RÉALISATION

ATELIER FERRET ARCHITECTURE

 

Il a paru essentiel aux architectes, Pierre Ferret & Venezia Ferret-Massie, que cette rénovation redonne un souffle urbain au bâtiment qui apparaissait hier comme un vaisseau un peu austère, sans réelle interaction avec son environnement immédiat. Pendant tout le processus de conception, les architectes ont cherché à exploiter le potentiel d’urbanité de cette partie de l’édifice et à lui donner une présence élégante dans son quartier. Pour cela, il fallait commencer par retravailler sa base : un nouveau socle urbain, indispensable à l’échelle d’un bâtiment public de cette ampleur, qui accueille 2 500 personnes. Le nouveau parvis, réalisé par les services de Bordeaux Métropole, s’inscrit dans le cadre de la rénovation urbaine de l’ensemble des espaces publics entourant l’îlot Victor-Hugo. La nuit, un système de mise en lumière innovant par projection au travers de masques permet de souligner d’une manière très précise les arcs de béton. Les masques permettent une graduation de l’intensité lumineuse, de 30 % en pied d’arc à 100 % au sommet. Le palais révèle dans l’obscurité une silhouette légère et élancée. Ce système de projection rend la conception lumière flexible et évolutive. De nouveaux masques peuvent être fabriqués, permettant d’imaginer des scénographies urbaines exceptionnelles.

La requalification complète des coursives a fait naître une nouvelle relation entre le palais et la ville. L’idée a été de transformer ce lieu de passage, sans fonction particulière, en un lieu permettant de générer une animation urbaine. Le placement des espaces de restauration dans les coursives tisse un lien entre la vie du palais et celle du quartier. La coursive n’est plus seulement une circulation, mais un véritable espace de rencontre pendant et en dehors des matchs. Les longs comptoirs blancs rétro-éclairés créent une alchimie délicate entre l’élégante austérité du béton et un design intérieur vivant, soigneusement dessiné. La nuit, lorsque le palais des sports est en veille, la lecture du graphisme des comptoirs de la coursive transforme le bâtiment en une lanterne urbaine.

Comment parvenir à renvoyer aux habitants du vieux Bordeaux une image légère de cette structure ? Comment faire du palais des sports un bâtiment que l’on a envie de prendre le temps de contempler ? Ce questionnement a amené les architectes vers la certitude que sa trame structurelle avait un réel potentiel architectural qu’il fallait souligner d’une manière à la fois subtile et radicale, pour affirmer son identité.

Le processus conceptuel a consisté en quelque sorte à déshabiller le bâtiment. Toutes les cloisons présentes sur la coursive haute ont été déposées. L’intégralité des éléments nécessaires au fonctionnement des espaces buvettes a été intégrée au sein de comptoirs de 1,10 m de hauteur. Ouverts sur la coursive, sans arrière-bar, ils permettent de percevoir les arcs et la sous-face des gradins dans leur totalité. Tous les espaces sportifs nécessitant un cloisonnement ont été positionnés sous la coursive haute, permettant la démolition des planchers des deux coursives latérales qui sont devenues de vastes espaces de réception en double hauteur. La suppression de ces planchers est l’intervention qui souligne de la manière la plus radicale le squelette de béton. Juste après avoir pénétré dans l’édifice, ou bien en longeant ses façades latérales, on découvre les élégants portiques de béton armé mis à nu sur une hauteur de plus de 9 m. Leur rythme est souligné par des luminaires suspendus qui semblent flotter entre les arcs. Aucune cloison ni élément technique ne vient polluer ces nouvelles nefs de béton.

Passerelle

Le palais des sports est à présent une nouvelle salle emblématique dédiée à la pratique professionnelle du basket et du volleyball, notamment pour l’équipe des Jeunes de Saint-Augustin (JSA). Lors des rénovations précédentes, une structure bois avait été construite à environ 3,30 m du terrain d’origine pour surélever le plateau d’évolution, condamnant les trois premiers rangs de gradins. Une des interventions majeures a consisté à restituer au terrain de sport son niveau d’origine, en supprimant les espaces aveugles qui se trouvaient sous cette structure et en sortant de l’ombre le bas des gradins. Une tribune télescopique de 228 places permet de compléter cette jauge. Elle pourra être déployée lors des matchs de basket et volley professionnels et sera repliée en configuration handball. La jauge du palais des sports retrouve ainsi son ampleur d’origine et atteint 2 579 places.
La salle a été pensée comme un outil ultra performant. Le sol est constitué d’un plancher à double lambourdage en hêtre massif permettant une qualité d’amortissement et de rebond optimale. Le système d’éclairage intérieur de la salle est constitué de projecteurs avec réamorçage à chaud électronique. Ce système offre un faible éblouissement pour les sportifs, une qualité de lumière optimale pour le public et les retransmissions télé et la possibilité d’éteindre et d’allumer la salle de manière instantanée pour les « shows » des quarts-temps.

La venue d’équipes professionnelles induisait la problématique d’une possible exploitation du bâtiment. Les architectes ont proposé une composition intérieure mutualisant espaces de circulation et espaces de réception. Quatre vastes salons sont ainsi disponibles avant, pendant et après les matchs. Donnant sur le parvis, un premier salon de 160 m2 tisse un lien direct avec la ville. Sur les côtés, le salon Saint-James, 210 m2, et le salon Sainte-Catherine, 175 m2, offrent des espaces majestueux en double hauteur, avec vue sur le terrain. Donnant sur le salon Sainte-Catherine, le salon Victor-Hugo, 72 m2, pensé à partir d’essences fines d’érable, offre, lui, un lieu plus intimiste et feutré.

En restituant au bâtiment une lisibilité structurelle et fonctionnelle optimale, l’Atelier Ferret Architectures a permis son ouverture sur la ville (des trouées visuelles sur les diverses voies alentour sont ménagées dans l’ensemble des espaces). La beauté des grands arcs de béton des années 1960 est désormais pleinement visible et confère au palais des sports une majesté que des années d’abandon lui avaient ôtée. Passé et présent se conjuguent pour procurer aux sportifs, ainsi qu’à l’ensemble des publics, sans oublier les riverains, un confort et une appropriation accrus. Participant désormais pleinement de l’identité du quartier, l’édifice en devient un moteur majeur, destiné à lui octroyer un redevenir tant attendu.

Fiche technique :
Maître d’ouvrage : Ville de Bordeaux
Maîtrise d’œuvre : Atelier Ferret Architectures
BET, TEC : Ginger
Sécurité incendie : Casso & Associés
HQE : Oasiis
Économiste : SARL J.-P. Deloménie
Acousticien : Orféa
Menuiserie acier : Jansen
Tribune télescopique : Master Industrie
Lumières : Philips
Luminaires coursives : Viabizzuno
Surface : 6 000 m2 SHON

 

Texte : Delphine Costedoat
Visuels : © Julien Fernandez