La création d’un nouvel immeuble de bureaux sur l’avenue Aristide Briand, dans la continuité de la ZAC de la Vache Noire, est l’occasion de réinterroger l’identité du lieu et sa façon de qualifier ce qui s’y fait.

« La ZAC de la Vache Noire a complètement reconfiguré le quartier en y ajoutant un pôle de bureaux qui n’existait pas à Arcueil. Green Oak est l’acte final de ce projet urbain de longue haleine qui consistait à créer un pôle tertiaire de grande envergure dans un lieu plutôt déterminé par son identité de porte de Paris au commencement de la Nationale 20. »
Gautier Deremaux, directeur opérationnel de SADEV94

Le bâtiment simple et généreux de l’agence Mootz-Pelé ne donne pas, au premier abord, toutes les clés pour comprendre la configuration urbaine à laquelle il contribue. Point final d’une lente évolution, il peut tout aussi bien devenir le point de départ d’un regard analytique et rétroactif qui tentera de remonter le temps pour reconstituer les mécanismes qui composent l’écosystème urbain actuel.

Quel est ce tableau aujourd’hui ? Quelle est l’identité de ce pôle tertiaire de 120 000 m² en cours de création entre le carrefour de la Vache Noire et la nouvelle gare de Bagneux, terminus de la ligne 4 du métro, en attendant la ligne 15 dont la mise en service est prévue en 2025 ? Des immeubles de bureaux imposants bordent l’avenue qui quitte la Porte d’Orléans vers le sud de l’agglomération parisienne. Des bâtiments génériques, avec des murs-rideaux en verre, et dont le nombre est sur le point de franchir le seuil qui qualifie un quartier. À ce tableau en cours de finalisation, le dernier arrivé affiche sans ostentation ses aspirations durables.

Le bâtiment Mootz-Pelé est une structure mixte bois-béton avec des planchers et des murs en béton et une façade porteuse en bois. Le bâtiment est tout aussi massif que ceux qui l’entourent, mais grâce à ses loggias, il laisse entrapercevoir sa composition hybride.

Derrière la blancheur de la pâte de verre recyclée qui recouvre la façade, le visiteur découvre la chaleur du bois. Une chaleur qui n’est pas un décor ou un revêtement, puisque l’utilisation du bois est structurelle. Si l’emploi du bois n’est pas immédiatement visible de l’extérieur, sa présence est évidente de l’intérieur grâce à la série de poteaux en bois qui soutiennent le système de façade.

Le premier étage est à la fois un espace de réception et un espace de vie pour les 1 000 et quelques personnes appelées à travailler dans le bâtiment. La partie arrière du rez-de-chaussée est occupée par un système de livraison qui apporte chaque jour les repas des employés. Quelques places sont disponibles, mais la plupart des utilisateurs retourneront manger à leur étage dans les espaces cuisine qui seront aménagés par chaque occupant. Fini, la gigantesque cafétéria. Puisque le foyer veut concurrencer le bureau en tant que lieu d’activité professionnelle, le bureau est en droit de rivaliser avec le foyer en termes de domesticité et de chaleur de ces espaces. Cette atmosphère domestique sera le principal argument de vente pour les agents immobiliers qui s’efforceront de trouver des occupants dans un contexte de plus en plus concurrentiel.

Car aux immeubles vides d’à peine 25 ans s’ajoutent désormais les plateaux délaissés de La Défense. C’est principalement aux occupants de ces espaces peu attractifs que s’adresse Green Oak.

Aujourd’hui, une entreprise doit déployer des stratégies de séduction pour ses futurs collaborateurs. Un bâtiment comme celui conçu par Mootz-Pelé peut être un atout pour attirer les employés que l’on veut faire venir à soi. La question est de savoir si ce qui est mis en avant dans le cas de Green Oak a plus de chances de rester pertinent, et de dépasser le seuil fatidique de 25 ans qui est la durée moyenne des aménagements de bureaux. Plusieurs caractéristiques vont dans ce sens, la modularité en est une. Green Oak sera capable de changer sans nécessairement passer par une réhabilitation lourde.

Son système de façade est également son principal atout en termes de fonctionnalité et d’esthétique. L’honnêteté structurelle de l’utilisation du bois va à l’encontre du principe d’aménagement périssable dans le secteur de l’immobilier tertiaire. Sa façade est l’élément qui le protège de l’obsolescence. Comme dans le cas de certains bâtiments modernistes où les huisseries de bois sont la principale caractéristique de qualité, l’honnêteté structurelle de Green Oak peut devenir un gage de qualité que la deuxième génération d’occupants aura intérêt à préserver. Elle vient s’ajouter, et compléter l’ouverture du bâtiment sur l’avenue, et plus largement sur le grand paysage qu’il domine depuis ces huit étages. La vallée de la Bièvre, cette rivière couverte en voie de renaturalisation, est pour l’instant visible de presque tous les niveaux de l’immeuble. Si elle devait cesser de l’être un jour, Green Oak en garderait certainement le souvenir gravé dans le scintillement de sa façade en pâte de verre.

Extraits d’interview

Olivier Labadie, directeur général adjoint Commercialisation & Partenariats de Kaufman & Broad et Xavier Barbe, directeur de département Bureaux de Kaufman & Broad

Que représente Green Oak pour Kaufman & Broad ? Quels sont les projets que vous menez et qui reflètent les valeurs de votre entreprise aujourd’hui ?

Olivier Labadie : Green Oak représente l’engagement de Kaufman & Broad dans des processus de production plus vertueux et mieux adaptés à la lutte contre le réchauffement climatique. Cet immeuble en particulier incarne une maîtrise de la construction mixte bois et béton, ainsi qu’une volonté de se différencier de l’immobilier environnant en proposant des espaces extérieurs à chaque étage. L’expérience du confinement est venue renforcer l’intuition que nous avions du caractère essentiel de ces espaces extérieurs.

Xavier Barbe : Green Oak est une opération dont la livraison est certes intervenue en 2021 mais pour laquelle le montage et le développement des études remontent à 2016.

Aussi, Kaufman & Broad a su se mobiliser très tôt dans une démarche vertueuse en prenant en compte des procédés constructifs novateurs, pour lesquels des procédures de techniques expérimentales ont dû être mises en place dans les phases d’études et lors de la construction.

Par ailleurs, Kaufman & Broad est membre du Booster du Réemploi. A ce titre, Kaufman & Broad a très vite adhéré à la proposition de l’entreprise de construction de mettre en œuvre du faux-plancher en réemploi, et a su convaincre son investisseur de la pertinence d’une telle solution.

Enfin, l’immeuble Green Oak se caractérise par une exemplarité environnementale réelle avec l’obtention de nombreuses certifications telles que HQE niveau Excellent et EFFINERGIE+, BREEAM niveau Excellent, Biosourcé niveau II, E2C1, Well niveau Gold.

Erik Mootz, co-fondateur de MOOTZPELÉ Architecture

En façade, vous avez choisi de ne pas rendre l’utilisation du bois ostentatoire.

Cette question a fait l’objet d’un véritable débat au début du projet. Au moment de la conception, les élus nous incitaient à mettre l’accent sur l’utilisation du bois. Nous avons opté pour une solution qui tient compte de la taille du bâtiment et de son exposition au trafic automobile, et donc de l’usure qu’il aurait générée sur un bardage en bois apparent.

Seules les loggias permettent de voir l’utilisation structurelle du bois depuis la rue. D’autre part, le bois est apparent dans le bâtiment. La loggia fonctionne comme un arraché qui révèle l’intérieur de ce corps en laissant deviner la composition et la façon dont il est structuré.

Texte : Christophe Catsaros
Photos : Juan Jerez

— retrouvez le focus sur Green Oak dans Archistorm 119 daté mars – avril 2023 !