RÉALISATION

BROSSY & ASSOCIÉS

 

La restructuration du Théâtre national de Chaillot par l’agence Brossy & associés est une nouvelle étape dans la vie d’un palais qui, depuis 1878, a déjà connu plusieurs métamorphoses. Conçu à l’origine comme une simple opération de mise aux normes, le projet s’apparente finalement à une réinvention, à une aventure souterraine où l’histoire et la création travaillent de concert à la cohérence d’un ensemble monumental.

 

Tantôt rhabillé, tantôt modernisé de l’intérieur, le palais de Chaillot, tel que le visiteur peut aujourd’hui le visiter en parcourant l’aile Paris située au nord[1], est un bel exemple d’architecture stratifiée, un étonnant concentré au sein duquel se lisent très distinctement trois phases d’intervention : celle de 2007, dirigée par Jean-François Bodin avec la création de la Cité de l’architecture et du patrimoine ; celle de 1937 (Carlu, Boileau et Azéma), qui a donné au palais sa physionomie générale ; enfin celle de 1878 (Davioud et Bourdais), qui marque la création, sur la colline de Chaillot, du premier édifice parisien de grande échelle. Au cœur de ce palais, entre l’aile Paris et l’aile Passy, un superbe vide : le parvis des Droits de l’homme, une esplanade née de la démolition de l’immense salle de musique du néo-mauresque Trocadéro. Ce belvédère sur la tour Eiffel coiffe également un trésor souterrain, le Théâtre national qui, à son ouverture en 1937, clôturait en beauté deux décennies de rénovation scénique et de débat sur la synthèse des arts.

 

Telle une poupée russe, le palais de Chaillot renferme de fait plusieurs monuments en son sein ; et si la black box proposée par Vincent Brossy pour la nouvelle salle Firmin-Gémier rompt avec le paysage somptuaire qui l’environne, elle le révèle avec d’autant plus d’efficacité. Intervenant dans un lieu classé, prestigieux mais contraint, l’architecte a su convaincre ses interlocuteurs qu’une nouvelle page de l’histoire du palais de Chaillot pouvait s’écrire. Quatre-vingts ans après les frères Niermans, créateurs de la première salle de théâtre, un demi-siècle après les créateurs de la salle Gémier (De Mailly et Le Marquet), quarante ans après Fabre et Perrottet et leur ultramoderne salle Jean-Vilar, Vincent Brossy écrit non seulement le quatrième acte d’une histoire théâtrale, mais recentre également le palais tout entier. Pour cela, il lui a fallu démolir un peu, beaucoup creuser, créer des tunnels, en découvrir d’autres, restaurer des espaces existants mais jamais utilisés. Aussi cette opération peut-elle être vue comme le prélude à une rénovation complète du théâtre, laquelle passe par la restauration de ses espaces les plus prestigieux : le vestibule des quatre colonnes, le grand foyer et la galerie d’accès à l’orchestre qui sont, avec leurs peintures murales et leur mobilier, la quintessence de l’esprit 1937.

 

 

[1] L’aile Passy accueille le musée de la Marine et le musée de l’Homme.

Fiche Technique :

Maître d’ouvrage : Ministère de la Culture et de la Communication, direction générale de la création artistique.
Maître d’ouvrage délégué : Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (Oppic).
Maître d’œuvre (rénovation du théâtre) : Vincent Brossy, architecte ; Michel Fayet, scénographe ; Changement à vue, scénographie ; Alternative, acoustique et éclairage ; SAS Mizrahi, BET TCE, économiste ; CICAD consultants, ordonnancement, pilotage et coordination des études et des travaux.
Maîtrise d’œuvre (Monument historique) : Lionel Dubois, architecte en chef des Monuments historiques.
Entreprises (travaux Gémier) : Léon Grosse (gros œuvre étendu), Snef S2R Bernet (CVC, plomberie), Léon Grosse électricité (électricité, courants forts/faibles), Otis (ascenseurs), BC Caire (serrurerie et machinerie scéniques), Tech Audio (réseaux scéniques), DBS (staff), Ateliers Gohard (peinture décors).
Entreprises (création de l’accès décor provisoire salle Jean-Vilar) : Prodesign /SDEL/ Somen (cloisonnement, passerelle, travaux divers), Caire (plate-forme élévatrice), AMG Fechoz (fourniture et mise en œuvre d’un treuil et d’un chariot de transfert de décors).
Surface : environ 3OOO m².

Budget prévisionnel (tranche 1) : 21,5 M €

 

 

Texte : Simon Texier
Visuels : © Sergio Grazia

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