L’histoire du bureau d’études VP & Green témoigne de l’influence de la high tech britannique sur l’ingénierie française dans les années 1980.

Arrivé en France en 1989 à la demande de Francis Soler pour travailler sur le projet du Centre de conférences internationales, Nicholas Green y a apporté un regard technique nouveau. Formé à Londres chez le grand ingénieur Anthony Hunt, Green a su transposer dans le contexte et la culture technique français l’inventivité, le pragmatisme, l’ouverture à tous les matériaux et à l’innovation qui caractérisent les savoir-faire d’outre-Manche. La greffe a pris et il est resté dans son nouveau pays d’adoption, travaillant avec Deslaugiers, Calatrava, Vasconi, Arep et d’autres. Après avoir collaboré sur plusieurs projets avec l’agence Valode et Pistre, il a fondé en 2001 avec ceux-ci VP & Green ingénierie. Il s’agissait non seulement de continuer à accompagner ces architectes dans leur conception technique – au point de partager en partie des locaux – mais aussi et surtout de développer une compétence particulière, assez rare en France, à même de servir au mieux les projets d’autres architectes. Aussi leur travail se caractérise-t-il par un suivi très précis et très impliqué de l’équipe de maîtrise d’oeuvre, pour bien comprendre les intentions sous-jacentes du projet, explorer les diverses solutions et options, les arbitrer en fonction des contraintes techniques, réglementaires, financières, opérationnelles pour que la conception technique s’intègre harmonieusement à l’architecture, qu’elle fasse pour ainsi dire corps avec elle. C’est dire que le travail d’ingénierie y est un travail de conception et de création à part entière, tout en couvrant si besoin l’ensemble du processus, de l’avant-projet à l’exécution et au chantier. Cette connivence avec les architectes, qui se double aussi d’une grande confiance accordée par les donneurs d’ordre, leur a permis de développer une grande liberté de pensée au service de l’architecture. L’équipe s’est pour cela structurée avec deux grands départements, « Structure » sous la responsabilité de Francesca Bartera, et « Façade », piloté par Thomas Souchon, avec souvent l’intégration des deux domaines dans un projet donné. La solide expérience acquise par VP & Green lui permet d’être aujourd’hui présent sur de nombreux marchés à l’étranger et d’y déployer avec succès son savoir-faire et son engagement.

Qualifier, de l’objet au projet

Le bureau d’études VP & GREEN travaille à la fois sur les structures et sur les façades, et si possible sur les deux. Cette approche complémentaire, souvent imbriquée dans nombre de réalisations, permet de qualifier les projets élaborés par les architectes : donner du sens à la construction de l’édifice par la mise en lumière de ce qui en constitue l’ossature ; rendre visible l’architecture par le traitement de son enveloppe. Mais au-delà des apparences, c’est aussi le rapport entre l’intérieur et l’extérieur, la maitrise savante de la lumière naturelle et des transparences, le contrôle des ambiances naturelles que cherche à maîtriser VP & Green. Et ce n’est pas un hasard si les plus grands architectes viennent en chercher l’expertise, pour précisément régler ce subtil rapport entre les formes et les forces, entre la peau et les os qui justement donne chair à l’architecture. Comment contribuer à faire d’un objet dessiné un projet construit, avec toute sa puissance d’expression ? Là se situe la mission de l’ingénieur : celle de se glisser dans les interstices du projet pour lui apporter une matérialité qui le fait advenir.

Tour InCity, Lyon
Architecte : Valode & Pistre Architectes ; MOA : Sogelym Dixence
Photo : Julien Lanoo

S’affranchir des portés

L’architecture commence par l’abri, le toit, la protection, et, à mesure que se sont étendus son registre d’action et ses codes savants, la libération des espaces couverts  est devenue l’une de ses possibilités. Cette condition de l’affranchissement des obstacles visuels ou tout simplement physiques est pour certains types de projets une exigence fondamentale. C’est là que la science de l’ingénieur, qui cherche à combiner l’accroissement des portées avec le bon usage de la matière savamment distribuée rencontre le dessein de l’architecte. Tantôt il s’agit tout simplement de franchir et l’enjeu est de marier l’art des ponts ou des passerelles avec le bâtiment, tantôt il s’agit de libérer le sol en dématérialisant ce qui porte la toiture, et en reléguant la structure dans un plénum qui règne au-dessus des grands espaces libres. C’est là que réside une partie du savoir-faire de VP & Green, dans cet art de combiner les formes structurelles canoniques avec la finesse des éléments pour faire oublier la présence de la couverture.

Parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, Pavillon 6
Architecte : Valode & Pistre Architectes ; MOA : UNIBAIL / VIPARIS
Le auvent et ses pendrillons

Protéger : Filtrer le soleil

Du soleil on connaît les bienfaits mais aussi les excès. La conception de bâtiments qui intègrent d’une manière presque basique la protection des effets du soleil est devenue une exigence dans l’architecture contemporaine. Mais l’intégration dans les façades d’éléments susceptibles de contrôler les apports solaires va beaucoup plus loin que l’antique corniche. C’est désormais un moyen d’animer et de qualifier les façades, de marier avec le verre qui apporte transparence et lumière d’autres matières qui habillent l’édifice et dessinent des graphismes inédits sur les façades. Au-delà du dessin, c’est bien l’incorporation de ces éléments de protection dans la fonctionnalité et dans l’esthétique des façades que se situe le travail du BET Façades, un rôle que VP & Green aime particulièrement endosser, qui définit le passage de l’épure à la mise en oeuvre réalisée par le façadier ou l’entreprise de construction. Et ce jeu avec la lumière apporte sa part de surprises, d’effets inédits ou aléatoires, où la protection accessoire devient l’écriture même du bâtiment.

Neurospin à Saclay
Architecte : Atelier Marc Barani ; MOA : Université côte d’Azur

Couvrir : courbes et lumière

Les outils de conception contemporains nous donnent désormais accès à de nouvelles familles de formes, aux courbes affirmées, aux rondeurs plus douces, aux mouvements ondulatoires. Cette dynamique nouvelle exige cependant de passer le difficile examen de la transformation de formes géométriques définies par la main du concepteur et la modélisation permise par la machine à la réalité construite. C’est là que la notion de constructibilité, à la fois technique, économique et humaine, intervient. À charge pour le bureau d’études de pétrir ces formes pour les transformer en matérialité. Et dans ce type de bâtiments, la distinction entre charpente, façade et couverture s’estompe souvent au profit d’un continuum qui ne fait certes pas disparaître la différence entre éléments portants et éléments portés mais où la forme courbe ou plissée assujettit la matière tout en lui donnant de nouvelles capacités de résistance. C’est cet art de la maîtrise du constructible que développe VP & Green, avec l’attention au fait que la solution technique doit toujours rester conforme à l’expression architecturale.

Fondation Seydoux-Pathé, Paris
Architecte : Renzo Piano Building Workshop ; MOA : Fondation Jérôme Seydoux-Pathé
Photo : Michel Denancé

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Texte : Bertrand Lemoine

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