CRÉATION

RENAISSANCE

Le nord du 18e arrondissement de Paris redore son blason. Au programme, trois projets de grande envergure : logements, bureaux commerces, habitations, résidences d’étudiants, le tout intégré dans une nature retrouvée, une agriculture urbaine, des marchés couverts de qualité, une halle voltaïque… Découverte !

MARCADET

La rue des Poissonniers, orientée globalement nord-sud, tire son nom du fait qu’elle fut un élément du chemin des Poissonniers, route reliant le nord de la France aux Halles de Paris empruntée par les marchands de poisson. Précisément sur cette rue, juste en face de l’étroite rue Gaston-Auguet, est située une ancienne halle SNCF construite en 1968, dont le dernier occupant était l’enseigne METRO. Le bâtiment et ses alentours sont en voie de totale transformation. Fini le béton, la nature reprend le dessus grâce au projet Marcadet de restructuration du socle existant (ancienne halle), avec surélévation neuve en bois massif CLT. Le motto du maître d’ouvrage Woodeum : « Pour que chacun puisse vivre dans un environnement plus naturel, plus beau et plus agréable, nous imaginons, développons et commercialisons des immeubles de nouvelle génération en bois massif CLT à faible empreinte carbone. » Ainsi Woodeum s’est entouré de l’agence d’architectes Chartier-Dalix pour construire ce programme nouvelle génération. « Ce bâtiment aux programmes multiples vient compléter un ensemble urbain préexistant, en remplissant ses espaces résiduels et non qualifiés, afin de créer une urbanité mixte. Intégrant les premiers niveaux au nouvel édifice, le projet recompose un ensemble cohérent avec des éléments bâtis séparés par cinq généreux patios largement plantés et un jardin en toiture. Ces lieux de vie et d’échanges profitent aux usagers des bureaux ainsi qu’à l’ensemble des riverains, dessinant un paysage habité devant le panorama des toits parisiens et la butte Montmartre. Les patios rythment l’ensemble du bâtiment et créent un subtil jeu de transparences permettant d’appréhender le volume bâti dans sa profondeur, offrant des perspectives variées », précise le cabinet Chartier-Dalix. Une nouvelle façade vitrée de près de cinq mètres de hauteur, à l’alignement de la rue des Poissonniers, animera la rue et redonnera une grande lisibilité au rez-de-chaussée de l’immeuble, rythmé par les commerces, les espaces de restauration, les locaux de la Ville de Paris, et les halls des différents programmes. L’architecture met ainsi l’accent sur la réversibilité des espaces et l’insertion de l’immeuble dans son environnement typiquement parisien. Les espaces de travail sont pensés pour favoriser le bien-être et les nouveaux usages : luminosité des plateaux de 3 000 m² interconnectés par des passerelles ; rythme du bâtiment intégrant zones de rencontre et d’échanges ; services accessibles à tous et ouverts sur la ville ; qualité des matériaux employés (bois structurel visible) et mise en valeur des espaces extérieurs végétalisés. In fine, il y a création de 28 850 m² de bureaux, services et commerces (fitness de 1 430 m², brasserie de 350 m², restaurant de 1 200 m², espace de coworking de 400 m²), d’une résidence étudiante de 78 chambres, de 2 000 m² de locaux pour la Ville de Paris (DPSP et restaurant administratif), de 3 600 m² d’agriculture urbaine en toiture rappelant les jardins ouvriers d’antan, qui vont voir le jour d’ici 2023.

BELLIARD

Le Belliard par l’agence d’architecture et d’ingénierie Marc Mimram : façade sur jardin et façade sur rue © Marc MIMRAM Architecture & Ingénierie, l’Atelier JBMN

Le Belliard par l’agence d’architecture et d’ingénierie Marc Mimram : façade sur jardin et façade sur rue © Marc MIMRAM Architecture & Ingénierie, l’Atelier JBMN

À 650 mètres à pied du projet Marcadet, tout au bout de la très longue rue de Clignancourt, se trouve un centre de bus RATP. Lui aussi en future totale transformation. « L’ambition du groupe RATP de devenir le partenaire privilégié des villes intelligentes passe notamment par une politique énergétique et immobilière ambitieuse, comme l’illustre ce programme mixte Belliard qui associe un centre bus, des logements, des bureaux, des commerces… Notre objectif est ainsi de contribuer à une meilleure qualité de vie en ville, avec un impact urbain positif sur l’économie, la société et l’environnement », déclare Jean-Louis Houpert, directeur de la valorisation immobilière du groupe RATP. Dans le cadre du programme d’aménagement et de restructuration du centre bus Belliard, Paris 18e, le groupe RATP a retenu Linkcity comme maître d’ouvrage, qui est accompagné de l’agence Marc Mimram pour l’architecture et l’ingénierie, de l’Atelier jbmn et de la paysagiste Ana Marti-Baron, qui ont mis leurs savoir-faire au service de la qualité de vie urbaine du projet. Ce programme, qui s’ancre sur la conversion à l’électrique du centre bus, crée un nouvel îlot — autre véritable poumon vert. Aujourd’hui enclavé, car privé, ce vaste lieu va ainsi s’ouvrir, (re) prendre vie et se connecter à son environnement grâce au développement d’environ 25 000 m². Le programme comprendra des logements, des bureaux, des résidences sociales et de coliving, des commerces et un équipement sportif privé. « Un programme mixte, une architecture plurielle… Des espaces à vivre agréables, ouverts, qui réinventent un lieu protégé jusqu’ici privé, offrant des perspectives fortes sur le quartier… Une halte urbaine conviviale, durable. Un programme aux matériaux variés, colorés, responsables », commentent de concert Marc Mimram et Atelier jbmn. Il s’agira de permettre à ces entités de fonctionner au sein d’un même ensemble urbain, tout en augmentant très largement les surfaces végétalisées de la parcelle, et de contribuer à l’animation du quartier. In fine, 10 000 m² de logements disposés le long de la rue Championnet, du parvis et, en limite nord, un bâtiment de bureau de 4 600 m² qui s’intercale entre les logements : il prend place au sud de la dalle de couverture du centre de remisage. Au centre du parvis, face à la Halle Championnet (toit traité en photovoltaïque de 3 000 m²), le rez-de-chaussée du bâtiment de logements sur le parvis sera occupé par un grand centre sportif (orienté escalade) de 2 000 m², une résidence de coliving de 7 800 m² occupera la partie ouest de l’opération, et 5 000 m² de surface de commerces ou d’activités seront implantés en deux zones, sur la rue Championnet et la place-cour sud, et sur le parvis entre les résidences sociales et l’équipement sportif. Le jardin, privé, sera accessible aux résidents ou clients du centre sportif. La livraison est prévue pour 2026.

ORDENER

L’ensemble urbain Poissonniers Ordener par l’agence d’architectes Chartier-Dalix : le hall, la passerelle, le toit, la vue depuis le sud, un plateau de bureaux © Chartier-Dalix

L’ensemble urbain Poissonniers Ordener par l’agence d’architectes Chartier-Dalix : le hall, la passerelle, le toit, la vue depuis le sud, un plateau de bureaux © Chartier-Dalix

Derrière le long mur de la rue Ordener se trouve le site de l’ancien dépôt de la Chapelle (fermé depuis 2013), l’ancienne base arrière de la gare du Nord, bien connu pour avoir accueilli en 2015 Ground Control puis Grand Train durant l’été 2016. Ce vaste site d’environ cinq hectares est également appelé à se transformer en un nouveau quartier, en phase avec la vision urbanistique stratégique portée par la Ville de Paris sur tout le Nord-est parisien. Le programme d’aménagement avait été confié au groupement Emerige/Ogic avec l’architecte Christian Biecher et les paysagistes SLA qui prévoyaient 18 000 m2 de bureaux et 36 000 m2 de logements, un cinéma MK2, des commerces, une halle ainsi qu’un data center à l’horizon 2024. « Avait été », car les écologistes se sont mobilisés contre ce projet d’aménagement porté par la SNCF et la Ville, afin de réclamer l’aménagement d’un immense parc à la place d’une partie des logements pour lutter « contre la bétonisation ». Le 16 décembre 2019 s’est tenue en mairie du 18e arrondissement de Paris une réunion publique d’échanges sur les observations recueillies lors des derniers ateliers réalisés avec les riverains et les associations. Et puis tout s’est arrêté à cause d’un virus invisible qui a bloqué la planète. Toutes les observations seront prises, bien sûr, en compte et versées au bilan de la concertation. Vue de Google Earth, la superficie des trois projets est immense. La période nous a clairement appris l’importance et la nécessité de la nature, de l’espace, des espaces verts, la nécessité des parcs, du vert, des arbres, etc. Il est donc capital de penser un paradigme. Et si nous habitions à nouveau au cœur de la nature ?

Texte Yves Mirande
Visuel à la une L’ensemble urbain Poissonniers Ordener par l’agence d’architectes Chartier-Dalix : le hall, la passerelle, le toit, la vue depuis le sud, un plateau de bureaux © Chartier-Dalix

Retrouvez l’article Création : Renaissance, d’Yves Mirande, dans Archistorm daté mars – avril 2021