RÉALISATIONS

ATELIERS 2/ 3/ 4/

 

À rebours d’une architecture gesticulante, Olivier Arène fait l’éloge de la simplicité. Pour illustrer son propos, il convoque volontiers le nouveau siège du Groupe Le Duff situé aux portes de la métropole rennaise. L’architecte, associé de l’agence parisienne Ateliers 2/3/4/, a en effet pensé ce projet à partir d’un minimum de détails. L’ambition était d’assurer avant tout la plus belle sophistication.

 

Dans la ligne de mire, un adversaire. Beau, séduisant, un brin trompeur. Olivier Arène ne vise ici personne mais pointe « le totalitarisme de l’image ». « Il fut un temps, dans ma carrière, où je militais pour qu’on n’exige, lors de concours, que les plans et les coupes nécessaires à la bonne compréhension du projet architectural et qu’on interdise tout autre document graphique ; les façades, après tout, ne sont pas ce qui importe le plus », affirme-t-il. Les perspectives aussi brillantes qu’alléchantes détournent en effet tout commanditaire des véritables enjeux d’un projet ; l’architecture est, avant tout, question d’espaces. « Un bâtiment s’explique et se partage. Un bon maître d’œuvre est celui qui fait admettre que les choix faits sont les bons », assure-t-il. Le siège du Groupe Le Duff imaginé par 2/3/4/, avant d’être un exercice de représentation, était bel et bien un défi d’organisation. L’affaire se jouait par conséquent en plans plus qu’en images. « Je suis en résistance et m’inscris en faux contre l’idée que l’architecture doit séduire. C’est lui faire un mauvais coup que de penser ainsi, en plus de réduire le rôle de maître d’œuvre aux arbitrages plastiques et au choix des matériaux et des couleurs. J’ai, de fait, du mal à me définir en tant qu’architecte. J’ai même la plus grande difficulté à utiliser ce mot si mal employé. Je préfère avancer que j’agis en tant que bâtisseur », revendique Olivier Arène. Il n’en fallait sans doute pas moins pour convaincre cet autre bâtisseur, celui d’un empire économique cette fois-ci, Louis Le Duff. Qui plus est, à ces paroles convaincantes, s’ajoutait un projet concluant. Sur la table, le dessein, sans ambages, se montrait aussi efficace que pertinent : posées l’une sur l’autre, deux équerres devaient embrasser le paysage de la métropole d’un côté et celui du bocage du Pays de Rennes, de l’autre.

Ce n’était pourtant que la deuxième fois qu’Olivier Arène se frottait à l’exercice tertiaire. En guise de seule référence, l’architecte présentait un remarquable ensemble de 17 000 m² à Nantes : l’immeuble Skyline. « Je m’étais fait peur en dessinant ce premier projet de bureaux. Nous devions alors travailler une économie de moyens ; nous avons répété huit cents fois la même fenêtre et donc le même détail », précise-t-il. La simplicité du parti imaginé fut gage de succès. Le siège social du Groupe Le Duff se réclame d’une même parenté. « Ma position est claire : je suis contre l’architecture bavarde. Elle se révèle aussi complexe qu’éphémère. J’ai fait mes armes à partir d’un enseignement qui nous inculquait la pertinence, la permanence et la pérennité », souligne Olivier Arène. Voilà de quoi se conformer à une nouvelle réalité économique appelant la renaissance d’une certaine radicalité. « Ce terme reste excessif », reprend l’homme de l’art qui assure toutefois « être obsédé par la répétition ». « Elle permet en effet la sophistication autant qu’elle offre la plus grande liberté », dit-il. Quoi qu’il en soit, « le radicalisme peut être aussi la manière de promouvoir facilement des solutions simples en plus d’assurer la plus grande qualité ». Bref, le mot fait encore peur, mais ce qu’il porte fait mouche. Ce, d’autant plus que la promotion immobilière – surtout en matière de bureaux – reste friande de standards et de normes : une affaire, sans doute, de sécurité financière. Pour Olivier Arène, élevé aux concours et plus habitué aux commandes publiques, l’optique devait changer sans, pour autant, que l’esprit militant jamais ne cède. « Jeune, je ne me serais à aucun prix marié avec une entreprise de construction. Depuis, j’ai accumulé nombre d’expériences et je note, aujourd’hui, un changement de mentalité. Les majors du BTP peuvent se montrer en capacité de protéger les architectes. Les relations se font dès lors plus saines qu’elles n’avaient pu l’être auparavant », explique-t-il. D’autant plus saines que dans le cas du siège du Groupe Le Duff, la maîtrise d’ouvrage déléguée était une filiale de Bouygues et que les enjeux contractuels ne sont donc pas venus nuire à la bonne réalisation du projet.

 

©Juan Sepulveda

 

Fiche technique : 

Maître d´ouvrage : Linkcity Grand Ouest

Maître d´œuvre : Ateliers 2/3/4/

Entreprise générale (mandataire) : Bouygues Construction Grand Ouest

Surface construite : 8 932 m²

Coût des travaux : 19 M€ HT

 

 

Texte : Jean-Philippe Hugron

Visuel : ©Jean Sepulveda

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