ARCHI 2000

 

 

À l’approche, nichées en lisière du bois de La Cambre à Bruxelles, des petites constructions de briques et sans étage de l’époque industrielle, aux toits de zinc et aux linteaux métalliques, apparaissent en contrebas d’une cour pavée ancienne. L’agence est forcément là : des lieux modestes, énigmatiques et « bourrés » d’âme !

 

 

À quel usage était autrefois destinée cette succession de trois petits quadrilatères ? Difficile d’en avoir le cœur net de prime abord. Une porte d’entrée sobre, pérenne et des fenêtres vitrées plein « pot » en bandeaux verticaux constituent un ensemble d’ouvertures généreuses, assurant les porosités avec l’extérieur d’un hall d’accueil vaste et tout blanc, archi lumineux ! La porte franchie, nous tombons directement sur de mini-maquettes d’architecture de conséquents projets, créant un jeu d’échelle ; puis sur Tintin, sa fusée et le capitaine Haddock !  D’emblée, tous les ingrédients indiquent qu’il s’agit bien d’une agence d’architecture belge, solide et bien ancrée, où l’humour préservé est érigé en valeur fondamentale. L’accueil est chaleureux : la poignée de main, le regard franc et l’expression souriante ! Les meubles de bureaux ont une taille bien plus grande que ceux des ateliers parisiens (que faisons-nous à Paris ?) !

 

 

De quelle manière Philippe Verdussen, le fondateur, et son associé, Thierry Descheemaecker, développent-ils leurs projets avec leur équipe constituée d’une quarantaine de collaborateurs aux origines cosmopolites, et ce au milieu des arbres ? Avec une part de sérénité.

 

L’agence aura 30 ans d’âge l’année prochaine. Sa date de création en 1990 et son nom Archi 2000 renvoient à toute une génération, celle qui a commencé d’exercer à l’aube de l’an 2000. Bien évidemment, il en découle un esprit futuriste. Et à l’âge de la maturité, bientôt 30 ans, cette agence maintient pourtant une moyenne d’âge proche des 30 ans : les équipes sont jeunes ! Pour autant, peu de turnover : ici on préfère capitaliser sur le temps long et les architectes répondent à cette exigence avec fidélité ! Mieux vaut maîtriser son outil pour faire face à la rapidité sans cesse accrue du monde d’aujourd’hui, dans une confrontation de plus en plus aiguë entre le temps d’édifier et l’instantanéité imposée par l’IA ! Dixit les cinq ans de reconstruction annoncés d’une certaine cathédrale, actualité française symptomatique de notre époque, digression édifiante, et bien qu’ici nous soyons en plein Bruxelles !

 

 

Rapidement, après avoir débuté par un petit projet dans un cadre privé, Philippe Verdussen, bientôt rejoint par son associé, s’était vu confier, par les autorités, d’importantes opérations d’immeubles de bureaux dans le quartier européen : Bruxelles, capitale de l’Europe, avait besoin de se doter d’un outil. Puis est venu le temps du logement. Et finalement, l’histoire de l’agence reflète assez justement l’histoire de la ville.

 

Ici, dans une démarche résolument contextuelle, on n’hésite pas à confronter la mémoire et l’air du temps, et dans une rationalité évidente, à réinjecter ordre et logique par la rigueur de la trame ! Pour preuve : la ruche urbaine que les architectes créent en réhabilitant l’entrepôt Royal et la Succursale de Bruxelles (projet de 60 000 m2 « Tour et Taxis ») ou bien en démarrant bientôt le chantier dans le quartier Léopold d’un immeuble R+9 à ossature bois et ce, dans une démarche très écologique, ou bien, encore, en convertissant des bureaux en logements ! Le calme belge n’empêche en rien d’être dans le « move » !

 

 

Bien évidemment, l’agence s’est adaptée aux exigences les plus pointues de la maquette numérique (BIM). Lorsque l’on œuvre pour de grandes maîtrises d’ouvrage (AG Real Estate, Development, Immobel, Besix, Axa, etc.), il est hors de question de laisser passer un seul train ! L’agence est organisée en trois départements : celui de l’esquisse, de l’avant-projet, de la conception, puis celui des permis de construire apte à gérer tous les arcanes administratifs, puis, le pôle adjudication, exécution et chantier. L’agence revendique l’esprit d’agilité qui s’appuie sur un socle de valeurs, et cette capacité à pouvoir réaliser ce qu’elle conçoit. Son leitmotiv ?  Vouloir faire de l’architecture, point. Cela vient à pic puisque les institutions belges s’attachent à protéger le statut de ce magnifique et fascinant métier.

 

Mais au fait, aux origines et finalement, à quelle destination étaient voués les locaux de l’agence ?

 

 

C’est dans ses entrailles, dans son sous-sol vouté de briques, que vous trouverez la réponse. La planche des plans d’origine y est accrochée, plans datant d’il y a environ 150 ans, du numéro 4 de l’avenue Vivier-d’Oie : ceux de l’ancienne machine hydraulique du Bois de la Cambre, pompant l’eau du lac Robinson tout proche, pour alimenter les plantations du bois et la fameuse avenue Louise tracée en 1847 pour relier le centre de Bruxelles au bois justement ! Cent ans passent puis la ville y installe au début des années 80 les écuries de sa police montée. Les anneaux des chevaux y sont encore visibles. Les strates de l’histoire dans un écrin végétal paisible, propice aujourd’hui à la création des équipes d’Archi 2000 qui s’ouvre progressivement à l’international ! Avec une première implantation prévue pour mi 2020 au Luxembourg où deux premiers dossiers importants sont signés.

 

Texte : Anne-Charlotte Depondt

Crédits photos : Michel Slomka

Retrouvez cet article au sein du numéro 101 du magazine Archistorm, disponible en kiosque.