LE ROYAL HAINAUT, SPA & RESORT HÔTEL

MAES Architectes Urbanistes

 

L’Hôpital Général de la Charité, aussi appelé Hôpital du Hainaut, ouvre ses portes en 1767 sous le règne de Louis XV. C’est en 2013 que sa réhabilitation par MAES Architectes Urbanistes débute. Tout l’enjeu réside alors dans la modernisation de ce bâti, dans le respect des lieux et de leur histoire. Pari gagné pour l’agence, qui livre, après près de dix ans de travaux et 52 000 m2 de surface rénovée, un complexe hôtelier de luxe, véritable joyau au cœur de l’agglomération valenciennoise.

 

C’est une opération magnifique qui se termine avec la livraison de l’hôtel, dernier élément de programme d’un ensemble bâti incroyable : quel regard portez-vous sur le chemin accompli sur les
plus de dix ans pendant lesquels vous vous êtes investi sur ce projet ?

 

HM : La première étincelle, nous concernant, date d’il y a plus de dix ans, 2008, date d’une rencontre avec Dominique Riquet, alors Maire de Valenciennes, nous incitant à nous intéresser au souhait de la Ville de voir reconvertir l’ancien hôpital du Hainaut en équipement hôtelier de prestige, à l’instar de ce que nous venions de parachever à Lille, l’Hôtel Hermitage Gantois.

 

Pour qu’un tel projet émerge, son portage politique est surdéterminant, qui plus est quand il repose sur une programmation mixte imbriquant du portage privé et public. Un tel projet est une œuvre collective. Elle ne peut se concrétiser que fondée sur une osmose, un respect et une confiance mutuels entre quatre acteurs majeurs : la Collectivité, la Conservation des Monuments Historiques, les porteurs de projet, la maîtrise d’œuvre, et bien entendu, au-delà des structures respectives, la qualité des hommes et des femmes impliqués.

 

 

Dix ans d’investissement certes, dix ans de continuité d’engagements partagés, de séquences juridiques, administratives, architecturales, patrimoniales, économiques, techniques, financières…

 

Ce projet a été en l’occurrence pour notre agence l’occasion d’initier une longue collaboration avec Xavier Lucas ; un amoureux, un amoureux sincère des lieux chargés d’histoire. Avec ce dernier, nous avons partagé cette phase, ces phases (les plus exaltantes pour des architectes), d’immersion, de compréhension, de découvertes des espaces, des sous-espaces, d’un tel site. Ensemble, nous avons répondu à l’appel à projet lancé par le Centre Hospitalier en 2011 avec la conviction de porter une réponse adaptée à une renaissance de ce site historique. Vint le temps du « diagnostic patrimonial » approfondi, le temps des échanges avec les historiens, les experts du patrimoine hospitalier ; échanges particulièrement enrichissants pour toute notre équipe. Le temps des échanges avec les inspecteurs du Ministère de la Culture soucieux de la préservation de l’intégrité de la lecture de l’édifice.

 

Sous la houlette d’un Conservateur des Monuments Historiques, Jacques Philippon, très impliqué sur le dossier, l’autorisation (à l’appui de maquettes, images d’insertion, croquis) a été obtenue en janvier 2012. Si la magie des lieux prévaut sur le programme, il est convenu qu’une programmation adaptée permet de leur redonner vie, de les sauvegarder, de les révéler.

 

 

Parallèlement, un lourd travail collaboratif de l’équipe projet élargie s’est mis en œuvre (Architecte en Chef des Monuments Historiques, ingénieurs structures, thermiciens, acousticiens, bureaux de contrôle…) autour de grandes priorités : limiter les modifications structurelles, gommer les contraintes fonctionnelles, cacher la complexité technique nécessaire à l’usage d’un équipement hôtelier et son interaction avec les programmations associées, user de techniques innovantes (notamment pour restituer les 11 000 m² de toiture d’origine dégradée depuis les bombardements de la Seconde Guerre Mondiale), intégrer les autoroutes de gaines et de câbles, creuser sous le niveau des fondations du XVIIIème siècle le bassin de nage de 22×10 mètres. En dehors de notre champ de compétence, s’est déroulé le temps des montages fiscaux, des agréments ministériels propres à ce type de réalisation mais qui ont fortement impacté le déroulement d’un tel dossier.

 

A l’échelle d’un projet de 38 000 m², des surprises structurelles sont inévitables : découverte de dégradations intérieures indétectables (résultant de bombes incendiaires durant la dernière guerre) nous obligeant à reconstituer des parties structurelles pour contourner les risques d’effondrement ; la flèche de la chapelle menaçant de s’effondrer…

 

Mais également l’occasion de découvertes somptueuses, notamment la mise à jour des peintures d’origine des parois de la chapelle, qui a donné lieu à une subvention spéciale de la DRAC. Dix ans de conduite d’un projet, avec ses complexités, ses écueils, inhérents à sa taille et à son contexte, symptomatiques des chantiers de cette envergure. Dix ans de travail collaboratif, générateur de rencontres passionnées, d’immersion dans une période historique et d’intégration à un environnement urbain.

 

 

A l’origine, il y a le souhait de Jean-Louis Borloo de rendre à la ville ce bâtiment et d’offrir à Valencienne l’hôtel très haut de gamme qui lui manquait. Très vite, vous devenez l’architecte en charge des trois éléments constituant le programme : quelles ont été les étapes de votre désignation, et comment l’équipe s’est-elle montée ?

 

HM : Cet édifice vieillissant perdait son intérêt en termes d’usage : son occupation étant partielle, le coût des charges de maintien du patrimoine était colossal pour le propriétaire d’alors, le Centre Hospitalier de Valenciennes. Le Tribunal de Grande Instance de la ville s’est alors montré intéressé par la surface rendue disponible, et envisageait d’y transférer ses locaux. Mais le coût de l’opération fut finalement dissuasif.

 

C’est bien la stratégie portée par Jean-Louis Borloo de voir émerger un équipement hôtelier d’exception au cœur de Valenciennes qui a conduit le Centre Hospitalier à solliciter auprès de trois équipes un appel à projet. Xavier Lucas s’est alors rapproché de nous dans le but de constituer une équipe et notre projet a finalement fait l’unanimité. Sa particularité résidait dans une architecture tout en transparence, accordant une grande importance scénographique à l’entrée de l’hôtel. Le parti pris d’externaliser le parking, afin de libérer la cour centrale de l’édifice, fut également décisif dans notre sélection.

 

La Conservation des Monuments Historiques a apprécié le parti-pris de permettre la préservation de l’unité de lieu, la réalisation, la conception d’un lobby cristallin, agrafé à une charpente métallique d’une grande finesse, d’un niveau enterré centralisant tous les équipements techniques (cuisines, SPA, etc…). Cet ensemble a été présenté auprès des instances du Ministère de la Culture comme étant une construction « réversible » : il y a en effet la possibilité de restituer demain le bâtiment d’origine, en abandonnant cette construction nouvelle accolée à l’édifice, sans en modifier la structure et en restant intacte.

 

Texte : Frédérique Renaudie et Hubert Maes

Crédits photos : Hôtel du Hainaut

Retrouvez l’intégralité de cet entretien dans le livre des éditions Archibooks dédié au projet.