F(R)ACTURE URBAINE

ELBPHILHARMONIE DE HAMBOURG, HERZOG & DE MEURON
PROUE URBAINE, PROUESSE ARCHITECTURALE

Dans les brumes de l’Elbe, la nouvelle Philharmonie de Hambourg surgit tel un vaisseau fantôme ou un « titanesque » iceberg tandis qu’au coucher du soleil elle scintille telle une couronne incandescente posée sur un monumental éperon rouge brique. Au-delà de l’icône architecturale et culturelle – très « chère » aux Hambourgeois –, l’œuvre des Suisses Herzog & de Meuron incarne la proue du renouveau urbain de cette cité hanséatique. À 800 m à peine de l’hôtel de ville, HafenCity réinvestira d’ici 2030 les 157 ha (dont un tiers d’eau) de friches portuaires, faisant ainsi croître son patrimoine bâti de 40 %.

Une ville-État plutôt méconnue

Elbphilharmonie – Herzog & de Meuron © Maxim Schulz

Deuxième ville d’Allemagne par sa population derrière Berlin – dont elle partage (avec Brême) le statut de ville-État depuis 1949 –, Hambourg en est la plus riche, l’une des moins denses et donc l’une des plus vertes. L’Elbe qui la traverse lui ouvre simultanément l’accès, en amont, à la mer Baltique et à la mer du Nord où elle se jette 110 km plus en aval. Profonde et navigable, cette voie fluviale en a fait un port maritime – le 3e d’Europe après Rotterdam et Anvers –, « l’entrée du monde de l’Allemagne », le carrefour (y compris ferroviaire) de l’Europe du Nord et, bien sûr, sa richesse !

Deux tragédies marquèrent son histoire : l’incendie de 1842 qui détruisit 4 000 bâtisses en bois datant du Moyen Âge et les bombardements de l’été 1943 à sa libération le 3 mai 1945 qui anéantirent 52 % de son parc immobilier et une bonne partie de ses infrastructures portuaires. Allaient s’ensuivre l’occupation britannique, la partition de l’Allemagne et la guerre froide. Sa reconstruction pratiquera le zoning prôné par la Charte d’Athènes.

Certes, Brahms et Mendelssohn naquirent à Hambourg, mais son histoire musicale est bien davantage marquée de 1721 à 1788 par Telemann et Karl Philipp Emanuel Bach, son filleul. Gustav Mahler dirigea son Staatsoper de 1891 à 1897. Par contre, on méconnaît souvent le dynamisme de sa scène rock, disco et pop : sa centaine de clubs permit à de très nombreux artistes mondialement reconnus depuis d’y faire leurs premières armes, à commencer par les plus célèbres d’entre eux, les Beatles, où le groupe définitif se forma. N’y compte-t-on encore aujourd’hui pas moins de 280 maisons d’édition musicale et 200 de disques, mais aussi les sièges des principaux groupes de médias allemands ? (…)

Impressionnant accordéon de verre bombé prtotégeant la Plaza du vent; quand ce dernier fait défaut, certains panneaux à double courbure pivotent © Iwan Baan

Texte : Lionel Blaisse
Visuel à la une : L’acoustique de la Petite Salle – accueillant les petites formations et les récitals – est garantie par des panneaux de chêne français, micro-perforés ou pas, bosselés au laser © Olivier Heissner

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