RÉALISATION

BRENAC & GONZALES & ASSOCIÉS

 

Le nouveau pôle administratif du CHU de Poitiers est un lieu de rencontres et d’interactions, bref une agora. Conçu pour Brenac & Gonzalez & Associés, l’édifice est l’occasion pour l’agence parisienne de dénoncer les codes convenus de l’immobilier tertiaire. Explications.

Brenac & Gonzalez. Le nom est souvent associé à un contexte urbain, dense et parisien… voire Grand-Parisien. L’agence consent toutefois à quelques sorties ici et là, en région. À Poitiers, par exemple, où le contexte se fait détonnant, tant et si bien d’ailleurs qu’il bouleverse toutes les habitudes. En effet, la parcelle promise lors du concours se positionnait au cœur d’un vaste CHU, plus encore sur un terrain situé aux limites de la ville. Par delà l’enceinte du centre hospitalier, champs et forêts dominent encore le paysage. « Dès la première visite de site, nous avons compris que nous devions composer avec un environnement magnifique », souligne Stefan Tuchila, architecte. Le crayon trace alors les contours d’un bâtiment qui serait « un geste souple ». L’homme de l’art évoque volontiers « délicatesse » et « sensualité » pour définir le parti pris adopté. In fine, tous, à l’agence, se sont accordés pour « poser » le nouveau centre administratif du CHU sur sa parcelle plutôt que de l’y enfoncer brutalement. « De fait, nous avons imaginé des surfaces courbes, un élément que nous avons sorti de notre vocabulaire, à force de travailler dans des contextes denses et urbains », précise l’architecte.

 

Le point fort du projet réside dans son esthétique certes, mais surtout dans la bonne gestion du programme. En réalité, il s’agissait de réunir en un seul point toutes les administrations dispersées sur l’ensemble du CHU. Le désir était de mutualiser les services mais aussi d’avoir la possibilité de se rencontrer, du moins, de se croiser. Le cahier des charges fixait donc, noir sur blanc, la réalisation d’un vaste hall en rez-de-jardin avec l’obligation d’y introduire un tant soit peu de végétation. À la lecture de cette demande raisonnée et raisonnable, Brenac & Gonzalez a fait le choix de dire non. Réellement ? Oui, et pour faire mieux : un atrium.

Le nouveau centre administratif du CHU ©Stefan Tuchila

 

Derrière la parcelle, débute la forêt. Voilà donc cette « végétation » qu’il fallait faire pénétrer au cœur de l’ensemble administratif. Bien plus grandiose et bien plus spectaculaire qu’une petite jardinière. Pour ce faire, l’agence parisienne a imaginé un cadrage monumental sur trois niveaux ! L’intention coupe le souffle d’un jury qui a, sans hésiter, retenu la belle proposition. « Tous les bureaux ont été placés dans deux corps de bâtiment en forme de peigne situés de part et d’autres du vide central. Tous sont reliés entre eux par des passerelles implantées de façon stratégique », souligne Stefan Tuchila. Ainsi, « tous les déplacements sont optimisés », assure-t-il. Cette finesse apportée au plan peut surprendre. Elle s’explique volontiers par la bonne connaissance de l’utilisateur. « Nous maîtrisons la conception de bureaux anonyme réalisé dans le cadre d’opération en blanc mais cette fois-ci l’usager nous était connu et nous pouvions dès lors être au plus près de ses demandes. Ils ont par conséquent un bâtiment autrement plus audacieux », reconnaît l’architecte.

 

Ce résultat intimement lié aux exigences d’une administration n’est-il toutefois pas trop individualisé ? Le sur-mesure n’est-il pas le risque d’une trop grande rigidité en vue d’un éventuel changement ? « Nous avons imaginé le système le plus flexible. Aujourd’hui les bureaux peuvent être, par exemple, aisément décloisonnés. Pour cela nous avons travaillé une trame de 1,20 mètre au lieu des 1,35 mètre habituel ainsi qu’une dalle active nous évitant l’installation contraignante de radiateurs dans tout le bâtiment », explique Stefan Tuchila. Pour l’agence Brenac & Gonzalez et associés, ce projet est une belle démonstration. Il illustre à lui seul l’intérêt – sinon la pertinence – d’aller bien au-delà des standards.

 

Texte : Jean-Philippe Hugron

Visuel à la une : ©Stefan Tuchila

 

Retrouvez cet article au sein d’ArchiSTORM #89