Sur le plateau de la Garonne, au nord-ouest de l’agglomération toulousaine, la naissance des nouveaux quartiers Monges-Croix du Sud et Andromède répond à l’expansion démographique métropolitaine qui concerne en particulier les communes de Cornebarrieu, Blagnac et Beauzelle.

Alors que nous célébrons les 20 ans de la création des quartiers Monges-Croix du Sud et Andromède, et notre premier écoquartier, je tiens à saluer la créativité et la ténacité de ceux qui ont osé relever le défi d’allier création de logements, confort de vie et respect des espaces naturels.
Parce que nous avons pensé cet urbanisme à taille humaine, sans rogner ni sur l’ambition architecturale, ni sur la préservation de la biodiversité, Oppidea et Toulouse Métropole ont donné vie à ces quartiers situés en lisière de la zone aéronautique et connectés dès lors par les transports en commun à Toulouse, la ville centre, mais aussi à toute la métropole.
Ces deux projets, qui ont accueilli leurs premiers habitants en 2008 et 2011, font école et inspirent les nouveaux quartiers en devenir sur notre territoire qui compte désormais huit écoquartiers.

Jean-Luc Moudenc, Maire de Toulouse
Président de Toulouse Métropole

Ces deux nouveaux quartiers sont le démonstrateur d’une urbanisation respectueuse de son environnement, qui révèle le grand paysage qui les accueille et s’y intègre. Ainsi, chaque îlot développe une écriture architecturale contemporaine de qualité, parfaitement intégrée et pérenne, souvent signée par des grands noms de la profession. Partout, les formes urbaines sont variées, tout comme les typologies d’habitat.
Pensés pour leurs habitants et usagers, Monges-Croix du Sud et Andromède sont une réussite en matière de qualité de vie et d’usages. Les logements y sont conçus pour le bien-être de leurs occupants. Faisant la part belle à la nature, les quartiers constituent des lieux de vie qui accueillent commerces et services de proximité, équipements éducatifs et culturels, espaces publics et de loisirs.

Annette Laigneau,
Présidente d’Oppidea

Favorisé par la mise en place du programme aéronautique impulsé à la fin des années 1990, l’acte de naissance de ces projets est marqué par la décision prise le 27 septembre 1999 communément par les collectivités et l’État de proposer le site du nord-ouest toulousain pour l’installation de l’usine d’assemblage de l’Airbus A380. « Il s’agit de l’un des rares cas, en France, où un projet industriel précède et amorce un projet urbain » explique Alain Garès, Directeur général de la SEM en charge du secteur entre 2000 et 2009. Toulouse, en compétition avec Hambourg, remporte le projet en décembre 1999. L’ancien DG précise que « la volonté politique exprimée à tous les niveaux, des communes jusqu’à l’État, ainsi que le site désigné appartenant à la ville de Blagnac, ont emporté l’adhésion d’Airbus. S’est ensuite enclenché tout le processus de développement du secteur, puisqu’une fois la concession d’aménagement du projet industriel signée, le projet urbain a également été engagé dans l’intention d’accompagner la croissance industrielle par une croissance urbaine ». La chaîne de construction de l’A380 s’installe, avec d’autres implantations aéronautiques, sur un site représentant au total 260 hectares. Les projets urbains Monges-Croix du Sud et Andromède, avec respectivement 57 et 210 hectares, viennent compléter, dans une démarche de projet global, une urbanisation déjà bien engagée. Le dossier de création de ces quartiers a été adopté le 28 juin 2001.

Pour réaliser ces opérations, la SEM Immobilière de Blagnac devient la SEM Constellation, qui a ensuite fusionné avec d’autres sociétés pour devenir Oppidea en 2011. La mission d’aménageur d’Oppidea, depuis l’acquisition foncière jusqu’à la commercialisation, comprend le montage de l’opération, la définition du projet d’aménagement, puis sa réalisation, tout en s’adaptant dans le temps à l’évolution d’opérations se déroulant sur plus de vingt ans.

Principe urbanistique structurant

« Au nord de Blagnac, un projet de zone d’aménagement concerté était prévu en amont, et à Cornebarrieu, la zone était également prête à être développée dans le cadre d’une opération de logements. Aussi, nous avons lancé au même moment les deux opérations Andromède et Monges-Croix du Sud, portant chacune le nom d’une constellation en référence au projet industriel. Dans le même temps, de nombreux équipements publics ont été créés ou déplacés depuis le site dédié à AéroConstellation » relate Alain Garès.

Un marché de définition a permis de faire appel à plusieurs équipes de maîtrise d’oeuvre, composées d’architectes et urbanistes, de paysagistes, ainsi que d’AMO et BET, ayant travaillé conjointement afin de proposer des approches différentes. Cette procédure étalée sur une année a permis un réel travail de fond sur les projets, intégrant notamment des objectifs de développement durable exigeants, qui représentaient alors une nouveauté. En 2001, ont été sélectionnées pour le quartier Monges les équipes de Bruno Fortier, accompagnées d’Obras et de l’agence Michel Desvigne Paysagiste, et celle de Treuttel – Garcia – Treuttel (TGT) avec Woodstock Paysage pour le quartier Andromède. Les urbanistes sont chargés de veiller à ce que les principes généraux soient mis en oeuvre dans chaque îlot par les différentes équipes d’opérateurs et par la maîtrise d’oeuvre. De cette façon, avec une volonté constante et explicite, une réelle logique d’ensemble s’instaure tout au long du développement de l’opération. « Ces projets intègrent des formes et des principes d’urbanisme innovants pour l’époque, et ont permis de faire avancer les choses en introduisant des pratiques nouvelles devenues communes depuis lors, comme la mise en concurrence systématique sur chaque lot » conclut Alain Garès.

Contraintes environnementales, qualité urbaine, architecturale, paysagère et d’usage ainsi que politique de mobilités douces sont mises en oeuvre à grande échelle et constituent désormais des références. L’ensemble des constructions se doit en particulier d’atteindre des certifications environnementales exigeantes. Une place considérable est également accordée aux espaces verts dans les parties publiques comme sur les opérations privées, et une gestion innovante des eaux pluviales est mise en place. Pour autant, la couture avec le tissu urbain existant fait l’objet d’une grande attention, et l’adaptation des voies de transport aux différentes mobilités renforce l’intégration dans l’espace urbain. Toutes ces notions qui peuvent aujourd’hui paraître évidentes ne l’étaient pas au moment du lancement des projets, au début des années 2000.

Monges-Croix du Sud, Pôle culturel de l’Aria, Philippe Madec Architecte, performances : HQE, Passif & VNAC – Bois et terre. Lauréat du Prix National de la Construction Bois de 2017

Formes urbaines innovantes

Les deux zones d’aménagement concerté sont le fruit d’un travail qui se distingue par son importante part d’innovation. « Sur le long cours, la tenue du cap de la qualité urbaine, architecturale et paysagère s’avère importante. Une grande qualité des projets a été rendue possible par un principe de mise en concurrence systématique. De plus, une démarche singulière de commercialisation est engagée puisque l’aménageur pratique un prix fixé au départ, et les projets se voient donc départagés uniquement par leurs qualités intrinsèques » relate Raphaël Catonnet, actuel Directeur général d’Oppidea.

Pour chaque îlot et après un appel à candidatures, trois équipes sont retenues pour participer à une consultation sur esquisse. Le meilleur projet est ensuite sélectionné par une commission composée de la maîtrise d’ouvrage, de l’urbaniste du quartier, d’un représentant de l’Ordre des architectes et des élus. Des équipes locales comme extérieures, nationales ou internationales, associant promoteurs, bailleurs sociaux et architectes, ont été invitées à répondre aux consultations. Ces principes, novateurs au début des années 2000, encouragent les concepteurs à proposer des solutions innovantes et expérimentales, notamment en termes de développement durable et de qualité d’usage.

La démarche a permis de voir naître certaines propositions totalement innovantes, telles que l’isolation par l’extérieur qui ne se pratiquait pas à l’époque. De plus, la latitude laissée aux architectes favorise la créativité, les équipes proposant des projets variés et novateurs s’inscrivant dans le renouvellement de la production architecturale.

« L’objectif fut de réfléchir à l’échelle d’une entité territoriale de plus de 500 hectares pour essayer de développer à la fois un programme industriel, mais aussi un secteur résidentiel avec la création de plus de 6 500 logements, de grands espaces verts, ainsi que des commerces et services de proximité. 200 000 m² de bureaux s’installent également sur Andromède » précise Raphaël Catonnet. Une forme variée d’habitats, avec des logements collectifs ou individuels, des logements en accession libre et des logements sociaux et participatifs, participe à la mixité du quartier. L’alternance d’espace individuel et d’espace collectif encadre une densité réfléchie et maîtrisée. Ce principe permet de construire de façon dense tout en conservant des espaces végétalisés et des lieux publics, indispensables à la qualité urbaine. Dans les deux quartiers, l’installation de crèches et d’écoles a permis de fixer la population. De nombreux équipements publics, scolaires, mais aussi culturels et sportifs participent à la qualité de vie et au rayonnement du secteur. Plusieurs infrastructures culturelles mises en place, à l’image de l’Aria de Cornebarrieu, un centre culturel avec salle de spectacle et médiathèque conçu par Philippe Madec, étaient prévues très en amont dans la chronologie du projet. Le quartier Andromède comprend ainsi une vingtaine d’équipements publics. En outre, l’avenue éponyme a trouvé son équilibre avec de nombreux commerces et des espaces de restauration. L’adaptation des voies de transport aux mobilités douces accompagne une qualité de desserte par les axes routiers et les transports en commun, notamment avec le tramway qui traverse Andromède. « Le second objectif était de mettre en place des formes urbaines innovantes. Lorsque les projets furent initiés à la fin des années 1990, les extensions urbaines se composaient majoritairement de formes classiques de l’urbanisme, souvent des lotissements pavillonnaires. Notre objectif a été de faire émerger des formes à la fois mixtes et compactes, selon un maillage ponctué de verdure donnant envie à la population de vivre en ville » ajoute le Directeur général d’Oppidea. Selon ce même objectif, une part très importante de surface est dédiée aux espaces verts. Dans le quartier Monges-Croix du Sud, un grand parc central forme l’épine dorsale du projet. Au sein de l’écoquartier Andromède, l’écharpe verte court depuis la Garonne jusqu’au plateau, se dessinant aussi le long des deux principaux cours (Pinot et Barricou) structurant le projet urbain.

Îlot 23b, Résidence Nouvel’R, ZAC Andromède, architecte : LCR Architectes

Une grande part d’espaces verts

Tout en développant une sensibilité écologique et environnementale, la création d’une importante surface d’espaces verts était dès l’origine l’une des conditions visant à compenser les restructurations opérées dans le cadre du projet Aéro-Constellation. Les espaces verts publics ont été installés en tenant compte du cadre existant. Le projet urbain Monges-Croix du Sud s’inscrit dans une topographie en lisière composée de cours d’eau et de cordons boisés. Dans un rapport fort à la nature, 12 hectares parmi les 57 du quartier sont dédiés aux espaces verts. Le quartier Andromède s’établit quant à lui dans une plaine située à la jonction entre les communes de Blagnac et de Beauzelle. Le quartier, dessiné selon une trame très marquée autour des cours principaux, comprend 70 hectares d’espaces verts sur les 210 hectares de l’opération métropolitaine. « Nous avons fait le choix d’augmenter de 40 % les espaces naturels tout en réduisant de 10 % les emprises initialement dévouées à la voirie afin de renforcer la valeur d’usage de l’habitat. Agrandir les espaces verts permet de poser un linéaire plus grand et d’apporter une qualité supérieure aux bâtiments » précise Raphaël Catonnet. Les plantations engendrent également la création de zones d’ombrage et de rafraîchissement, et participent ainsi à la qualité environnementale des lieux. Un préverdissement a permis d’installer et de consolider le paysage et de rendre saillante la trame verte, afin de répondre à une forme urbaine compacte par une forte présence des espaces verts, un bénéfice reconnu par l’ensemble des usagers. Cette démarche générale appliquée au sein de l’espace public doit aussi être respectée dans l’élaboration des différents projets de construction d’îlot afin de conserver une cohérence d’ensemble.

Le Pôle enfance, ZAC Monges-Croix du Sud, architecte : Duncan Lewis

Démarches environnementales

Le vaste et vertueux système aérien de gestion des eaux pluviales participe du paysage et de la végétation tout en favorisant la préservation des sols. Chaque îlot gère par un système autonome et majoritairement aérien les eaux pluviales ensuite rejetées vers l’espace public et les bassins de stockage, d’où l’eau est ensuite acheminée jusqu’aux rivières et à la Garonne. La réalisation de la phase 3 du secteur Andromède actuellement à l’étude, à dominante résidentielle, offrira l’opportunité d’établir la connexion avec le lit de la Garonne. L’expérience acquise lors des deux premières phases permet de développer un lien encore plus fort avec la nature en réduisant les emprises constructibles. L’attention a aussi été portée sur la qualité environnementale, une caractéristique à l’époque innovante, qui a séduit les équipes municipales des communes du secteur. En effet, dans le souci d’une démarche volontariste sont exigées de hautes performances de construction, notamment un niveau HQE pour la certification NF Habitat qui concerne également la qualité de l’air, la construction bas-carbone et l’aspect énergétique. L’obtention des labels E+C-, Effinature Construction en faveur de la biodiversité ou encore le label national ÉcoQuartier attribué à Andromède en témoignent également. Les immeubles en cours de construction depuis le début des années 2020 suivent la nouvelle réglementation environnementale RE2020, en appliquant d’ores et déjà le seuil exigé pour 2025. « Les enjeux actuels portent sur la gestion du confort d’été sans climatisation, nous allons donc faire travailler les constructeurs sur des surfaces de  pleine terre, la végétalisation, des systèmes de ventilation naturelle, des espaces traversants », nous rappelle le directeur général d’Oppidea.

Une vision à long terme

« La réussite du projet tient dans la volonté commune entre l’État, les élus et les concepteurs, ayant favorisé un développement rapide et une conduite dans un délai record, tout en permettant de maintenir sur le long terme les principes établis dès l’origine des projets » conclut Raphaël Catonnet. Forts de leur succès, Monges-Croix du Sud et Andromède ont fêté leurs 20 ans, le 28 juin 2021. En 2022, alors que sont livrés les derniers immeubles du quartier Monges-Croix du Sud, la deuxième phase du projet d’aménagement Andromède est en cours de finalisation, et l’étude de la troisième et dernière phase s’achève pour un lancement prévu en 2024. L’enjeu actuel, développé depuis les prémices des projets, consiste à capitaliser sur les techniques innovantes en permettant aux opérateurs d’acquérir et de renforcer leur expérience en matière de développement architectural et paysager. Dans un processus expérimental, plusieurs projets innovants des quartiers Monges-Croix du Sud et Andromède permettent de réaliser des avancées dans le domaine environnemental. Ainsi, le promoteur et le bailleur peuvent aujourd’hui reproduire ailleurs tout ou partie de ce qu’ils ont appris lors de ces projets.

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Texte : Cléa Calderoni
Visuel à la une : Le cours Barricou à Andromède © Christophe Picci

– retrouvez l’intégralité du TAP sur les 20 ans des quartiers Andromède et Monges-Croix du Sud  dans archistorm 116 daté septembre – octobre 2022