Visible depuis la rocade nord-ouest, le château industriel des Grands Moulins de Paris de Marquette-lez-Lille se dresse fièrement sur la plaine lilloise. Il offre à ses nouveaux résidents une vue imprenable sur la métropole et le témoignage précieux d’une ère industrielle révolue.

Entre Patrimoine et Modernité

Les Grands Moulins de Paris de Marquette-lez-Lille conservent des caractéristiques architecturales (volumétrie, structure, matérialité etc.) liées à l’activité passée et qui constituent la valeur patrimoniale du site. Le projet de reconversion s’appuie sur leur maintien pour perpétuer « l’esprit du lieu » et transmettre leur histoire. Ainsi, la tour culmine à 58 m et doit déterminer la hauteur maximale des constructions du projet. Les silos ronds en béton brut sont conservés tels quels.

Leur habillage métallique a disparu depuis longtemps, mais à l’intérieur de cette « cathédrale », les graffitis sont toujours présents et rappellent les années de déshérence.

Le moulin et le magasin, reliés par la passerelle, sont restaurés, tout comme le laboratoire, la boulangerie, l’habitation ou encore la chaufferie.

L’ensemble des matériaux : le béton, la brique et l’ardoise sont les témoins d’une technique constructive et d’un style. Le béton avait été employé pour la structure et la charpente, mais également pour le second œuvre et le décor. Il reste apparent, simplement peint en blanc. La brique avait permis de dresser rapidement l’édifice.

Comme souvent, elle avait servi aussi à produire les motifs des façades.

Dans le projet du Groupe MAES Architectes Urbanistes, les greffes contemporaines dialoguent avec la verticalité des bâtiments conservés et leur palette de matériaux, dans une réinterprétation contemporaine de volumétrie et de matière. Elles ne nuisent pas à la visibilité des Grands Moulins, mais au contraire, elles mettent en valeur les constructions historiques.

« Désertée et abandonnée pendant trente ans, l’ancienne minoterie des Grands Moulins de Paris est connue de tous dans la métropole lilloise, bien au-delà de Marquette-lez-Lille. Lieu emblématique de notre passé industriel et des mutations qu’a connues le territoire, le site reprend vie aujourd’hui sous nos yeux. Et c’est sans aucun doute grâce à un engagement collectif. Nous sommes particulièrement heureux de prendre part à cette métamorphose. Vilogia est un acteur historique de la métropole lilloise depuis près d’un siècle, et son identité est intimement liée à celle de son développement économique. »
Philippe Rémignon, président du directoire, Vilogia

Investir Moulins et Magasins

Les bâtiments « Moulins » et « Magasins », désignés ainsi en raison du nom de l’activité qu’ils abritaient autrefois, sont de même hauteur et de principes stylistiques homogènes (alternance de brique et de béton évoquant les « rouges barres »). Ils se distinguent tout de même par le nombre d’étages et la dimension de leurs châssis. De manière générale, ces deux ensembles n’ont pas subi de transformations, ni en élévation, ni en volume, qui nécessiteraient une restitution à l’état d’origine. Néanmoins, la couverture, les deux rangs de lucarnes, la charpente en bois des combles ainsi que la flèche de la tour sont dégradées et demandent une restauration complète. L’ensemble des façades, parement en brique et béton, est nettoyé par microgommage ; les joints sont dégarnis et rejointoyés au mortier de chaux.

Les lacunes du revêtement de brique sont complétées. Les ouvrages en béton (allèges, appuis, meneaux, traverses, linteaux, bandeaux, corniches, chéneaux ou encore rampants) sont, selon les besoins, purgés, les aciers passivés, réparés par ragréage au mortier de béton.

Les ouvrages trop endommagés sont remplacés à l’identique.

Des réouvertures de baies, ainsi que la restauration de celles endommagées en toiture, permettent à chaque appartement de profiter des grandes ouvertures de l’édifice. Les couvertures en ardoise fibrociment sont remplacées par des ardoises naturelles d’Espagne. Des trappes de désenfumage sont dissimulées en toiture tandis que des fenêtres de toit sont créées afin d’éclairer les chambres sous combles. La passerelle en béton qui relie les deux bâtiments est reconvertie, aménagée en salons, connectés aux cuisines des logements attenants qui se trouvent dans le corps du bâtiment. Les passerelles métalliques sont débarrassées de leurs planchers, conservées et restaurées : les fers sont brossés, passivés et recouverts d’une peinture effet rouille.

Le moulin et le magasin, reliés par la passerelle, sont restaurés, tout comme le laboratoire, la boulangerie, l’habitation ou encore la chaufferie.

L’ensemble des matériaux : le béton, la brique et l’ardoise sont les témoins d’une technique constructive et d’un style. Le béton avait été employé pour la structure et la charpente, mais également pour le second œuvre et le décor. Il reste apparent, simplement peint en blanc. La brique avait permis de dresser rapidement l’édifice.

Comme souvent, elle avait servi aussi à produire les motifs des façades.

Dans le projet du Groupe MAES Architectes Urbanistes, les greffes contemporaines dialoguent avec la verticalité des bâtiments conservés et leur palette de matériaux, dans une réinterprétation contemporaine de volumétrie et de matière. Elles ne nuisent pas à la visibilité des Grands Moulins, mais au contraire, elles mettent en valeur les constructions historiques.

(…)

Extraits d’interview

Hubert Maes, architecte et fondateur du Groupe MAES

Le site des Grands Moulins de Paris est démantelé au début des années 1990, puis fermé définitivement par la Mairie de Marquette-lez-Lille en 1996. Pour quelles raisons décidez-vous de vous engager pour sa sauvegarde ? De quelle manière parvenez-vous à convaincre de sa nécessité ?

L’implication du Groupe MAES dans l’accompagnement dans la durée du projet de « sauvetage » des Grands Moulins de Paris relève d’une autre conviction. Nous estimons qu’il revient aux architectes de contribuer aux scénarios de reconquête de sites patrimoniaux en déshérence, voire de les initier (en amont de toute commande), de fédérer des partenaires porteurs de la fibre patrimoniale (investisseurs, promoteurs, bailleurs, experts en ingénierie, financiers) pour les crédibiliser. Nous croyons à la mobilisation autour de projets patrimoniaux… toute « friche » (industrielle, artisanale, hospitalière, culturelle, ferroviaire…) constitue un héritage collectif, un socle identitaire. C’est tout le sens de notre présence durant ces années au côté du maire de Marquette-lez-Lille. Tout au long de son combat, nous avons été à la fois « avocats » et garants de la faisabilité opérationnelle en contribuant notamment à mobiliser les bons acteurs autour du projet.

Axelle Macardier, directrice grands projets, Histoire & Patrimoine

Histoire & Patrimoine est spécialisé dans la réhabilitation de sites à forte valeur patrimoniale et sur l’ensemble des sujets de réhabilitation en France. Sur quelles expériences récentes avez-vous pu vous appuyer pour appréhender le projet de restructuration des Grands Moulins de Paris de Marquette-lez-Lille ?

Histoire & Patrimoine est, depuis vingt-cinq ans, un groupe pionnier dans sa manière d’aborder les projets de réhabilitation. Composées de 200 collaborateurs passionnés, les équipes oeuvrent à la sauvegarde en concevant avec des partenaires experts des projets de logements atypiques. Des sujets de patrimoine industriel composent notre expérience. À Pantin, l’ancienne fabrique de sciure et l’ancienne usine Marchal font référence. À Elbeuf, l’ancienne manufacture Houiller ou l’usine Gasse et Canthelou ont reçu plusieurs prix. Tout comme la recomposition d’espaces de travail en logement lofts : le SITI, à Orléans-La Source. Nous contribuons, depuis de nombreuses années, à la réhabilitation de quartiers de ville entiers comme la Citadelle d’Arras couplée à la caserne Schramm, où notre groupe oeuvre depuis quinze ans maintenant.

Pascal Boulanger, président fondateur du Groupe Pascal Boulanger

Principalement implantée dansles Hauts-de-France et jusqu’à la côte d’Opale, Sigla Neuf, filiale du groupe Pascal Boulanger, est un promoteur immobilier régional dont l’activité couvre les secteurs du logement, de l’immobilier de bureaux, des parcs d’activités et de l’aménagement urbain. Sur quelles expériences récentes avez-vous pu vous appuyer pour porter le projet d’aménagement des Grands Moulins de Paris de Marquette-lez-Lille ?

Grâce à notre expérience de plus de vingt-cinq ans dans la promotion immobilière et avec l’appui de nos équipes pluridisciplinaires, nous avons été et sommes confrontés à de grands projets d’aménagement. Que ce soit sur la métropole lilloise et plus précisément sur Lille, Villeneuve-d’Ascq ou Roubaix par exemple avec le « Carré Saint-Jean » à proximité du coeur de ville, ou encore très récemment en Picardie, à Amiens, avec la reconversion du site du Courrier Picard en hypercentre qui mêle une fois de plus réhabilitation de monuments historiques et opération de promotion neuve, nos références sont nombreuses. Le projet des Grands Moulins de Paris est pour nous l’aboutissement d’un long travail de réflexion avec l’ensemble des parties prenantes, qu’elles soient publiques ou privées, pour participer au renouvellement urbain d’un quartier idéalement situé au bord de l’eau, à proximité immédiate de toutes commodités, et enfin à une encablure de l’hypercentre de Lille.

Fiche technique

Maîtrise d’ouvrage : Histoire & Patrimoine, Vilogia et Sigla Neuf
Maîtrise d’œuvre : MAES Architectes Urbanistes ; BET Moduo ; BET VRD Projex ; LAND Territoires et Paysages ; AXO
Entreprises (liste non exhaustive) : Nord France Constructions, FAYAT, GCC Hauts-de-France, Rabot Dutilleul Construction
Programme : logements, parc, restaurant, crèche
Surface : 32 600 m²
Coût : 50,4 M € HT
Livraison : décembre 2021 à juin 2022

Texte : Sophie Trelcat
Photos : Jonathan Alexandre

— retrouvez l’intégralité de la réalisation sur les Grands Moulins de Paris par MAES Architectes Urbanistes dans Archistorm 118 daté janvier – février 2023 !