EXTRAIT

HORS SÉRIE : AUER WEBER
#architecture #environnement #éducation #sports #.fr #.lu

ÉDITORIAL

Cette publication est le recueil d’une douzaine d’années de projets réalisés en France et au Luxembourg par l’agence allemande d’architecture Auer Weber. Basée à Stuttgart et à Munich, l’officine affiche une solide expérience grâce à un historique de projets ambitieux et innovants qui lui ont permis au début des années 2 000 de s’ouvrir à des marchés internationaux. Après une série d’appels d’offres remportés en Chine, l’agence s’est tournée vers des territoires plus proches de ses frontières, dont la France et le Luxembourg. Cette orientation a nécessité plusieurs adaptations dans les méthodes de travail mais le penchant francophile d’un certain nombre d’employés et d’associés de l’agence, combinés à la pertinence des projets présentés a permis à Auer Weber de remporter une quinzaine d’appels d’offres. En outre, l’expertise et le savoir-faire de l’agence dans les domaines de l’éducation et du sport lui ont conféré toute l’assise pour s’illustrer dans ces registres, avec désormais des réalisations très singulières réparties sur l’ensemble des deux territoires. Cet ouvrage propose de porter un regard plus spécifique sur quatre d’entre elles parmi les plus récentes. Ces quatre projets, une aréna à Aix-en-Provence, un parc sportif et urbain à Clermont-Ferrand, le stade nautique des Jeux olympiques de Paris 2024 à Vairessur-Marne et un complexe scolaire et sportif à Luxembourg ont guidé le photographe Aldo Amoretti et le journaliste Olivier Reneau dans une itinérance dont ils livrent ici le fruit de leur observation. En préambule de ce portfolio, un long entretien réalisé avec plusieurs associés et architectes de l’agence permet de cerner les objectifs et les attentes de cette dernière lorsqu’elle décide de s’engager dans un projet. On y perçoit notamment la très grande liberté offerte à chaque équipe pour exprimer sa créativité mais aussi ses envies et ses idées menant à un vrai processus de dialogue et d’échanges. Le gage à priori de projets non préformatés et dont l’empathie serait le guide.

EXTRAIT DE L’ENTRETIEN
Rencontre à Munich avec Moritz Auer (Munich) et Achim Söding (Stuttgart), cogérants de Auer Weber. Ont contribué à cet échange Stefan Niese, Felix Wienken et Markus Hennig pour leur expertise des projets français et luxembourgeois.

Dans quelles circonstances l’agence a-t-elle vu le jour ?
L’agence a été fondée en 1980 par les architectes Fritz Auer et Carlo Weber. Tous deux avaient auparavant été associés chez Behnisch und Partner et ont participé comme chefs de projet à la construction du complexe des Jeux olympiques de 1972. En 1980, ils ont décidé de fonder leur propre agence, avec d’abord un bureau à Stuttgart, puis un second à Munich. À cette époque, l’agence été distinguée par deux grands prix d’architecture en Allemagne. En 2006, elle est devenue une société à responsabilité limitée, avec une direction assurée par cinq architectes partenaires, Moritz Auer, Philip Auer, Stephan Suxdorf, basés à Munich, et Achim Söding et Jörn Scholz à Stuttgart. Au cours des années suivantes, Auer Weber s’est développée en portant des projets importants en Allemagne, mais aussi à l’étranger, en Chine notamment, ainsi qu’en France et au Luxembourg. Désormais, l’agence compte plus d’une centaine d’employés.

Pourquoi avoir créé deux bureaux, finalement pas si éloignés l’un de l’autre ?
Dès le début, il y a eu cette volonté d’être présent en Bavière, en plus du Baden-Württemberg. À cette époque, la législation allemande ne permettait pas à une agence basée dans une région (un Land) de répondre à un appel d’offres dans une autre région. Ces dernières années, le bureau de Munich a connu une croissance plus importante que celui de Stuttgart en raison de grands projets, tels que la gare Centrale de Munich, ceux en Chine et, bien sûr, les concours en France à partir de 2007. Mais les deux bureaux disposent vraiment des mêmes compétences et peuvent développer le même type de projets.

Quels sont les axes de développement de l’agence ?
Un accent important a été mis sur la réalisation de bâtiments administratifs pour des clients publics et privés — des banques, par exemple. Nous avons également développé une importante expertise dans la conception de bâtiments sportifs et éducatifs, expertise qui vient d’une certaine manière s’inscrire dans l’expérience acquise par Fritz Auer et Carlo Weber sur le Stade olympique de Munich lorsqu’ils travaillaient avec Günter Behnisch. En outre, nous construisons des bâtiments polyvalents pouvant accueillir des événements sportifs, mais aussi culturels, et des prestations événementielles. Les musées sont aussi une partie importante de notre activité. Évidemment, notre curiosité naturelle nous incite à rester attentifs à tout type de projet, dès lors qu’il contribue à accroître la diversité des expertises de l’agence.

En quelques mots, comment pourriez-vous qualifier l’agence?
Curiosité, enthousiasme, sympathie, empathie… Nous aimons travailler en étroite collaboration avec tous les acteurs d’un projet. Nous analysons tout d’abord le site, afin d’intégrer le projet dans son environnement, mais nous cherchons surtout à apporter des solutions adaptées et spécifiques pour répondre aux problématiques énoncées.
L’esprit d’équipe au sein du bureau doit primer sur les individualités, si bien que la hiérarchie est relativement horizontale. Ce qui permet au final un dialogue d’égal à égal avec tous nos partenaires impliqués dans la planification du projet.

Peut-on parler d’une «signature» Auer Weber?
Ce serait formidable si cette empathie que nous revendiquons pouvait être ressentie comme telle par nos interlocuteurs, et plus encore par les utilisateurs de nos réalisations. Que ceux-ci, au final, se sentent un peu comme chez eux sur leur lieu de travail. (…)

 

QUELQUES PROJETS : PORTFOLIO

En juin 2021, le photographe Aldo Amoretti et le journaliste Olivier Reneau ont parcouru la France et le Luxembourg au gré des dernières réalisations de l’agence.
En résultent quatre histoires en images et en mots de projets éducatifs et sportifs à Aix-en-Provence, Clermont-Ferrand, Vaires et Cents.

Stade nautique olympique d’Île-de-France – Île de loisirs de Vaires-Torcy

Vue d’ensemble depuis le stade d’eau vive vers le plateau vif et le lac de Vaires

Une fois arrivé sur le site de l’Île de loisirs de Vaires, on en oublierait presque que l’on se trouve à seulement une vingtaine de kilomètres de Paris. Déployé sur 90 hectares, le plan d’eau est entouré d’une belle végétation arborée qui fait oublier le caractère très urbain de la métropole francilienne. C’est en fait une ancienne sablière, transformée dans les années 1980 en base nautique pour le grand public, qui a retenu l’attention du comité d’organisation des JO parisiens, déjà d’ailleurs lors de la candidature en 2012, pour l’implantation de la base des compétitions d’aviron et de canoë-kayak. Aussi, le projet a porté sur la construction de locaux techniques et sportifs, de logements pour les compétiteurs, d’un dispositif de mise à l’eau, qui servent déjà et continueront de fonctionner après la tenue des Jeux, mais aussi sur la « fabrication » d’un parcours en eau vive. Au total, c’est près d’un kilomètre de rivières artificielles, dont 250 mètres profitant d’une belle dénivellation pour créer le torrent adéquat, qui a été aménagé aux abords du plan d’eau. La structure des bâtiments s’étend quant à elle en front de lac en formant une ligne brisée permettant de distinguer les fonctions. Si le béton prédomine parmi les matériaux employés pour la structure – les façades et portes des hangars sont toutefois en polycarbonate, assurant la diffusion d’une lumière naturelle à l’intérieur – le dessin a joué le parti pris d’une implantation qui s’inscrit habilement dans le paysage. L’architecture propose notamment une toiture en majorité végétalisée, qui, sur la partie arrière, se fond dans la topologie des lieux et devient un lieu de promenade. D’ailleurs, le projet a préconisé un traitement très naturel de la végétation pour contrecarrer cette présence artificielle. Au bout d’une très longue jetée qui s’étire sur le lac, un « cube » en bois posé sur pilotis permet aux arbitres de suivre le déroulement des compétitions, mais sans doute sert-il autant de marqueur visuel à ce projet où architecture et paysage dialoguent au mieux.


Parc urbain et sportif Philippe-Marcombes Clermont-Ferrand

Vue du stade et de la tribune depuis la terrasse panoramique située sur les salles omnisports

À Clermont-Ferrand, la pratique sportive n’est pas une activité vaine ! Quelque 145 installations sportives rythment la vie de la « capitale » de l’Auvergne. Tandis que la plupart des stades se trouvent désormais à la périphérie des villes, le parc sportif et urbain Philippe-Marcombes est au coeur de la cité, à proximité d’habitations, villas et grands ensembles, ainsi que de structures scolaires et universitaires. Il offre ainsi aux citadins un accès facilité à de nombreuses activités sportives et de bien-être. C’est notamment l’un des atouts de l’héritage de l’équipement originel – un stade vélodrome édifié en 1922 par la volonté du maire Philippe Marcombes –, qui a été repensé comme un vrai projet paysager intégrant les grandes fonctions sportives. Si le complexe rénové a perdu son anneau cyclable, il a en revanche conservé cette identité du grand ovale autour duquel s’agrègent terrains de football, tennis, basketball et handball, gymnase, skatepark, équipements d’athlétisme, dont un sautoir à la perche – clin d’oeil au perchiste clermontois Renaud Lavillenie – situé face à la nouvelle tribune, laquelle, grâce à une structure très aérienne, peut accueillir 1 600 spectateurs. Une série d’interventions artistiques, du skatepark couvert aux terrains de basket, vise également à inscrire le site dans une dynamique de culture urbaine.
Aussi, le nouveau projet tire parti des 6,7 ha du complexe en y proposant un ensemble de terrasses et une zone arborée et plantée d’espèces végétales locales – des orchidées endémiques – qui s’avère un formidable space de loisirs pour tous les riverains. Surtout, l’ensemble du complexe est libre d’accès durant toute la journée, sans nécessité d’adhésion à un club. Enfin, un circuit de un kilomètre a été tracé sur tout son pourtour pour les amateurs de running qui profiteront dans le même temps de la vue sur la chaîne des Puys qu’offre le site.


Aréna du pays d’Aix-en-Provence

Vue nocturne de l’aréna

La Métropole Aix-Marseille-Provence et la Ville d’Aix-en-Provence ont souhaité se doter d’un véritable
palais des sports, de façon à pouvoir organiser dans les meilleures conditions des compétitions sportives indoor de niveau national et international, ainsi que des événements, spectacles ou concerts. À ce titre, l’Arena accueille en résidence le Pauc (Pays d’Aix Université Club) Handball qui évolue en Ligue nationale.
Cet équipement hautement modulable, situé au sud d’Aix-en-Provence, à Luynes, en bordure de l’autoroute Aix-Marseille, comporte un « chaudron » pouvant accueillir de 6 000 à 8 500 spectateurs et une salle annexe dont la capacité varie entre 1 000 et 2 000 places. En outre, le dispositif est équipé d’un pôle d’échange multimodal pour bus et cars, assurant une desserte efficace à l’équipement, ainsi qu’à la zone d’activités des Milles voisine.
Le projet imaginé par Auer Weber, en collaboration avec Christophe Gulizzi, est fondé sur l’identité territoriale comme élément narratif, s’inscrivant avec retenue dans un ensemble qu’il vient compléter.
La façade est pour l’essentiel constituée de bandes d’aluminium disposées les unes sur les autres, formant un jeu visuel de strates. Seule, au niveau du rez-dechaussée, une discrète ceinture vitrée assure un apport en lumière naturelle aux espaces communs d’accès et une ouverture sur le site.
Cette enveloppe réagit aux conditions du lieu : en direction de la place principale, les anneaux flottent horizontalement de manière bien plus prononcée que de l’autre côté du bâtiment, créant une projection en direction des spectateurs entrant dans l’arène.
À l’intérieur, l’atmosphère est régie par un traitement bichromie généré par la nature des matériaux : une large présence d’un béton – nu – gris clair pour une majorité de parois, une résine blanche au sol et un plafond métallique – structure porteuse comprise – peint en noir, qui assure une gestion optimale de la lumière dans les salles.

(…)

Textes Olivier Reneau
Photos Aldo Amoretti

Retrouvez l’intégralité du Hors Série sur Auer Weber en libriaires spécialisées et au sein du daté septembre-cotobre 2021 pour les abonnés