœur de Villejuif, au sud de Paris, l’Établissement et Service d’Aide par le Travail (ESAT) des Lozaits-Seguin, conçu par l’agence d’architecture DREAM, incarne une approche novatrice de l’architecture au service d’un projet social ambitieux. Dans un quartier populaire où le béton domine encore, le bâtiment tout en bois se dresse fièrement, témoin d’une vision engagée pour réinventer la construction neuve avec un matériau performant et écoresponsable aux bienfaits psychiques pour les usagers.
Sur un vaste terrain arboré bordé de grandes barres d’immeubles vieillissantes, un bâtiment blanc d’un seul niveau semblait légèrement délaissé. Il s’agit de l’ancien Établissement et Service d’Aide par le Travail (ESAT) du quartier des Lozaits, à Villejuif, dans le Val-de-Marne. Petit et obsolète, il avait besoin de plus d’espaces pour les personnes en situation de handicap, mais aussi et surtout de pouvoir proposer une architecture de qualité afin de favoriser le bien-être au travail. Dans le cadre d’une opération de nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) porté par l’établissement public territorial (EPT) Grand-Orly Seine Bièvre et la ville de Villejuif, le bailleur social Batigère a missionné l’agence d’architecture DREAM pour concevoir un nouvel ESAT sur la même parcelle, en lieu et place de l’ancien. Il participe ainsi à la recomposition urbaine de la partie nord du secteur des Lozaits, un quartier prioritaire de politique de la ville car comptant 2 600 habitants majoritairement précaires dont un tiers âgés de moins de 20 ans, et un important taux de chômage. Pour la municipalité, il s’agit d’une opération sociale indispensable dont l’association Apogei 94 qui gère le nouvel ESAT des Lozaits-Seguin, est partie prenante : « Elle assure un accompagnement de chaque personne en situation de handicap tout au long de son parcours de vie en développant son autonomie, son inclusion et en consolidant sa place de citoyen. »
Et au milieu du béton, un peu de bois
Implanté au sein d’un parc composé d’essences locales dont les arbres centenaires conservés rythment le paysage, le bâtiment neuf s’inscrit dans le tissu urbain de Villejuif avec une présence à la fois affirmée et respectueuse de son environnement. Pour Dimitri Roussel, architecte fondateur de l’agence DREAM, le bois était une évidence. « L’utilisation du bois en structure et en vêture, qui plus est au cœur d’un nouveau parc, augmente l’acceptabilité de cette nouvelle construction au sein du quartier des Lozaits », défend-il. Une subtile façon d’intégrer la nouvelle construction dans un environnement urbain dominé par le béton. C’est un engagement de l’agence qui possède une riche expérience en matière de construction biosourcée avec déjà une dizaine d’ouvrages en structure bois à son actif (premiers bâtiments de bureaux labellisés bas carbone à Bordeaux en 2018, campus « Arboretum » à Nanterre, bureaux et équipement sportif au sein du Village des athlètes de Paris 2024), chacun apportant de précieux retours d’expérience. « Notre vision de l’architecture est profondément ancrée dans les valeurs sociales et écologiques. Le bois, notre matériau de prédilection, incarne notre quête d’une ville plus responsable, durable et saine », explique Dimitri Roussel.
L’ESAT des Lozaits-Seguin ne déroge pas à la règle, il est remarquable par son engagement environnemental. La façade bardée de pin douglas autoclave pour résister aux intempéries et imprégnation grise pour anticiper le gisement naturel du matériau, véritable signature architecturale du projet, joue un rôle crucial dans l’identité visuelle de l’ESAT. La toiture en sheds, dont le faîtage culmine à 9 mètres de haut, participe à la performance énergétique et le confort visuel. Ces toitures en dents de scie, orientées au nord, permettent un éclairage naturel optimal des ateliers tout en limitant les apports solaires directs en été. Sa structure formée d’une charpente bois, de contreventements métalliques, de tasseaux en bois et de Danpalite (panneaux en polycarbonate transparent), reste entièrement visible dans l’ensemble du projet. D’une surface totale de 3 570 m², le bâtiment regroupe quatre ateliers de production, une salle complémentaire, un réfectoire avec sa cuisine, des vestiaires, des bureaux pour le personnel d’encadrement, des espaces logistiques (stockage et cour technique). Le tout offre un cadre de travail adapté à 150 travailleuses et travailleurs en situation de handicap, issus d’un regroupement des établissements du Kremlin-Bicêtre et de Villejuif.
Quand l’épanouissement professionnel devient vecteur d’architecture
L’agence DREAM, reconnue pour son approche sensible et fonctionnelle de l’architecture, a concilié les exigences d’un espace de travail performant avec les besoins spécifiques des usagers. Pour répondre aux besoins de ce public sensible, la conception architecturale de l’ESAT s’est centrée sur l’ergonomie des espaces afin de favoriser le bien-être psychique. Cela s’est traduit par une organisation des ateliers sans couloirs, mettant l’accent sur l’apport de lumière naturelle et la transparence, avec un choix maximal de bois apparent. Les ateliers sont des lieux polyvalents et évolutifs au gré des besoins, bénéficiant de hauteurs sous plafond pouvant aller jusqu’à
5 mètres. Dans tous les espaces intérieurs, les revêtements en fibre de bois participent à créer une ambiance apaisante et confortable. Ce matériau biosourcé possède d’excellentes propriétés thermiques et acoustiques, contribuant ainsi au bien-être des occupants. Ainsi, les plafonds et les cloisons régulent naturellement l’humidité de l’air et absorbent les bruits, créant une atmosphère propice à la concentration et au travail. Car il était primordial pour les architectes de porter « une attention particulière à l’acoustique dont l’impact psychosomatique est souvent sous-estimé » et pourtant primordiale pour le bien-être des usagers.
Par ailleurs, l’agence DREAM a fondé l’association Rêve avec la volonté de créer du dialogue entre l’architecture et d’autres disciplines artistiques, et a profité de ce projet pour accueillir en 2023 Alassan Diawara en résidence artistique, en association avec les Ateliers Médicis, autour d’un travail de recherche et de création auprès des travailleuses et travailleurs de l’ESAT. L’artiste a réalisé une série de portraits des résidents dont certains sont exposés dans le hall d’entrée de l’établissement. Une belle façon de mettre en avant ces professionnels investis aussi bien dans les espaces verts de Villejuif, le conditionnement de produits de luxe, que la création d’objets du quotidien.
En privilégiant le bois, l’apport de lumière naturelle et une organisation spatiale fluide et généreuse, l’agence DREAM fait de l’ESAT Lozaits-Seguin à Villejuif un cadre de travail épanouissant pour les travailleuses et travailleurs en situation de handicap, contribuant ainsi à leur inclusion et à leur bien-être au quotidien.
Entretien avec Dimitri Roussel, fondateur de l’agence DREAM (Dimitri Roussel Ensemble Architecture Métropole)
Comment avez-vous appréhendé les personnes en situation de handicap qui fréquentent l’ESAT au sein de votre conception architecturale ?
Nous avons souhaité créer des espaces qui tiennent compte de la fragilité psychotique des utilisateurs. Nous nous sommes réellement interrogés sur la manière d’organiser l’environnement pour favoriser le bien-être de ce public sensible : intégrer le parking sous une grande toiture ventilée, supprimer les couloirs en créant une grande passerelle, utiliser du bois apparent et privilégier la transparence. Ces pas de côté vis-à-vis du programme ont beaucoup plu à l’utilisateur.
Ce projet est-il atypique pour l’agence DREAM et à quels niveaux ?
Ce projet est atypique pour DREAM car c’est le premier que l’agence a réalisé après sa création en 2018. Il s’agit d’une commande publique. En tant que fils de psychiatre, la question de la santé mentale a une résonance particulière dans mon approche de la conception de l’espace. Nous avons travaillé main dans la main avec le personnel de l’ESAT, et nous avons même financé une résidence artistique avec les Ateliers Médicis qui a participé à une meilleure appropriation de ce nouveau lieu par les travailleurs handicapés.
Quel a été, pour vous, le plus grand défi de ce projet ?
Démontrer que le bois était le matériau le plus adapté, tant pour ses bienfaits sur la santé dans le cadre d’un ouvrage médico-social que pour répondre aux défis de la construction dans les quartiers populaires. Le bailleur n’ayant jamais réalisé de construction en bois auparavant, il a fallu le rassurer et le convaincre de ses avantages.
Comment avez-vous abordé le choix des matériaux en tenant compte de l’intégration urbaine, des contraintes structurelles et de l’environnement ?
L’utilisation du bois fait sens pour réinventer la construction neuve dans les quartiers populaires où les stigmates du béton sont terribles. C’est le matériau le plus performant en termes de stockage carbone. C’est le levier le plus efficace pour faire entrer la ville de demain dans une démarche post-carbone. Les essences utilisées sont principalement le douglas en extérieur pour les bois exposés et de l’épicéa à l’intérieur. La structure en bois laissée complètement apparente à l’intérieur fait office de matériaux de finition.
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Salon | Osez, avec EquipHotel
Le salon professionnel sera de retour du 3 au 7 novembre 2024, à Paris Expo – Porte de Versailles. Une édition placée sous le signe de l’audace et de l’esprit d’équipe, regroupant ainsi 1 200 exposants variés.
« Cette année, EquipHotel encourage l’audace collective, annonce avec enthousiasme Béatrice Gravier, directrice du salon EquipHotel, qui investira le parc des expos de la Porte de Versailles, du 3 au 7 novembre 2024. Un parti pris qui fait écho à la dynamique olympique de Paris et à la bonne santé du secteur des hospitalités. » En effet, il semblerait que « l’hôtellerie retrouve des couleurs avec des records de chiffre d’affaires » (+ 10 % en France, en 2023, ndlr). La restauration l’accompagne, affichant elle aussi, des chiffres d’affaires en hausse, notamment grâce au snacking. EquipHotel a donc choisi de mettre au devant de la scène ceux qui incarnent le mot hospitalités – avec un « s » – grâce à leurs façons diverses de recevoir. Un « s » qui « incarne aussi l’esprit d’équipe, la fédération des compétences », ou encore « la pluralité des profils », ajoute la directrice. Pour cette édition audacieuse, le salon sort le grand jeu : durant 5 jours, ce sont 1 200 exposants français et étrangers, ainsi qu’une pléiade d’experts « qui répondront de façon concrète et précise aux attentes de l’hôtellerie et de la restauration », nous assure-t-on dans le communiqué. Et au programme : quatre univers (Foodservice, Design, Wellness et Tech & Service), une douzaine d’espaces expérientiels et une centaine de conférences « pour guider, conseiller, partager et échanger ».
Le mot d’ordre de cette édition est clair : Osons ! , peut-on lire en lettres capitales sur le site internet d’EquipHotel. C’est donc autrement que l’architecte Marie Deroudilhe ose recevoir, en transformant le hall d’accueil d’EquipHotel Paris 2024 en lobby et suite d’hôtel. « Ce nouvel espace expérientiel permet de recevoir les visiteurs au troisième niveau du pavillon 7 du salon, comme s’ils entraient dans un hôtel », nous précise-t-on. Dans un espace de 150 m2 qu’elle a souhaité immersif et déconnecté, Marie Deroudilhe propose une mise en scène théâtrale qui s’articule autour d’un chapiteau et d’un duo d’alcôves – l’une inspirée par le bien-être, l’autre par la détente – de laquelle émanent « réconfort et étonnement », espère l’architecte. Le salon a quant à lui osé solliciter un artiste, afin d’imaginer le restaurant éphémère de 200 m2 et 95 couverts : le Cannois Franck Lebraly. Ce dernier a dessiné pour l’occasion une fresque monumentale aux nuances ocre et terracotta. Les motifs choisis, hommage au Sud de la France, se déclinent en tissus, papiers peints et moquettes grâce à des partenariats avec les maisons Ege Carpets et Delius. Quant au mobilier (Delavelle), un bois 100 % français a été privilégié pour réaliser tables et assises. « Les hôtels, les bars, les restaurants sont des espaces qui me sont familiers », confie l’artiste. Et en cuisine, que se passe-t-il ? C’est une pluralité de cordons-bleusqui s’empareront des fourneaux du Lounge des Chefs – dont Gault&Millau est l’invité –, durant toute la durée du salon.
À chaque jour sa nouvelle pointure qui servira une centaine de repas. L’objectif : surprendre les visiteurs, mais aussi mettre en avant des talents, tels que Jean-Baptiste Ascione, François-Xavier Sailly, Florian Descours, Josselin Marie et Maximilien Kuzniar.
Et pourquoi pas oser la nouveauté ? « Pour la première fois, le salon EquipHotel se dote d’un espace pensé tel un mini musée », dont l’exposition s’intitule « Confidences pour confidences ». Le principe : donner carte blanche à quatre talents pour mettre en scène quatre assises dans quatre univers de 30 m2 chacun. Jardin d’hiver, dressing, salon de conversation, spa… C’est avec joie que la designer Fanny Perrier, l’architecte Marco Lavit, l’architecte d’intérieur Oscar Ono ou encore le duo d’architectes d’intérieurs Marthe Simon & Paul Peller se sont prêtés au jeu. Et pour celles et ceux qui souhaiteraient faire une pause, l’espace « wellness » – conçu telle une bulle transparente – les attend sur près de 7 500 m2. Sur place, seront présentés les produits de soins du spa, les équipements de fitness, le linge, les uniformes, les accessoires et produits d’accueil, les literies dernier cri et autres solutions premium, garantissant aux visiteurs une déconnexion, loin du stress des grandes villes. Pour se ressourcer, rendez-vous donc au pavillon 7.2 du salon, où EquipHotel Paris 2024 inaugurera par ailleurs un nouvel espace « Insolite », dédié à une hospitalité on ne peut plus originale. À l’image de la chambre d’hôtel LumiPod, pensée et réalisée par Lumicene, prête à prendre racine en pleine nature. Et ce, en 48 heures seulement.
La passerelle de l’île Girodet à Bourg-lès-Valence, conçue par Ney & Partners, est un élément central du projet de réaménagement des berges du Rhône. Ce projet, ambitieux et visionnaire, vise à revitaliser et à rendre plus accessible cette zone de la ville. La passerelle franchit l’autoroute A7, offrant un accès facile et convivial à l’île Girodet pour tous les usagers, qu’ils soient piétons ou cyclistes.
Conception et design
La passerelle de l’île Girodet est une passerelle haubanée, caractérisée par un mât unique de 23 mètres de haut qui sert à la fois de support structurel et de repère visuel pour la ville. Cette conception asymétrique et élégante en fait un point de repère incontournable. La forme fluide et courbée de la passerelle offre aux utilisateurs des points de vue variés et captivants, enrichissant l’expérience de la traversée.
L’aménagement de l’esplanade du théâtre et du parc des berges du Rhône a été confié à
Michel Desvignes Paysagiste avec la collaboration d’Éric-Pierre Ménard, également paysagiste, le bureau de VRD et d’infrastructure Oteis, et l’éclairagiste Scène Publique. Cette équipe pluridisciplinaire a travaillé en synergie pour créer un espace harmonieux et fonctionnel, intégrant parfaitement la passerelle dans son environnement.
Structure et technique
La passerelle est un ouvrage intégral, signifiant qu’elle est rigide et liée directement à ses fondations, sans appareils d’appui. Cette conception innovante permet une meilleure intégration visuelle et structurelle dans le paysage urbain. Le mât central articulé et la structure haubanée asymétrique confèrent à la passerelle une identité unique, tout en assurant sa stabilité et sa durabilité.
Le tracé en plan, tout en courbes, est spécialement conçu pour répondre aux contraintes topographiques et spatiales du quai Barjon, du côté ville. Cela a nécessité le développement d’une longueur suffisante pour intégrer des rampes d’accès accessibles à tous. Cette approche garantit que la passerelle est non seulement un élément esthétique, mais aussi pratique et inclusif.
Impact et importance
La spatialité de la passerelle, combinée à son dessin distinctif, est ce qui définit son identité. La hauteur et la forme du mât en font un symbole visuel fort pour Bourg-lès-Valence, tandis que les autres éléments structurels, comme le platelage, les garde-corps et les culées, restent simples et discrets, mettant en valeur les deux éléments principaux.
Cette passerelle n’est pas seulement un ouvrage de génie civil, mais un véritable atout pour la ville. Elle crée une connexion vitale entre la ville et l’île Girodet, encourageant les déplacements doux et offrant un nouveau point de vue sur le Rhône. L’intégration des rampes d’accès montre une volonté de rendre l’espace accessible à tous, renforçant le caractère inclusif du projet.
Fiche technique :
Maîtrise d’ouvrage : Ville de Bourg-lès-Valence Maîtrise d’œuvre : Ney & Partners (architecte et ingénieur OA – conception – mandataire), Michel Devignes Paysagiste (paysagiste), Oteis (ingénieur OA – phase travaux et VRD) et Scène Publique (éclairage et mise en lumière) Surface : 214 m de longueur Budget : 5,54 M€ HT Programme : Passerelle piétonnière et vélo
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Création | La chambre de demain
L’Ameublement français et la chaîne hôtelière OKKO HOTELS s’unissent pour expérimenter la co-conception. L’objectif : promouvoir de nouveaux concepts de chambre, au design plus durable.
« Comment tendre vers un design hôtelier durable ? » : c’est à cette question que l’Ameublement français a souhaité répondre, ayant imaginé une méthode de co-conception, mise au point avec le cabinet Holdon qui, depuis 2022 (date à laquelle il a été fondé, ndlr), conseille, accompagne et coordonne des projets d’aménagement intérieur, en particulier dans le secteur de l’hospitalité. Pour ce faire, une solution prévaut : celle de faire travailler ensemble, dès la genèse d’un projet, tous les membres de la chaîne de valeur impliqués. À savoir : hôtelier, exploitant, architecte d’intérieur, assistant à maîtrise d’ouvrage, fabricants… Le tout dans une logique d’écoconception et d’un « fabriqué en France » à la fois compétitif, responsable et durable. « La co-conception, c’est trouver des solutions tous ensemble pour préserver la qualité, l’esthétique et le budget d’un projet, explique Martin Bretécher, fondateur du cabinet Holdon. Mais c’est aussi avoir de l’empathie pour le métier de son interlocuteur. C’est-à-dire être à l’écoute et comprendre ses valeurs ajoutées comme ses interrogations ou ses moments de doute. » Cette nouvelle méthode a donné naissance à un partenariat entre l’Ameublement français et la chaîne hôtelière OKKO HOTELS, qui a fait de sa priorité la réconciliation du monde hôtelier avec son environnement écologique et social. « Lorsque l’on vient nous voir, […] avec un projet original, nous disons rarement non, confie avec enthousiasme Solenne Ojea-Devys, directrice générale du groupe. Car depuis [notre] création, en 2014, nous cultivons le « faire différemment ». Alors quand l’Ameublement français nous a parlé de co-conception, sobriété écologique et design écoconçu, nous avons répondu oui, tout de suite. »
Ne dit-on pas : « il n’y a pas d’œuvre d’art sans collaboration » ? Une formule qui, dans le cas présent, convient parfaitement ; l’union entre l’Ameublement français et OKKO HOTELS donnant lieu à de nouveaux concepts de chambre. Pour ce qui est de la réalisation, deux agences d’architecture d’intérieur ont accepté d’inaugurer la méthode de co-conception : Erōz – fondée par Emélie Rōz, qui fait de l’hôtellerie de luxe son terrain de jeu principal – et Laune Architecture – composée du duo Laure Grabulos et Pauline Marcyniuk. « Deux références en pleine ascension dans le secteur du contract », peut-on lire dans le communiqué. Pour chacune des deux agences, c’est le même terrain de jeu. À savoir : un rectangle de 18 m2. Du côté de Laune Architecture, on s’est inspiré du logo du groupe OKKO HOTELS, proposant ainsi des formes tout en rondeur. L’agencement en noyer côtoie des tonalités ocre, beiges et brunes, une console-bureau, un pouf en tissu recyclé, une suspension en mycélium ou encore de l’inox brossé pour les patères, les poignées de portes et les liseuses pour « apporter un peu de brillance », précise Pauline Marcyniuk. Une chambre où le made in France domine, à quelques exceptions près : « Tout ce qui concerne l’électricité est fabriqué hors de France et la faïence vient d’Italie », admet le duo. Qu’en est-il d’Émilie Rōz ? Le projet de l’architecte a, lui, été pensé telle « une parenthèse à vivre ». Elle s’explique : « J’ai voulu que cette chambre soit à la fois douce, chaleureuse, mais aussi stimulante, dynamisante. » Pour découvrir les chambres témoins, le salon EquipHotel – qui ouvre ses portes du 3 au 7 novembre 2024, à Paris – organise une avant-première. Elles seront ensuite déployées par OKKO HOTELS en propre et en franchise, sur les cinq années à venir.
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Blockbuster | 2e Biennale du Détroit de Messine
Urbanisme et complexité humaine en bord d’eau salée.
Cet automne a lieu, du 18 septembre au 14 décembre, la 2e Biennale dello Stretto, « biennale du détroit », en Italie du sud, non loin de Messine. La vocation de cet événement, à rebours de la vision ayant largement prévalu avec la globalisation, est d’interroger la spécificité côtière et maritime de l’espace méditerranéen en se focalisant sur son actuelle évolution en matière d’urbanisme. Loin de bannir le détail, on entre ici, au contraire, dans la chair du détail, la chair matérielle, la chair concrète, celle des équipements et des vies.
Installée dans le vieux fort Batteria Siacci surplombant le détroit de Messine, la 2e Biennale dello Stretto, à l’instar de sa précédente édition, se veut un laboratoire où la réflexion, exprimée dans le cadre d’un dense volet culturel, rejoint l’exposition – celle de réalisations et de projets pour le Mare Nostrum, la Méditerranée, cette mer continûment structurante et civilisatrice mais aussi en crise profonde.
Que nous apprend, à propos de cet événement transalpin de haute volée, le dossier de presse ? « La Biennale du Détroit est une manifestation culturelle qui prend racine entre la Calabre et la Sicile. Conçue et mise en œuvre par l’architecte Alfonso Femia, son contenu prolonge le travail de recherche initié avec 500×100 et une série d’événements culturels appelés « Méditerranée(s) Invisible(s) », initiés depuis 2018 dans la région. Ces travaux ont contribué à définir une connaissance approfondie des territoires proches du détroit, mais aussi des rivages européens, africains et du Moyen-Orient. La volonté de la biennale est d’accueillir un moment de réflexion, d’offrir et partager les contributions, expériences et sentiments, autour d’expositions, de rencontres, de débats et d’interventions afin de générer des retombées locales et sensibiliser des partenaires internationaux aux enjeux mis en évidence par le contexte des trois rives de la Méditerranée. »
Maintes civilisations, à l’échelle planétaire, se sont développées au fil de l’eau, essentielle à la vie (on estime que plus de 80 % des populations, dès le paléolithique, vivaient déjà en bord d’eau douce ou marine). C’est le cas, de façon éminente, pour la civilisation méditerranéenne, un des plus anciens foyers humains au monde après le rift africain et le Croissant fertile mésopotamien. Indispensable à la vie, l’eau satisfait les besoins primaires en hydratation, en hygiène et en produits alimentaires, via la pêche ou l’irrigation des friches agricoles. Elle est aussi ce support du transport côtier ou hauturier favorisant les échanges et, dans la foulée, l’implantation d’infrastructures de stockage ou de production telles que manufactures, ateliers et usines. Pièce maîtresse de la facilitation des échanges interhumains, commerciaux mais aussi culturels, l’eau est communicationnelle (elle permet le mouvement, par la navigation) et s’inscrit dans une géopolitique, au fil de la ligne d’eau terrestre alignant ports et hinterlands : une matière une, mais aux utilisations et aux effets variés. Comme l’écrit l’architecte Alfonso Femia : « Les frontières entre l’eau et la terre, les lignes que la mer, les rivières et les crêtes dessinent sur le territoire régissent la vie des gens ; l’excès et le manque d’eau guident l’architecture et tracent le paysage, les infrastructures, les récits, l’histoire des lieux : des paradigmes de conception incontournables ».
Penser une transition douloureuse
La première édition de la Biennale dello Stretto, voici deux ans, avait jeté les bases d’une réflexion spécifique sur la Méditerranée, ses espaces côtiers et ses flux. Qu’est-ce qu’un espace méditerranéen ? Existe-t-il ici une culture architecturale restée spécifique en dépit de la globalisation, aux effets niveleurs ? Comment abouter « les » Méditerranées, au pluriel, celle des Européens avec celle des Africains et celle des Asiatiques ? Cette deuxième édition de la biennale, plus particulièrement, met l’accent sur des thématiques au cœur de l’actualité : les changements climatiques, les migrations, les trois rives, les îles, le cinéma, la musique ainsi qu’un volet sur le numérique et la question de l’intelligence artificielle, dans cette optique multidisciplinaire qu’elle entend développer et préserver, au-delà des seules questions d’architecture et d’urbanisme. Une de ses thématiques, « Habiter autrement. Nomadisme et agitation », sous-tend l’idée d’une évolution inéluctable dont nous relevons au quotidien, depuis une vingtaine d’années, les prémices, évolution signifiée par une crise géographique intense et qui semble appeler à perdurer. La Méditerranée, espace hétérogène, est devenu un espace tampon, une frontière, ce lieu que l’on parcourt – avec de très hauts risques pour les migrants, comme l’on sait – à des fins de plus en plus essentielles et de survie plus que simplement domestiques ou touristiques.
Elle est aussi un espace urbain en développement accéléré sur fond d’artificialisation rarement contrôlée, de surpopulation, de segmentation sociale des unités urbaines favorisant les inégalités. Quelle ville au présent, en Méditerranée ? Et quelle ville future, et pour qui ?
La Méditerranée espace de conflits, en somme. Espace de concurrences de plus en plus impitoyables. Rien de nouveau sous le soleil, certes, dira l’historien – l’histoire continue, en tension plus que dans le repos et au bénéfice de cette « agitation » dont cette deuxième édition de la biennale fait une de ses entrées majeures. Que nous conte l’histoire locale ? La Méditerranée, à l’orée de sa configuration politique, a vu naître sans surprise de multiples organisations du contrôle des eaux et de ses usages : la ligue de Délos athénienne, au Ve siècle av. notre ère. Elle représente très tôt un échiquier où se jouent sans fin les oppositions pour la conquête de l’hégémon, la position de « premier rang » : les Phéniciens aux prises avec les Égyptiens, Rome contre Carthage, les Arabes puis les Normands en Sicile pendant les croisades, Venise, après les républiques maritimes et Gênes, s’emparant en 1204 de Constantinople, Philippe II d’Espagne puis les Anglais quelques siècles plus tard s’imposant comme puissances maritimes… L’eau méditerranéenne, en somme, a rarement été pacifique, elle a de tout temps été un enjeu – à l’exception, peut-être, sous l’Empire romain, qui seul est parvenu à réaliser l’unité du Mare Nostrum.
Un enjeu, qui plus est, l’eau de la « Grande bleue » l’est d’autant plus aujourd’hui, avec le réchauffement climatique. Ce dernier, on le sait, ébranle sévèrement l’espace méditerranéen, fragilisé déjà, dès avant la révolution industrielle, par la surpopulation locale, la surexploitation agricole, les incendies de forêts et une croissante raréfaction de l’eau douce. La pollution intense, qui naît des rejets urbains, des hydrocarbures, des pesticides, des microplastiques, fait de surcroît de la Méditerranée une mer « sale », en dépit de programmes d’assainissement menés en plus haut lieu à partir des années 1970. La hausse croissante des températures, désastreuse, assèche fleuves et zones marécageuses riches en biodiversité, rendant l’eau potable plus rare encore, rareté accentuée par la suroccupation touristique des zones littorales en croissance continue. L’évolution dramatique des conditions climatiques, faut-il le préciser, est plus rapide en Méditerranée qu’ailleurs : « La région méditerranéenne, nous renseigne ainsi l’étude Vers une Méditerranée plus propre, un suivi de l’initiative régionale Horizon 2020 (EEA Report No 07/2020), est l’une des régions du monde les plus touchées par le changement climatique. Le réchauffement y est plus rapide que la moyenne mondiale, les sécheresses ayant augmenté en fréquence et en intensité au cours des dernières années. La pénurie d’eau due au changement climatique et l’augmentation de la demande en eau liée à une démographie en hausse devraient faire passer le nombre de personnes classées « pauvres en eau » (c’est-à-dire, celles qui ont accès à moins de 100 m3 par habitant et par an) en Méditerranée de 180 millions à 250 millions dans 20 ans. » L’urbanisme, dans cette partie, a sa part de responsabilité. La récurrence accrue des épisodes climatiques calamiteux (pluies torrentielles, tornades, tempêtes de sable s’exportant d’Afrique sahélienne jusqu’en Europe continentale, phénomène de « tropicalisation ») n’est pas en effet sans tirer sa force nocive de l’artificialisation des sols sous l’effet de la construction, dopée par la pression démographique subie par les villes côtières méditerranéennes (inondations, glissements de terrain), tandis que les ressources traditionnelles tirées de la pêche se font insuffisantes. Que dire, enfin, du réchauffement graduel de la température de l’eau, avec ses mutations, briseuses des équilibres de surface et pélagiques (changement de la salinité, modification de l’axe des courants marins) ? L’environnement méditerranéen, à la stabilité écologique précaire, ne connaît pas la paix, engagé qu’il est dans une spirale humaine et industrielle plus vicieuse que vertueuse.
Voir depuis le sud
Penser la Méditerranée de façon pertinente passe par une attention prioritairement portée à l’eau : celle-ci maille le territoire et le fusionne tout en lui conférant ses spécificités locales au rythme des côtes, des équipements et de l’aménagement. L’espace aquatique méditerranéen, ce sont, comme l’exprime Alfonso Femia, différentes « lignes d’eau » signalées par leurs spécificités propres. Celles-ci, loin de s’accorder de manière automatique, donnent une image variée du paysage, elles offrent des perspectives, des points de vue esthétiques, conceptuels et économiques non forcément convergents. Le navigateur croisant au large de Santorin ne perçoit pas l’univers de la même façon que l’exploitant agricole de la zone côtière d’Adana ou que le promoteur immobilier de Cassis. Si tous « occupent » bien la Méditerranée, ce n’est ni de la même façon ni aux mêmes fins, au risque que ce tiraillement des actes et des ambitions suscite tension, division, développement non concerté et pour finir, échec organisationnel. Améliorer l’espace méditerranéen implique au préalable la parfaite connaissance de ce milieu, au prorata de l’eau ou, plus exactement, des différents usages de l’eau qui s’y déploient.
Si l’eau peut emprisonner les territoires, se faire frontière, segmenter les zones d’influence, voire isoler les populations non desservies par le transport et à l’écart des réseaux de communication, elle est aussi une force de liaison, un mouvement réticulaire qui connecte les insularités. Comment dès lors rétablir une forme de parité, d’équilibre, comment amenuiser les tensions ? « Vue depuis le nord, depuis l’Europe communautaire, depuis l’Europe riche, la Méditerranée laisse moins apparaître ses failles, ses contradictions », relève Alfonso Femia. Il n’est pas inopportun, dès lors, de privilégier en conséquence une vision depuis le sud, « méridionale », « sudienne », invitant à réorienter la perspective pour épouser celle qu’en ont les Méditerranéens les moins aisés, qui endurent le plus au présent et qui considèrent en témoins la Méditerranée comme un espace fragile, inégal, sur un mode où cette fragilité se voit incarnée. Une telle redirection du regard analytique n’est en rien malvenue ou suspecte, au sens par exemple où elle relèverait du glissement affectif, d’un positionnement politique assumant d’être « non-aligné », nassérien dans l’âme. De longues décennies de crise sociale, politique, religieuse en Algérie, en Grèce, au Liban, ne peuvent donner de la Méditerranée une vision que l’on va dire benoîtement « heureuse », positive en tout, portée par le sentiment de vivre dans une zone paradisiaque. La Méditerranée « juste » est celle que l’on pense à partir de ses problèmes, de ses fragilités.
La vraie géographie ? Celle-ci est locale, contextuelle, plurielle, complexe. Elle incite à cette réflexion élargie dont la 2e Biennale dello Stretto entend être inséminatrice. La Méditerranée, en l’occurrence, gagne à être approchée dans la densité de ses différentes « lignes d’eau » évoquées plus avant – la terre (le surplomb, la bordure), l’estran (le contact), la mer (l’écart), la ligne d’horizon (le lointain, ce qu’il y a « derrière ») –, qui sont des lignes de faille autant que potentiellement, des lignes de travail, de concorde possible, peut-être, autant de lignes de vie au destin entrelacé, mouvant et à méditer voire guérir. Cerner ce qui caractérise le plus exactement ces diverses entités, en bout de course, voilà qui permet seul de donner à l’espace méditerranéen « total » son véritable visage, son essence née d’une multiplicité d’essences non forcément solidaires les unes des autres. La paix commence dans l’examen de la guerre.
Biennale dello Stretto, 18 septembre – 14 décembre 2024.
Fort Batteria Siacci, Campo Calabro, Italie. Direction de la manifestation Alfonso Femia, Francesca Moraci et Mariangela Cama.
— Retrouvez l’intégralité de l’article dans archistorm 128 daté septembre – octobre 2024
Hospitality | Tribe, contribution durable pour nouvelle tribu de voyageurs — Neufville-Gayet Architectes et Ciguë
Pour son treizième établissement européen, l’enseigne australienne sous pavillon Accor investit à proximité de l’hôtel de ville de Clichy-la-Garenne un immeuble responsable en pierre de taille conçu par Elsa Neufville et Erwan Gayet pour Galia. L’aménagement intérieur signé par Ciguë se veut tout aussi éthique et sensible.
Une maîtrise d’ouvrage en quête de sens
Créé à la Martinique il y a 40 ans, le groupe familial Galia veille avec bienveillance à « accompagner le nouveau visage des villes ». Toujours en quête de sens, l’entreprise s’attache à « imaginer et bâtir des lieux de vie ancrés durablement dans leur environnement au service de ceux qui les habitent ». Le groupe a poursuivi son développement en métropole à partir des années 1990 au travers de projets immobiliers diversifiés (résidentiel, bureaux, hôtellerie). Ses rénovations et reconversions sont souvent plurifonctionnelles ou à vocation sociale. Pour ce faire, il fait appel à de jeunes quadras de l’architecture : PCA STREAM, TVK, h2o, Antonio Virga et Vincent Parreira, Neufville-Gayet…
En 2018, Galia se rend acquéreur d’un garage et d’un bâtiment d’habitation XVIIIe en plein cœur de Clichy-la-Garenne sur le boulevard Jean-Jaurès, juste en face des églises Saint-Médard (datant de 1630 et premier monument historique classé de la commune) et Saint-Vincent-de-Paul (Art nouveau). Le projet initial de reconversion en coliving ayant été abandonné faute de trouver un exploitant, le promoteur s’oriente vers une démolition-reconstruction de l’ancien garage afin d’accueillir un hôtel.
Une boutique-hôtel**** déstandardisé
Ayant fait le constat que les voyageurs recherchaient dorénavant des hôtels design à des prix abordables, Melissa et Mark Peters ouvrent à Perth en Australie le premier Tribe Hotel dès 2017. Intelligent, fonctionnel et design, le quatre étoiles offre à ses clients tout ce dont ils ont besoin – entre espaces de travail et de divertissement –, sans rien de superflu. Une nouvelle tribu de voyageurs en quête de lieux de vie déstandardisés et respectueux de l’environnement est au rendez-vous. Cap, dès lors, sur le Sud-Est asiatique et l’Europe. Cette exportation du Good Design démocratisé a été facilitée par l’adossement de l’enseigne au Groupe Accor. Clichy est sa cinquième destination francilienne après Paris-les Batignolles, La Défense, Saint-Ouen et Pantin.
La municipalité aspirait au recours à la pierre afin que cette opération de valorisation foncière contribue à requalifier le cadre bâti de ce quartier architecturalement hétéroclite. Lauréate en 2019 du concours lancé par Galia, l’agence Neufville-Gayet préconise un système de façade porteuse réalisé en pierre massive par assemblage de modules prétaillés (de 35 à 45 cm d’épaisseur) permettant la conception d’un édifice durable, entièrement évolutif et réversible.
Que ce premier hôtel de l’agence soit aussi sa première construction neuve en pierre de taille n’a rien d’étonnant. Architecte du patrimoine, Elsa Neufville est également titulaire d’un master en maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre de la qualité environnementale.
Le concept architectural repose sur deux entités complémentaires : un immeuble compact de six étages sur rue connecté à un bâtiment en U à l’arrière d’à peine trois niveaux, dont un en R-1. Grâce à son linéaire et son épannelage, la façade sur rue gère avec élégance et sobriété la continuité spatiale du bâti emblématique du boulevard. Le rez-de-jardin généré par le surbaissement de la construction arrière concourt à « intimiser » le cœur d’îlot dont la végétation en pleine terre bénéficie d’un bon ensoleillement sans pour autant devenir un gouffre de chaleur. Sobre sans être austère ni conventionnelle, la modénature de la façade en pierre crée de subtiles séquences architectoniques : verticalement, le soubassement réalisé en éléments béton préfabriqués non teintés supporte un corps principal dont les quatre étages se dédoublent grâce aux linteaux triangulairement rainurés et aux corniches. Coiffant les deux derniers niveaux traités en attique, la toiture-terrasse constitue un vaste rooftop propice à la détente diurne des clients et aux soirées festives ouvertes au public. Balcons, terrasses et loggias permettent un découpage horizontal tripartite.
Calculées sur 50 ans, les émissions de CO2 de la pierre sont inférieures de 35 % par rapport à celles du même ouvrage en béton. Réemployable à 90 %, ce matériau naturel noble présente également une meilleure résistance aux dégradations, aux intempéries et aux épreuves du temps.
Résultat : 3 661 m2 de superficie composés d’un rez-de-rue traversant abritant les aménités communes et de six plateaux libres de tous poteaux où loger 120 chambres.
Que le superflu n’empoisonne plus nos cadres de vie
L’agence Ciguë s’est vu confier l’aménagement intérieur. À la croisée de l’architecture, du design et de l’installation, les architectes-menuisiers de Montreuil aiment à réactiver les archétypes pour produire des univers contemporains. En découle le design minimaliste urbain à l’élégance industrielle qui suscite ici une atmosphère moderne et confortable, fonctionnelle et esthétique.
Le lobby du rez-de-chaussée se veut un lieu hybride où la réception investit un coin du généreux comptoir central revisitant l’esprit brasserie parisienne. Revêtu de lave émaillée et coiffé de sa quadruple couronne de néons, il accueille le buffet du petit-déjeuner le matin avant de se muer en bar à cocktails le reste de la journée. Salons et social hub côté rue, restaurant côté jardin avec terrasse sur le boulevard et cuisine ouverte en interface. Les matériaux y sont doux, robustes et élégants : briques, pierre naturelle, terrazzo, céramique, laiton, velours, bois et feutre (panneaux plissés des plafonds acoustiques). Le mobilier design réchauffe la palette chromatique de couleurs vives où dominent (comme dans les circulations d’étages et les habitations) les bleus et verts profonds identitaires de l’enseigne.
Les chambres compensent la relative modestie de leur superficie grâce à leur agencement sur mesure. Le sas d’entrée et la salle de bains (avec hublot en verre strié) constituent une boîte vert bouteille du sol au plafond qui accentue par contraste la sensation de profondeur de la partie couchage. Dalles en béton brut au plafond, plaques de Fermacell aux murs avec cimaises en médium rainuré teinté dans la masse et verni, moquette graphique à motif organique, œuvre d’art fluo en tête de lit encadrée d’appliques DCW rappellent sobrement le passé industrieux de la commune.
Directement accessible par un ascenseur dédié, le rooftop du septième étage jouit d’un panorama à 360°. Pergolas, bacs plantés, niches-banquettes maçonnées aux assises vertes, canapés jaunes et céramique vernissée du bar nous propulsent dans le Miami Art déco.
Fiche technique :
Maîtrise d’ouvrage : Galia Exploitant : Tribe Maîtrise d’œuvre : Neufville-Gayet (architecture), Ciguë (architecture intérieure) Entreprise : Philippe d’Art (pierre)