Le KAP de l’Université Clermont Auvergne (UCA) à Clermont-Ferrand, inauguré en septembre 2024, est un lieu consacré aux ressources pour la formation des étudiants et au développement de nouveaux outils pédagogiques. Il abrite à la fois une bibliothèque  et des espaces polyvalents.

Une vision contemporaine de la transmission des connaissances

Le KAP, nouvelle figure de proue de l’Université Clermont Auvergne (UCA) à Clermont-Ferrand, dépasse la simple fonction de bibliothèque traditionnelle et constitue un lieu propice aux échanges, à l’apprentissage et à l’intégration des nouveaux modes de circulation des savoirs et des outils pédagogiques.

Le programme occupe à la fois une extension neuve et l’ancien bâtiment du laboratoire universitaire Magmas et Volcans, vacant depuis 2016. Construit entre 1957 et 1958 par les architectes auvergnats Lescher et Bosser, ce bâtiment, bien que représentatif de l’architecture de son époque, ne répondait plus aux normes contemporaines en matière de sécurité, d’accessibilité ou d’isolation thermique et nécessitait par conséquent une réhabilitation complète. Lorsque la question de son usage futur s’est posée, le choix d’une bibliothèque et d’un espace polyvalent s’est imposé.

Ce projet de réhabilitation et extension a été conçu pour répondre aux besoins actuels et incarne une vision contemporaine de la transmission des connaissances. L’ensemble multifonctionnel compte des espaces mutualisés entre la bibliothèque universitaire, un pôle d’orientation et d’insertion, des salles de formation, un studio de production numérique, un secteur administratif ainsi qu’un restaurant universitaire, autant d’équipements conçus pour répondre aux besoins des étudiants et enseignants-chercheurs du secteur.

La réalisation architecturale a été confiée à l’équipe composée des collaborateurs de l’agence Espagno Milani architectes associés, de l’agence BaaG, de l’entreprise GCC Auvergne ainsi que de plusieurs entreprises spécialisées. Le nouveau site a ouvert ses portes le 2 septembre 2024.

« Être dorénavant situés dans le KAP, au plus proche des étudiants qui fréquentent la BU et des enseignants des différentes composantes du centre-ville, nous a apporté une grande visibilité rendant l’équipe encore plus accessible à l’ensemble de la communauté universitaire. Les salles d’expérimentation pédagogique, le studio high-tech et la convivialité des salles de réunions et des espaces communs créent des conditions favorables à l’épanouissement professionnel. »
— Françoise Caira, Responsable du Pôle IPPA, Université Clermont Auvergne

« Entamé en 2019, le travail a reposé sur une implication forte des équipes de la BU. Sur tous les sujets transversaux aux différents services, les groupes de travail mis en place par la BU ont été ouverts aux collaborateurs de la direction de la Formation. Les actions préparatoires conduites peuvent être regroupées en quatre thématiques : collections, accueil et services, espaces et ressources humaines. »
— Fabrice Boyer, Directeur Bibliothèque & herbiers universitaires, Université Clermont Auvergne

Aménagement urbain et paysager

Le projet s’inscrit dans le cadre de la transformation urbaine du quartier Kessler-Rabanesse situé au sud de Clermont-Ferrand, entre le centre historique et le Quartier latin. La piétonnisation de la rue Kessler participe au dynamisme de la vie locale, et renforce les interactions entre les espaces publics et les activités environnantes.

La parcelle du KAP est délimitée par le boulevard François Mitterrand au nord, la rue Kessler à l’ouest, la rue Raynaud à l’est et la rue Ledru au sud. Elle s’inscrit dans un environnement institutionnel ponctué d’infrastructures universitaires et administratives : l’Institut d’Auvergne du Développement des Territoires (IADT), la présidence de l’UCA et le Rectorat au nord, la Maison des Sciences de l’Homme à l’est et enfin la Maison Internationale Universitaire au sud. Le site est donc implanté sur une parcelle dense et enclavée, ce qui a nécessité une importante réflexion liée à l’optimisation de l’espace et à l’intégration du nouvel ensemble dans l’environnement urbain.

Le projet d’insertion urbaine repose sur des exigences spécifiques en matière de visibilité et d’accessibilité. L’une des ambitions majeures du projet consiste à apporter une nouvelle dynamique au quartier, notamment en proposant un bâtiment animé et visible de jour comme de nuit. L’objectif de visibilité est ainsi atteint grâce à une façade signal orientée vers le boulevard François Mitterrand, dont la présence est renforcée par une perspective créée par l’inclinaison de la passerelle d’accès principale. Une seconde passerelle connecte le site à l’axe piéton du Quartier latin Kessler-Rabanesse.

La compacité du bâtiment permet de préserver un important espace libre au cœur de l’îlot, qui a ainsi pu être aménagé en jardin paysager, propice à la multiplication de connexions extérieures et à la création de lieux de détente. Les zones dégagées devant l’entrée et le jardin de la Présidence s’organisent autour d’espaces d’échange et de restauration. Un secteur plus arboré est installé au sud et le long de la limite est, de façon à créer une respiration verte supplémentaire en centre-ville, mais aussi à établir une relation fluide avec le jardin Lecoq, un parc emblématique du quartier. La passerelle principale et de larges baies vitrées ont été donc conçues pour marquer la présence du site dans le paysage urbain. Cette ouverture visuelle renforce l’idée d’un lieu dynamique, fréquenté non seulement par les étudiants, mais aussi par les habitants du quartier.

Existant et extension : dialogue et continuité

Le projet d’adaptation aux nouveaux usages met en avant le patrimoine architectural existant par un souci de continuité entre l’édifice d’origine et le nouveau bâtiment. L’ancien laboratoire mesure 65 mètres de long pour quatre niveaux, il est construit en léger retrait par rapport à la rue. Ses façades ont été conservées et restaurées, tout comme les planchers et la couverture. L’extension est implantée selon un débord d’environ 3 mètres par rapport au pignon existant afin de mettre en évidence l’intervention contemporaine.

Les proportions des deux bâtiments accolés sont équilibrées par le dessin de volumes similaires qui assurent une continuité visuelle. Il en découle une volumétrie simple, définie par trois typologies de façades adaptées aux expositions. Celles-ci résultent de la composition existante qui présente une trame verticale intégrant des baies superposées et des brise-soleil, un soubassement et un débord en couronnement. Les matériaux utilisés convoquent une même idée de minéralité, à savoir la pierre de parement et l’enduit pour la partie ancienne, le béton pour la partie nouvelle. Les éléments en béton matricé réalisés en partenariat avec l’entreprise Reckli habillent l’angle principal. Une résille métallique de teinte irisée étendue le long des façades change de couleur et d’opacité selon la luminosité. Conçue par modélisation informatique en 3D du bâtiment, cette résille est adaptée pour filtrer les rayons directs du soleil.

L’implantation de l’extension dans la continuité directe du bâtiment existant facilite à l’intérieur les liaisons fonctionnelles entre les deux parties. La compacité recherchée conduit à l’implantation de plateaux identiques et strictement alignés. La création d’un atrium à la jonction entre ces deux entités maintient l’uniformité des espaces intérieurs, et apporte de la lumière naturelle au cœur de l’édifice ainsi que sur l’ensemble des niveaux. En ce qui concerne les aspects structurels, des sections rectangulaires en béton permettent d’établir les liaisons et de créer des ouvertures. La structure a été renforcée par des dalles rigides et un ferraillage adapté afin de supporter le poids des livres.

Organisation interne et distribution des espaces

La distribution des espaces dans le bâtiment, entre la bibliothèque universitaire, les bureaux, le Crous et les studios, a été guidée par plusieurs considérations essentielles, qui relèvent des besoins de fonctionnalité, de lisibilité et de qualité de l’expérience utilisateur.

En face de la percée visuelle insérée entre les bâtiments de l’IADT et de la Présidence, une grande baie offre depuis l’espace public une vue sur le volume du hall, laisse apercevoir l’animation intérieure du centre et invite à pénétrer au sein de l’édifice. Les services d’accueil implantés dans la continuité directe des axes d’entrées facilitent l’accès et la fluidité des échanges entre les différents espaces du KAP et de son environnement immédiat. Les diverses composantes, qu’il s’agisse de la consultation, de la formation, de la médiation, ou encore des pôles d’ingénierie pédagogique et de production audiovisuelle, sont pensées pour fonctionner selon des temporalités indépendantes, reflétant la polyvalence et la complexité du site.

L’idée principale consistait effectivement à regrouper dans un seul et même lieu des fonctions diverses destinées à des publics aux besoins et aux usages variés, qu’il s’agisse des étudiants, des enseignants, des personnels administratifs, mais aussi de visiteurs occasionnels. Chacun est conduit à venir sur place à la recherche des services spécifiques : consulter des documents, se former, organiser des réunions ou préparer des supports pédagogiques, entre autres possibilités.

Cette logique de lisibilité a été traduite spatialement par une continuité visuelle et physique. Les espaces de circulation sont clairement définis, notam-
ment grâce aux traitements des sols et à l’ajout de faux plafonds établis afin de guider naturellement les usagers dans leur déambulation à travers le bâtiment et vers leur destination. Le parcours fluide et ininterrompu qui illustre le principe de promenade architecturale se dessine ainsi dès le hall d’entrée, à partir duquel un accès direct descend vers le Crous pour la restauration, tandis qu’un escalier conduit vers les espaces de documentation, de formation et les studios. Au rez-de-chaussée, un auditorium ouvert est aménagé pour accueillir des conférences ou des débats.

De plus, l’attention portée à la transparence au sein de l’édifice est déterminante. Des parois vitrées et de grandes ouvertures ont été imaginées pour établir des liens visuels entre les différentes fonctions et permettre une compréhension immédiate de l’organisation générale. Ces éléments répondent également à des impératifs pratiques, comme l’isolation acoustique entre zones bruyantes et calmes.

Performances environnementales et techniques

Le KAP a été conçu pour offrir un confort optimal. Des panneaux acoustiques ont été intégrés afin d’atténuer les nuisances sonores, et l’installation de vitrages spécifiques permet de réduire la transmission du bruit. L’éclairage a également fait l’objet d’une attention particulière, intégrant à la fois les besoins d’ambiance des espaces collectifs et les exigences de confort des postes de travail. Les locaux techniques ont été dissimulés dans l’enveloppe ou en noyau central dans ce même souci d’isolation phonique, mais aussi afin de préserver l’esthétique de l’édifice.

En parallèle, des ambitions élevées en matière de performance énergétique et environnementale ont guidé la réhabilitation. Le bâtiment Kessler a été rénové pour atteindre un niveau d’efficacité énergétique supérieur aux normes, avec une amélioration RTex de 20 %. L’extension neuve répond, quant à elle, aux exigences E3C1 tout en intégrant les énergies renouvelables à l’échelle du bâtiment et de l’îlot urbain. Le confort thermique a été optimisé pour garantir des conditions agréables en été sans recours à la climatisation artificielle. Certains espaces spécifiques, tels les magasins de stockage des ouvrages, ont par ailleurs requis une gestion minutieuse du contrôle hygrométrique, tandis que des solutions acoustiques ont été mises en œuvre pour assurer un confort optimal des espaces de travail et des zones communes.

Entretien, Vincent Espagno, Architecte, Espagno, Milani architectes associés et Arnaud Boyer, Architecte, BaaG Architectes associés

Quelles sont les principales exigences du programme auxquelles vous avez dû répondre ?

Ce projet se distingue par un programme qui combine plusieurs fonctions habituellement séparées.

Cette mixité d’usages rend le programme unique, mais représentait une difficulté majeure car ce type de bâtiment n’existe pas vraiment, nous devions partir d’une base programmatique solide et innover pour répondre aux attentes. Nous avons donc travaillé à partir du programme fourni tout en nous inspirant des quelques exemples émergents.

De plus, une grande partie de la conception s’est construite au cours du dialogue compétitif mené par le maître d’ouvrage avec chacune des trois équipes. À chaque phase, nous avons proposé des solutions qui étaient ensuite discutées avec le programmiste et l’équipe. Cela a permis d’affiner le projet au fil des discussions tout en tenant compte des attentes spécifiques.

Entretien, Sylvain Benoi, Directeur, GCC Auvergne

En quoi ce projet de centre de ressources s’inscrit-il dans la stratégie de GCC Auvergne ?

Tout d’abord, les projets de construction et de réhabilitation correspondent à notre cœur de métier, d’autant plus qu’il s’agissait d’un marché global de performance, une approche que nous développons et maîtrisons depuis plusieurs années et qui fait partie intégrante de notre stratégie d’entreprise comme de nos savoir-faire.

Ensuite, ce projet revêt une importance significative pour nous, car il prolonge notre collaboration avec l’Université. En 2016, nous avions construit le nouveau bâtiment du Laboratoire Magmas et Volcans lors de son déménagement. Aujourd’hui, réhabiliter l’ancien laboratoire pour lui offrir une nouvelle vocation, c’est

achever ce cycle de manière cohérente et marquante. Enfin, un point essentiel de ce projet est la valorisation des compétences et l’implication des acteurs locaux. En effet, 98 % des entreprises mobilisées sont basées en région Auvergne-

Rhône-Alpes, dont 84 % dans le département du Puy-de-Dôme.

 

Fiche technique :

Maîtrise d’ouvrage : Université Clermont Auvergne
Assistant maître d’ouvrage : Cabinet CLÉMENT et Associés
Assistants techniques Maître d’ouvrage / Programmation : 3S Concept Ingénierie / Impulse / AG Studio
Mandataire et entreprise générale : GCC Auvergne
Architecte : EMAA – Espagno Milani architectes associés
Architecte associé : BaaG Architectes associés

Par Cléa Calderoni
Toutes les photos sont de : © Fabien Garcia

— Retrouvez l’article dans Archistorm 132 daté mai – juin 2025