CHRONIQUE

On ne peut que déplorer la perte irréparable de la magnifique charpente de Notre-Dame de Paris datant du Moyen Âge, de sa flèche réalisée par Eugène Viollet-le-Duc en 1859 et les dommages collatéraux qu’a subi la cathédrale lors de l’incendie du 15 avril 2019. Et partager l’émotion ressentie au moment de ce sinistre tout en s’associant pleinement aux gestes de solidarité exprimés pour remettre en état au plus vite ce symbole national et ce lieu de culte. L’élan qui s’est exprimé en France mais aussi aux États-Unis pour en financer les travaux de reconstruction matérialise d’ailleurs ces sentiments forts.

La cathédrale durant l’incendie, 15 avril 2109 © Milliped

Mais la question qui se pose et qui fait largement débat est : que faire maintenant. Face  l’émotion, le pouvoir politique a cru bon de réagir vite : un délai de cinq ans annoncé pour les travaux, un patron du chantier ancien chef d’État-major des forces armées, un concours international pour la flèche. Les donateurs – encore largement potentiels – ont eux-aussi très rapidement montré leur engagement. Avec quelques semaines de recul, on peut cependant proposer quelques recommandations face au défi que représente le chantier de remise en état, et non d’ailleurs de reconstruction de la cathédrale car si celle-ci a souffert, elle n’a pas été détruite loin s’en faut.

 

Après la mise hors d’eau de l’édifice dans les meilleurs délais pour protéger les maçonneries et l’intérieur, la première tâche, très délicate, est de conduire les expertises nécessaires avec rigueur, en prenant le temps qu’il faut et en s’entourant des meilleurs avis d’experts, notamment ceux qualifiés sur les monuments historiques, architectes, techniciens, entreprises et historiens. La mission est d’autant plus complexe que l’édifice est fragilisé. Il conviendra sans doute d’étayer les voûtes en partie effondrées, comme cela a déjà été fait en urgence pour les pignons du transept. La tâche la plus lourde, et qui risque de prendre du temps est de réparer les maçonneries éventuellement endommagées, les conforter et les restaurer à l’identique autant que possible, voire les reconstituer. Soumises au feu, à l’eau, au refroidissement brutal, les murs peuvent présenter des dommages pas forcément visibles qui pourraient compromettre à terme la stabilité d’une partie de l’édifice. Les voûtes devront aussi être en partie reconstruites. Les expertises ne manquent pas en France dans ce domaine et l’approche est celle, classique, des monuments historiques où l’on cherche à préserver l’intégrité matérielle de l’héritage de l’histoire tout en prenant soin de pouvoir identifier les transformations effectuées. Il ne faut pas oublier la restauration des sculptures – déjà largement remaniées par Lassus et Viollet-le-Duc -, des modénatures en pierre, des ornements métalliques en plomb ou en zinc, du décor intérieur, et qui faisaient déjà l’objet d’un complexe chantier avant l’incendie.

La couverture en plomb de la cathédrale

 

Quel matériau pour la toiture ?

La tâche suivante est de rebâtir une charpente solide, légère et durable. Cela peut se faire en temps masqué et anticiper sur la reconstruction de la toiture permettrait de travailler plus facilement sur la réparation des voûtes et des éléments intérieurs. Si la reconstitution du volume et de la modénature de la toiture fait consensus, les matériaux à choisir pour la charpente font débat. Des voix se sont élevées en faveur de la reconstitution de la charpente d’origine, elle-même déjà remaniée à plusieurs reprises dès le Moyen Âge, pour pouvoir retrouver l’intégrité de la cathédrale.

 

Texte : Bertrand Lemoine
Visuel à la une : Miysis 3D

Découvrez l’intégralité de l’article sur la chronique de Notre-Dame de Paris au sein du numéro 97 d’Archistorm, daté juillet-août 2019 !