DOSSIER SOCIÉTAL

CITÉS-JARDINS : DU MODE DE VIE À L’ART DE VIVRE

Trouvant leur origine dans les théories du mouvement moderne initiée par Ebenezer Howard et Raymond Unwin, au début du XXe siècle en Angleterre, les cités-jardins restent un modèle pour la fabrique de la ville contemporaine. Les constructions nouvelles qui s’en inspirent reprennent du galon, tandis que le patrimoine existant est paradoxalement parfois en péril.

« Il faut densifier intelligemment, fabriquer les cités-jardins du XXIe siècle. Une cité-jardin mixte, avec un parc, des squares, et qui prenne en compte la ville dite “du quart d’heure”, où une variété de fonctions sont accessibles à moins d’un kilomètre. » Ainsi s’exprimait l’architecte Brigitte Métra le 2 juillet dernier, dans le cadre d’un débat à la Cité de l’architecture et du patrimoine de Paris. L’intervention s’inscrivait dans un cycle de conférences invitant les architectes à envisager de nouvelles « perspectives du monde à construire, face aux défis d’aujourd’hui ».

Ainsi, les valeurs et les modes de conception de la ville imaginés au XIXe siècle en Angleterre par l’urbaniste Ebenezer Howard et l’architecte Raymond Unwin, puis mis en pratique dans les années 1930 en région parisienne par l’homme politique Henri Sellier et le juriste et journaliste Georges Benoit-Lévy constituent des références toujours inspirantes pour un aménagement urbain de qualité. Cette source d’inspiration s’avère d’autant plus forte aujourd’hui que la situation sanitaire liée à la covid-19 a amené de nouvelles façons d’appréhender nos modes d’habitat, notre relation au travail et à la ville. Il est tentant de jouer avec les mots : parce qu’elles participent de l’image que nous nous faisons de la ville au quotidien, parce qu’elles ont de fortes vertus écologiques, les cités-jardins, dans leur architecture, dans leur capacité à bien articuler la ville et les quartiers, reconnues par ceux qui les habitent, méritent d’être cultivées.

La Maladrerie, Renée Gailhoustet,
1995 © Sophie Trelcat

Un chemin semé d’embûches

Cette volonté de reconsidérer le modèle – en réactivant le patrimoine existant ou en édifiant de nouvelles formes – pointe des situations parfois paradoxales : la Cité-jardin de la Butte-Rouge à Châtenay-Malabry, toujours étonnamment moderne, en est l’exemple parfait. D’avril à juillet 2020, différents articles publiés dans la presse quotidienne française annonçaient le malheureux projet de démolition de 85 % de l’opération.

Les 3 900 « Habitations à bon marché » de la Butte-Rouge, édifiées à partir de 1931, sont implantées dans un écrin de verdure de 70 hectares. Construit par l’équipe d’architectes Joseph Bassompierre, Paul de Rutté et André Arfvidson (qui sera remplacé par Paul Sirvin), accompagnée du paysagiste André Riousse, l’ensemble n’a plus à prouver sa qualité de vie : appartements traversants dotés de beaux balcons arrondis, fenêtres d’angle, matériaux sains et pérennes – comme des boiseries et parquets –, jardins familiaux et potagers, cheminements piétonniers, ainsi que de nombreux équipements collectifs. Quelques zooms sur le site service de cartographie en ligne Google Maps suffisent à saisir les grandes qualités du lieu plébiscitées par ses habitants.

La Butte-Rouge est ainsi inscrite depuis 1990 à l’inventaire du patrimoine du XXe siècle. Hélas, cette protection reste sans portée juridique. L’annonce de la future destruction a suscité de vives protestations et entraîné la mobilisation d’éminentes personnalités telles que l’historien de l’architecture Jean-Louis Cohen et encore le très médiatique Stéphane Bern, responsable de la sauvegarde et du développement du patrimoine français dans toute sa diversité. (…)

Texte Sophie Trelcat
Visuel à la une Les 3900 habitations à bon marché de la Butte-Rouge, 1931 © Barbara Gutglas

Retrouvez l’intégralité de l’article de Sophie Trelcat sur les Cités-Jardins : Du mode de vie à l’art de vivre dans le daté novembre – décembre d’Archistorm