1er prix ZoomFactor Architectes

Bruxelles ou le champ d’expérimentation des avant-gardes. La capitale belge s’est toujours montrée enthousiaste à l’égard de la nouveauté, laquelle a trouvé ses expressions dans la grande échelle de projets imposants ou dans la petite échelle de constructions domestiques. Dans la banlieue, Uccle offre, dans cet esprit, un paysage composé de la plus belle variété d’expressions architecturales. Renouvelant cet appétit pour la contemporanéité, un projet de deux maisons individuelles mitoyennes est l’occasion par sa volumétrie et sa matérialité de réinterpréter quelques formes archétypales du tissu pavillonnaire traditionnel.

Implanté dans un terrain en pente à la végétation dense, le projet conçu par l’agence parisienne ZoomFactor Architectes est motivé par une double volonté d’intégration urbaine et paysagère ; le terrain avait été jusqu’alors abandonné et, de fait, avait été envahi par la végétation.

« Le bâtiment a une façade sur rue raisonnable, cohérente avec les volumes des petites maisons environnantes, soulignent Louis Massonnet, gérant de l’agence et Basile Grange, architecte en charge du projet. Le faîtage désaxé des toitures et leur orientation variable accentuent l’effet de proximité formelle en apportant à la volumétrie générale une dimension hétéroclite, typique des centres-bourgs », expliquent-ils.

La forme s’évase à l’arrière. L’enjeu, aux yeux de Basile Grange, est « de laisser place à la vaste surface habitable souhaitée dont une partie est abritée dans un volume semi-enterré qui utilise la pente du terrain ».

Le niveau de sous-sol, non visible depuis la rue, se découvre ainsi depuis le jardin. Trois volumes implantés en damier s’appuient sur ce socle pour libérer des espaces extérieurs généreux.

Le système constructif choisi pour cette opération est mixte. Le socle partiellement enterré est en béton. Les niveaux hors-sols sont quant à eux réalisés en ossature bois. Si la base est traitée en enduit d’imperméabilité, les volumes présentent un revêtement unique en tuile de terre cuite mise en œuvre aussi bien en toiture qu’en façade.

« Ce choix répond à une volonté d’intégration à l’architecture locale composée principalement de bâtiments en briques », indiquent les architectes. Parmi le large spectre de produits, ils privilégient une tuile de terre cuite de couleur ocre rose. Ce revêtement fixé sur des tasseaux de bois se développe en toiture et se retourne sur les murs dans l’objectif « de faciliter la lecture des volumes depuis l’extérieur et d’accompagner le regard vers les arbres par les lignes horizontales depuis l’intérieur ».

« Avec ce matériau, nous apportons une écriture très pure des volumes dans une mise en œuvre exigeante et parfaitement maîtrisée. Nous voulons lire les volumes plus que la maison, cela répond à notre recherche de réinterprétation de la maison traditionnelle », précise Louis Massonnet. Pour atteindre cet objectif, les détails ont été poussés. Les chéneaux ont notamment été prévus pour être encastrés dans la toiture dans l’intention d’éviter la présence de gouttières et de descentes d’eaux pluviales. Le retournement de la tuile de la toiture en façade est dès lors traité sans aucune rupture. Les détails d’angles, constitués de pièces verticales en zinc, ont été travaillés dans l’épure d’un dessin exigeant.

© François Dantart

2ème prix MAGNUM architectes & urbanistes

Son nom est évocateur : la ZAC du Verger. Il témoigne d’un passé agricole marqué par des terres que Nantes a fini par conquérir. Cette expansion urbaine de la métropole régionale est aussi l’occasion de développer des projets exemplaires. Parmi eux, les douze maisons individuelles et les cinq logements intermédiaires en accession sociale conçus par MAGNUM architectes & urbanistes, agence locale, qui revendique « une approche sur mesure, délivrée de tout systématisme ».

À Carquefou, elle a eu soin d’inscrire ces logements dans l’histoire du lieu et même d’en préserver les traces. « Le projet mêle l’architecture au paysage », explique Bertrand

Aubry, architecte, associé fondateur de l’agence. « Préservant d’anciennes haies bocagères constituées de chênes têtards, le projet a été conçu comme un petit village organisé autour de sentes piétonnes, et d’un espace plus aéré aux allures de placette situé à la croisée des parcours piétons et véhicules ».

Ce parti pris répond aux prescriptions urb-aines et paysagères demandant à l’opération Flora Parc de former un trait d’union entre un site déjà urbanisé et un espace naturel d’importance.

Cette disposition harmonieuse privilégie dès lors des jardins, qui, orientés vers le sud, bénéficient d’un parfait ensoleillement. Elle permet aussi des cheminements naturellement ombragés le long des arbres existants. « Nous avons pensé les logements dans l’intimité des jardins. Elle est assurée par un dispositif paysager de haies, de plantes grimpantes, d’arbustes et de vivaces » poursuit-il.

« Ce contexte a très tôt orienté la réflexion sur les thèmes de la pérennité des habitations ou encore du détournement des codes de l’architecture résidentielle, plus particulièrement ceux de la maison individuelle. Dans cette perspective, le rapport au toit a été pensé pour donner à l’ensemble un caractère contemporain mais aussi iconique. L’idée d’une vêture originale à l’image d’une coque, qui habillerait l’ensemble des maisons, nous est apparue. Nous la voulions, dans une approche vertueuse, la plus pérenne possible en termes de matérialité ».

La tuile a logiquement été choisie. En terre cuite, elle a été réalisée à partir d’un grand moule et présente un aspect plat ainsi qu’une surface entièrement lisse. Ce sont ces caractéristiques que recherchait l’agence pour les utiliser aussi bien en toiture qu’en bardage. « Elle permet en effet un travail très précis pour traiter l’enchaînement toit/façade ainsi que les encadrements de baies avec un rendu le plus homogène et le plus dessiné possible, sans crochet comme avec l’ardoise » précise Bertrand Aubry.

Et logiquement, la teinte adoptée est « ardoisée », une couleur courante dans la région. « Ce choix est avant tout esthétique ; il assure l’homogénéité de l’ensemble. Ce coloris permet, en outre, une certaine sobriété. Les constructions n’en paraissent que plus monolithiques » ajoute l’architecte.

En résumé, ce projet sonne comme une démonstration. « La tuile est un matériau intemporel. C’est à nous, architectes, de lui donner un sens et une identité contemporaine par nos mises en œuvre » conclut Bertrand Aubry.

 

Texte : Jean-Philippe Hugron
Visuel : © Victor Grandgeorge

— Retrouvez l’intégralité du dossier dans le numéro spécial Terre d’architecture, Architecture et Terre Cuite, Grand Prix la Tuile Terre Cuite, Architendance 2022.